En soutien aux éleveurs ariégeois confrontés à un abattage total après la détection d’un foyer de dermatose nodulaire contagieuse, les agriculteurs de Haute-Garonne ont bloqué plusieurs axes autour de Toulouse ce jeudi. À commencer par le péage de Villefranche-de-Lauragais.
À l’approche du péage de Villefranche-de-Lauragais, la file de voitures s’allonge. Il est presque 17h et, depuis près d’une heure, une trentaine d’agriculteurs et neuf tracteurs occupent les voies. Une seule reste ouverte. La Haute-Garonne vit l’un des nombreux points de blocage déclenchés ce jeudi, en réaction à la situation explosive en Ariège, où un foyer de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) a entraîné la décision d’abattre un troupeau entier. Un scénario que le monde agricole refuse désormais d’accepter.
Sous un vent glacial, Loïc Cordier, céréalier à Auriac-sur-Vendinelle et trésorier des Jeunes Agriculteurs 31, accueille les nouveaux arrivants. “Ce qui nous touche, c’est la non-écoute du gouvernement ! On propose des solutions, ils nous envoient les CRS pour nous déloger.” Pour lui, la colère dépasse largement les clivages habituels : “Là, ça va au-delà des syndicats, c’est tout le monde paysan qui se soulève.”
Autour, les discussions tournent toutes vers la même ligne rouge : l’abattage total d’un troupeau pour quelques cas de DNC. “C’est inhumain”, lâche Loïc Cordier. À quelques mètres, Florian Tesseyre, éleveur à Lagarde, acquiesce : “Nous, les bêtes, on les côtoie tous les jours… abattre un troupeau entier, c’est lamentable.” Il confie qu’il aurait aimé être en Ariège : “On n’a pas pu monter là-bas, alors on est ici.”
“Pensez à nos collègues en Ariège !”
À 17h45, l’ambiance monte d’un cran. Loïc Cordier rassemble tout le monde en cercle. “Ils veulent nous envoyer les chars pour dix tracteurs ! Deux solutions : soit on laisse passer une voie, soit on bloque tout. Mais il faut rester unis.” Les regards se croisent, certains viennent de Revel ou même de l’Aude. Décision : ils restent.
“Pensez à nos collègues en Ariège, qui sont 700 et qui vont se faire défoncer !” poursuit Loïc Cordier. L’annonce d’un possible accord sur place, dont personne ne connaît la teneur, ne suffit pas à calmer les nerfs.
À mesure que la nuit tombe, les gendarmes, désormais plus nombreux que les agriculteurs, multiplient les échanges avec les représentants syndicaux. L’ambiance reste étonnamment cordiale. Les tracteurs arborent des drapeaux des JA. Les journalistes affluent, les renforts aussi. “C’est normal d’être là, même si je suis pas agriculteur”, dit David, fonctionnaire, venu “faire le nombre”. “Bientôt, il n’y aura plus de viande française, alors oui, je reste.”
Des mobilisations aux quatre coins du département
Dans la soirée, le dispositif a évolué : le blocage a été momentanément levé et déplacé vers le rond-point situé en amont du péage, le temps de manger et de réorganiser les positions. Les agriculteurs prévoient ensuite de revenir occuper le péage en instaurant un barrage filtrant, permettant le passage des urgences.
Ce point de Villefranche n’était qu’un maillon de la mobilisation : en fin de journée, d’autres groupes d’agriculteurs ont convergé vers Eurocentre à Castelnau-d’Estrétefonds, ou encore à Montastruc pour bloquer l’A68. Les informations restent toutefois difficiles à confirmer tant les actions se coordonnent dans l’urgence, sur fond de chaos persistant en Ariège.

