D’un côté un gouvernement qui cherche à faire 44 milliards d’économies pour son Budget 2026, de l’autre une épargne des Français colossale avec 444 milliards d’euros au printemps 2025 sur le Livret A et plus de 2000 milliards d’euros sur les plans d’assurance-vie. Si les Français épargnent toujours plus, ils craignent de se voir ponctionner leurs économies…
La mécanique est imparable : plus l’inquiétude est grande quant à l’avenir, plus on épargne, par précaution. Les Français ne dérogent pas à la règle, eux qui sont parmi les Européens qui épargnent le plus. Mais ils craignent désormais que le gouvernement, qui recherche déjà 44 milliards d’euros pour combler le déficit abyssal et la dette colossale, ne soit tenté de ponctionner leurs économies.
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Ces économies, il est vrai, affichent des niveaux records : 444 milliards d’euros au printemps 2025 pour le Livret A, 609,4 milliards en incluant le Livret de développement durable et solidaire (LDDS) et plus de 2000 milliards d’euros pour les Assurances vie.
Du jamais vu depuis les années 80
« En juillet 2025, les cotisations en assurance vie s’élèvent à 17,9 milliards d’euros, en progression de + 10 %, soit + 1,6 milliard d’euros, par rapport à juillet 2024. Elles atteignent ainsi un niveau record sur un mois », indiquait France Assureurs, notant que « la collecte nette a doublé par rapport à celle de juillet 2024, à + 4,1 milliards d’euros [et que] les cotisations des plan épargne retraite (PER) assurantiels [étaient] en hausse de + 10 % sur le mois de juillet. »
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Selon les derniers chiffres de l’Insee, le taux d’épargne des ménages augmente de nouveau ce trimestre : il s’établit ainsi à 18,9 %, après 18,6 % au trimestre précédent. Le taux d’épargne financière est de son côté passé de 9,5 à 9,8 % du revenu disponible brut. Du jamais vu depuis les années 80… 43 % des ménages épargnent ainsi, hissant le patrimoine financier des Français à plus de 6 300 milliards d’euros, soit le double du montant de la dette du pays…
« Le taux d’épargne reste très élevé en France. Depuis son pic de 26,1 % au deuxième trimestre 2020, lié à la chute de la consommation pendant les confinements, le taux d’épargne des ménages était progressivement redescendu, se rapprochant de son niveau d’avant-Covid (15,2 % au quatrième trimestre 2019). Il est toutefois reparti à la hausse ces derniers trimestres, atteignant 18,6 % au premier trimestre 2025 », indique la Fédération bancaire française (FBF), qui souligne qu’ « à titre de comparaison, la France fait partie des pays de la zone euro où le taux d’épargne est le plus élevé (Allemagne : 19,4 % ; Espagne : 12,8 % ; Italie : 12,0 %) [et] que pour la première fois depuis le quatrième trimestre 2000, le taux d’épargne financière des ménages français dépasse celui des ménages allemands. »
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« Le retour de l’incertitude politique après l’annonce du Premier ministre François Bayrou du 25 août dernier ne devrait pas inciter les ménages à relâcher leur effort d’épargne. Certes, les ménages sont de plus en plus résilients compte tenu de la multiplication des crises, en revanche leur prudence s’inscrit dans la durée », estime le Cercle de l’Épargne.
Financer l’effort de défense, l’hôpital ?
Épargner face à des lendemains incertains, mais avec en plus l’inquiétude de voir l’épargne ponctionnée par un État impécunieux.
Depuis plusieurs mois, des pistes sont explorées pour faire de l’épargner des Français un levier du financement de l’hôpital, de la défense ou du modèle social : création de livrets spécifiques (« Défense », « Hôpital »), lancement d’un grand emprunt national ou encore fléchage des encours colossaux de l’assurance-vie et du Livret A sont sur la table. Mais ces options restent évidemment hautement controversées. Beaucoup dénoncent le risque de « double peine » pour les citoyens, déjà contributeurs via l’impôt.
D’autres soulignent l’effet d’éviction au détriment d’investissements prioritaires comme le logement social. Enfin, la sécurité des fonds et la transparence sur leur usage nourrissent la défiance. Si 70 % des Français jugent la défense prioritaire, moins de la moitié accepterait d’y consacrer une part de leur épargne. Le débat reste ouvert.