En marge des débats houleux sur la taxe Zucman, rejetée hier, la commission des Affaires sociales a adopté plusieurs mesures sociales dans le cadre du budget de la Sécurité sociale pour 2026. Congé de naissance, encadrement des arrêts maladie et taxes « comportementales » ont été approuvés avant le vote décisif sur la suspension de la réforme des retraites, condition posée par les socialistes pour éviter une nouvelle crise politique.
Dans l’ombre de l’hémicycle, la commission des Affaires sociales s’est penchée hier sur le budget de la Sécurité sociale pour 2026. Un exercice aussi laborieux que paradoxal : les députés savent que tout ce qu’ils adoptent ici sera effacé lorsque le texte reviendra dans l’hémicycle, la semaine prochaine, pour être débattu à partir de la version initiale du gouvernement.
Mais ce travail n’en demeure pas moins un baromètre politique, révélateur des lignes de fracture qui traversent la majorité et l’opposition à l’approche du vote sur la suspension de la réforme des retraites.
Dans ce contexte tendu, plusieurs dispositions ont été approuvées, traduisant un compromis fragile entre rigueur budgétaire et avancées sociales. La plus symbolique est la création d’un congé de naissance, permettant à chaque parent de bénéficier d’un ou deux mois supplémentaires, non fractionnables, après la naissance d’un enfant. Cette mesure, saluée à gauche comme un pas vers une meilleure conciliation entre vie familiale et professionnelle, sera indemnisée à hauteur de 70 % du salaire net le premier mois et 60 % le second, selon un décret à venir. Un signe d’ouverture sociale, mais calibré pour ne pas alourdir les comptes de la branche famille.
Autre texte adopté : la limitation de la durée des arrêts de travail, désormais plafonnée à quinze jours pour un premier arrêt prescrit en ville, trente à l’hôpital et deux mois pour les prolongations. Les médecins pourront y déroger en cas de nécessité médicale, mais cette disposition, défendue au nom de la maîtrise des indemnités journalières, suscite la colère d’une partie de l’opposition, qui y voit une remise en cause de la liberté de prescription et une méfiance institutionnalisée envers les praticiens.
Les députés ont également voté plusieurs taxes “comportementales” sur l’alcool, le tabac et les produits sucrés. Objectif : rétablir une logique de prévention tout en comblant le déficit croissant de la Sécurité sociale, alors que le gouvernement avait renoncé à d’autres leviers fiscaux, comme le gel du barème de la CSG ou la contribution sur les mutuelles.
La suspension de la réforme des retraites votée
Mais derrière ces mesures techniques se profilait un affrontement d’une autre ampleur : le vote sur la suspension de la réforme des retraites – condition posée par le Parti socialiste pour éviter une motion de censure.
Les députés ont approuvé en commission vers 22 h 30 la suspension de la réforme des retraites, malgré les réticences du camp gouvernemental et d’une partie de la gauche, qui dénonce une suspension en trompe-l’œil.
Inséré dans le budget de la Sécurité sociale, l’article sur la suspension de la réforme de 2023, qui portait progressivement l’âge légal de départ à 64 ans, a été approuvé par 22 voix contre 12. Le Rassemblement national et les socialistes ont voté pour.
Les députés Les Républicains, et Horizons ont voté contre la suspension. “On ne peut pas faire croire aux Français qu’ils ne devront pas travailler collectivement plus”, a défendu Justine Gruet (LR).
Tout comme les Insoumis, pour des raisons diamétralement opposées. LFI “ne votera jamais aucun texte qui prévoit un report à 64 ans de l’âge de départ”, a déclaré Hadrien Clouet, ajoutant sur X : “Il y a une majorité pour l’abroger. Le reste est une pantalonnade”.
Une “première victoire” pour le PS
Les Écologistes se sont abstenus, demandant l’intégration des carrières longues au dispositif et des pistes de financement différentes ne reposant pas sur les assurés.
Les députés Renaissance se sont aussi abstenus pour ne pas entraver la “discussion” budgétaire, selon Annie Vidal. Le MoDem s’est divisé entre abstentions et votes pour.
Sandrine Runel (PS) a salué une “première victoire”, assurant que le gouvernement s’était engagé d’ici l’arrivée dans l’hémicycle la semaine prochaine à intégrer par amendement plusieurs demandes des oppositions : une meilleure prise en compte de “la génération 65”, l’intégration des carrières longues, et l’extension aux assurés de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte.

