Ce jeudi matin, les agriculteurs de la Coordination Rurale ont mené une action coup de poing dans le Lot. À Carrefour, route de Toulouse à Cahors, ils ont mené une opération d’étiquetage. Le but : défendre les producteurs locaux face aux produits importés.
“Ça tue nos filières et nos producteurs et ça met à mal tous ceux qui travaillent avec nous”, souffle Mathieu Brocard, agriculteur céréalier dans le Quercy. Ce jeudi matin, lui et quelques autres membres de la Coordination Rurale se sont retrouvés sur le parking du Carrefour, à Cahors. L’objectif : étiqueter tous les produits non français, ne répondant pas à nos normes, ou des produits importés de l’étranger alors que l’équivalent est produit dans l’Hexagone, voire autour du Lot. Le tout pour dénoncer la concurrence internationale. “On veut vraiment mettre le doigt sur les produits les plus nuisibles”, affirme l’exploitant. Une action en réponse aux difficultés auxquelles font face les agriculteurs : les accords du Mercosur, des normes toujours plus grandes et plus pressantes…

Dans le froid et le vent, ils sont une dizaine à s’être retrouvés pour ce mouvement qu’ils veulent sans accroc. Un peu après 10h30, le coup d’envoi est donné. Le petit groupe rentre à l’intérieur du supermarché, où ils sont accueillis par le directeur du magasin, Dean Ogden, arrivé il y a tout juste 15 jours dans l’enseigne. L’échange est rapide, cordial, et une rencontre s’organisera à la fin du rassemblement. “C’est ce qu’on voulait. On aimerait voir ce qu’il est possible de faire avec eux pour trouver nos produits plus facilement, et mettre l’accent sur la qualité”, indique Mathieu Brocard. Les agriculteurs sillonnent les rayons et ne tardent pas à trouver des choses qui ne vont pas.
“On achète de la merde à l’extérieur, c’est incompréhensible”
“Il y a des choses qu’on trouve un peu étranges : ce sont des spécialités au canard… mais sans canard !”, raconte un des agriculteurs. Quelques pas plus loin, Florian s’attaque aux lardons. “Ici, il est écrit fabriqué en France en gras et en gros. Donc on a confiance, on y va un peu les yeux fermés. Alors qu’en regardant les petites écritures, on se rend compte que cela a juste été transformé ici. La viande, elle, a été élevée ailleurs. Donc pas forcément avec les mêmes normes qu’on nous impose. Ça trompe le consommateur, on a l’impression qu’on coche toutes les cases alors que non”, regrette-t-il. Ni une ni deux, une étiquette est apposée sur l’emballage : “Ce produit tue nos agriculteurs”.

Voilà l’importance de cette mobilisation : sensibiliser les consommateurs. Et dans les rayons, tous sont compréhensifs. “Je suis fille et femme de paysan, évidemment que je soutiens cette action. J’ai vu mon mari avoir de grosses difficultés”, commente l’une d’elles. Un autre est plus remonté : “J’adhère à 100 %. On produit tout ce qu’il faut en France et on achète de la merde à l’extérieur, c’est incompréhensible”.
Une productrice de noix tombe face à des noix américaines
La Coordination Rurale inspecte désormais les fruits et légumes. “Là, on a des kiwis verts et jaunes qui proviennent de Nouvelle-Zélande. Alors qu’il y a une production dans le Tarn-et-Garonne. Et ils ne proposent même pas d’équivalent”, détaille Mathieu Brocard. Pareil pour les haricots plats du Kenya… Et côté poivrons, les verts proviennent de France, et les jaunes et les rouges d’Espagne. Dans le bac, ils sont tous accolés. De quoi perdre les gens.

Mais le point d’orgue de cette matinée, c’est bien quand Chantal, productrice de noix, tombe sur des noix produites en Amérique. “Les noix américaines, elles n’ont pas de goût. Les cerneaux de noix sont vendus 40 euros le kilo. Nous, on ne fait pas de vente directe donc on les vend à un marchand de noix mais ça doit être à 10 euros le kilo, donc quatre fois moins”, s’agace-t-elle légèrement. Côté viande fraîche, c’est plutôt la bonne surprise. Il y a quelques bémols, comme cette barquette d’agneau de Nouvelle-Zélande juste à côté de celui du Quercy, mais c’est plutôt une bonne surprise. “Ils jouent le jeu”, confie Mathieu Brocard. Après cette action, la dizaine d’agriculteurs s’est rendue au Leclerc, à Cahors-Pradines. “On a été accueillis un peu moins sympathiquement, ils étaient sur le qui-vive. Pourtant, c’était aussi une bonne surprise : leur rayon viande à la découpe et viande fraîche était irréprochable. Sur les produits transformés et les fruits et légumes, il y avait quelques problèmes”. Des mobilisations similaires étaient organisées à Biars et à Seint-Céré. Après cette action, la Coordination Rurale ne compte pas baisser les bras, le Lot peut s’attendre à d’autres actions.

