October 19, 2025

"En 5 minutes, on en fait trois": Dans ce quartier résidentiel, trois pharmacies se disputent les patients : l’étrange concentration des pharmacies albigeoises

l’essentiel
La concentration de pharmacies à Albi bouscule l’équilibre du quartier de La Mouline – Le Gô. Trois officines se disputent les mêmes clients sur un kilomètre à peine. L’équation entre service public et rentabilité se complique.

Trois pharmacies à moins d’un kilomètre les unes des autres : à Albi, le quartier de La Mouline – Le Gô cumule les ordonnances. Le long de l’avenue de Saint-Juéry, trois officines se partagent désormais le même bassin de clientèle. Un paradoxe qui interroge : comment en est-on arrivé à une telle concentration, et quelles en sont les conséquences pour le commerce local ?

“En cinq minutes à peine en voiture, on peut en faire trois”, relève un participant à une récente réunion de quartier. Ce constat traduit une inquiétude réelle : celle d’une concurrence exacerbée dans un secteur déjà fragilisé par la baisse de fréquentation du centre commercial du Val de Caussels.

À lire aussi :
“Des avancées concrètes” : après une rencontre avec Sébastien Lecornu, pourquoi les pharmacies lèvent leur mouvement de grève

L’équilibre s’est rompu en 2020, avec le déménagement de la pharmacie du quartier Lapanouse. En s’installant sur l’avenue de Saint-Juéry, elle s’est rapprochée de celles du Gô et de la Renaudié. Résultat : trois pharmacies concentrées sur une même artère, quand d’autres zones d’Albi en manquent. Pour plusieurs riverains, cette situation déséquilibre le maillage pharmaceutique et fragilise les petites structures.

Bernard Champanet, président de l’Ordre des pharmaciens du Tarn, observe ces mutations avec recul. “Autrefois, les pharmacies étaient concentrées dans le centre-ville. Quatre ont été transférées vers la périphérie, à mesure que la population augmentait et que les modes de vie changeaient”, explique-t-il. Cette redistribution visait à garantir une présence dans chaque quartier, au plus près des habitants.

Une réglementation qui doit garantir accessibilité et viabilité économique

Mais ce schéma ne dépend pas du bon vouloir des pharmaciens. “Ils n’ont pas le libre choix de leur installation. C’est l’Agence régionale de santé qui évalue les dossiers et décide de l’installation des pharmacies”, rappelle Bernard Champanet. En théorie, le système doit assurer un équilibre entre accessibilité et viabilité économique. En pratique, les réalités locales en brouillent parfois les lignes.

À La Mouline – Le Gô, les clients oscillent entre fidélité et pragmatisme. “Moi, je vais toujours à ma pharmacie. Je connais tellement bien les conseillers ici, je ne changerais pas”, confie Huguette, habituée du Gô. D’autres, en revanche, n’hésitent plus à comparer, provoquant d’importantes variations de fréquentation d’une officine à l’autre.

À lire aussi :
La mobilisation pour sauver la pharmacie de Monestiés se poursuit

“Les quartiers sont délimités avec, globalement, chacun une pharmacie de proximité. Les clients devraient s’en tenir à la leur”, plaide Bernard Champanet, conscient que la concurrence ne se joue plus seulement sur la carte officielle, mais aussi sur les habitudes des consommateurs.

Ce regroupement inédit de trois pharmacies sur une même avenue résume à lui seul les contradictions du maillage officinal d’Albi. Pensé pour garantir un service de proximité, il se heurte aujourd’hui à la concurrence économique, aux choix d’aménagement urbain et à l’évolution des comportements de cette partie de la ville.

source

TAGS: