Le château de Marcillac, meurtri par un incendie criminel en 2018, renaît lentement. Récemment soutenu par la Mission Patrimoine, un chantier d’ampleur s’engage pour le sauver. La mémoire du Quercy se relève.
Depuis son éperon rocheux dominant la vallée du Lendou, le château de Marcillac veille sur le Quercy Blanc depuis la fin du XIIIe siècle. Sa tour-maîtresse, son escalier à volée droite exceptionnel et sa chapelle castrale ont traversé le temps, mais aussi les flammes. En août 2018, un incendie criminel a ravagé l’aile ouest, précipitant le site dans un état critique. “Le site s’est largement dégradé au début du XXIe siècle pour plusieurs raisons. D’une part, des effondrements jusque-là retardés ont eu lieu, notamment une partie de la tour maîtresse qui est tombée sur une charpente voisine, arrachant une partie du toit. Et d’autre part, il y a eu des actes de malveillance, notamment un incendie, qui a dégradé toute la partie encore habitable”, confie son propriétaire, Nicolas Mat.
Depuis trois ans, il veille sur le domaine familial avec une ténacité peu commune. Héritier d’un lieu sauvé de la ruine dans les années 1960 par ses grands-parents, il a décidé de reprendre le flambeau. “Je ne pouvais pas laisser tomber”, explique-t-il. “Ce patrimoine me tient à cœur, pour son histoire, mais aussi pour ce qu’il représente pour tout un territoire.”

Un chantier colossal
Les constats techniques sont sans appel. Certaines parties de l’édifice menacent de s’effondrer. C’est notamment le cas des toitures dont plusieurs se sont déjà écroulées, des planchers, mais aussi d’éléments de maçonnerie. “Depuis que j’ai acquis le lieu, mon premier objectif a été de le sauvegarder : éviter que le site ne se dégrade davantage et commencer à le remettre en valeur”, précise le quadragénaire. Les premiers travaux ont porté sur le débroussaillage, la sécurisation de l’escalier Renaissance et plusieurs fenêtres étrésillonnées et étayées. Des actions qui ont été réalisées avec le concours de la Drac Occitanie, du Département, de la Région, de la fondation Demeure Historique, mais aussi de la Fondation du patrimoine.
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Le soutien récent de la Mission Patrimoine pourrait marquer un tournant décisif pour le château. “Dans le dossier, il s’agit de mettre le site hors d’eau, hors d’air : refaire les charpentes, les couvertures, quelques éléments de maçonnerie et reprendre les planchers intérieurs”, poursuit Nicolas Mat. “C’est un chantier de longue haleine, qui s’étendra sur plusieurs mois, voir plusieurs années. Mais c’est essentiel avant de penser à des aménagements intérieurs”. Un travail colossal, estimé à moins d’un million d’euros.

Au total, plus de 450 m² d’échafaudages devraient être installés sur le site. “Ce n’est pas un lieu où l’on peut intervenir n’importe comment : certaines parties datent du XIIIe siècle. Je travaille avec un architecte du patrimoine, une étude préalable a été réalisée”, précise encore le propriétaire.
Sauver, transmettre et partager
Derrière la rigueur des diagnostics, il y a une histoire de transmission. Celle d’une famille, d’abord, mais aussi celle d’un homme qui a choisi de porter un projet plus grand que lui. Le propriétaire n’envisage pourtant pas ce chantier comme une entreprise solitaire. “Ce projet reste à taille humaine. Il y a beaucoup d’humilité, mais aussi de solidarité. On sent un vrai attachement du public pour ces lieux.” L’ouverture exceptionnelle du domaine lors des récentes Journées du patrimoine l’a d’ailleurs confirmé : des dizaines de visiteurs sont venus redécouvrir ce site emblématique, souvent pour la première fois.
Le chantier de Marcillac ne vise pas seulement à sauver des murs. Il s’agit aussi de redonner vie à un patrimoine vivant, intimement lié à la culture locale. En 1968, les grands-parents de Nicolas Mat avaient fondé ici le Festival de musique du Quercy Blanc, l’un des plus anciens du Sud de la France. “Nous réfléchissons à un format hors les murs, à proximité immédiate. Mais il faut que ce soit compatible avec les exigences de sécurité, ce n’est pas simple d’organiser un concert au milieu d’une forêt d’échafaudages.” À terme, le lieu pourrait accueillir des concerts, des expositions et des réceptions, tout en conservant une partie privée. “Restaurer, c’est une chose. Entretenir, c’en est une autre. Pour durer, il faut aussi trouver un modèle économique viable.”
Un appel à la mobilisation
Le château de Marcillac, classé monument historique en totalité depuis 2024, bénéficie aujourd’hui d’un regain d’intérêt. Une campagne de dons est déjà ouverte via la Demeure Historique pour accompagner les travaux. “Chaque geste compte, même modeste. C’est un projet collectif, à la croisée de la mémoire et de l’avenir.”
Pour Nicolas Mat, le cap est clair : stabiliser, restaurer, transmettre. “Les résultats ne seront pas visibles en quelques semaines. Mais le plus important, c’est de remettre le château sur ses pieds. C’est un morceau d’histoire qu’on rendra, un jour, au Quercy.”