La paralysie, situation hautement impopulaire, est une situation que les élus américains tentent souvent d’arrêter. SAUL LOEB / AFP
Les Etats-Unis connaîtront « probablement » une paralysie budgétaire faute d’accord entre républicains et démocrates, a estimé ce mardi 30 septembre le président américain Donald Trump, rejetant la faute sur l’opposition. « Ils veulent tout fermer, nous ne le voulons pas. Nous ne voulons pas » d’une paralysie des services fédéraux, a-t-il martelé depuis le Bureau ovale.
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D’un côté, les républicains proposent une extension du budget actuel jusqu’à fin novembre. De l’autre, les démocrates veulent obtenir le rétablissement de centaines de milliards de dollars en dépenses de santé, notamment dans le programme d’assurance santé « Obamacare » pour les ménages des classes populaires, que l’administration Trump a prévu de supprimer avec sa « grande et belle loi » budgétaire adoptée en juillet. Si en mars dernier, la paralysie avait été évitée par le vote à contrecœur de dix élus démocrates, les deux camps semblent aujourd’hui prêts à camper sur leurs positions.
A minuit dans la nuit de ce mardi à mercredi, sans adoption d’un texte budgétaire même temporaire, les Etats-Unis se trouveront en situation de « shutdown », avec pour conséquence la mise à l’arrêt de la plupart des services fédéraux. On fait le point.
• Des millions de fonctionnaires non payés
La situation peut varier selon la catégorie d’agents gouvernementaux. D’une part, les agents considérés comme « essentiels », à savoir les militaires en service actif, les forces de sécurité, le contrôle aux frontières ou encore les contrôleurs aériens mais aussi l’entretien des réseaux électriques ou les soins médicaux hospitaliers : tous devront continuer à travailler… sans être payés.
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De l’autre, les agents dits « non essentiels » qui seront eux mis au chômage partiel par cette paralysie et ne seront pas payés non plus. En conséquence, le « shutdown » impliquera la fermeture de parcs nationaux et des musées, plus de temps pour passer la sécurité dans les aéroports, une réduction des contrôles sur l’alimentation ou l’environnement ainsi que des perturbations pour certains programmes d’aide alimentaire.
Selon le Bureau budgétaire du Congrès (CBO) 750 000 fonctionnaires fédéraux pourraient en tout se retrouver cette fois au chômage partiel, avec une perte de revenus équivalente à 400 millions de dollars.
• Des demandes de santé ou de retraite repoussées
Le versement de nombreuses aides sociales devrait être fortement perturbé. Les dépenses liées aux retraites ou aux programmes de santé à destination des personnes à bas revenus et âgées (programmes Medicare et Medicaid) devraient être maintenues mais les demandes d’inscriptions repoussées, précise sur son site le Comité pour un budget fédéral responsable (CFRB), une organisation bipartisane. Il estime que 10 000 demandes quotidiennes avaient été repoussées durant le précédent « shutdown », en 2018.
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Autre conséquence : la publication de statistiques économiques pourrait être retardée, augmentant l’incertitude.
• Pas d’« arrêt total » mais des dommages « souvent insidieux »
Cette paralysie est « une opération complexe, qui implique de la préparation et des personnes expérimentées pour la mettre en place », a rappelé lors d’une conférence de presse téléphonique le PDG de l’ONG Partnership for Public Service, Max Stier, cité par l’AFP
« Les trois quarts des dépenses sont maintenues. Les Américains ne vont pas être confrontés à un arrêt total des services publics », a-t-il détaillé, ajoutant cependant que « les dommages provoqués sont souvent plus insidieux », en stoppant notamment « des investissements de long terme nécessaires pour notre gouvernement sur le long terme ».
• Quel coût pour l’économie américaine ?
Selon la compagnie d’assurances NationWide, chaque semaine de paralysie pourrait réduire la croissance de 0,2 point de pourcentage. « Le gouvernement Trump pourrait en profiter pour réduire davantage les subventions et les exécutifs fédéraux », pointent-ils, « ce qui constituerait un changement significatif par rapport aux “shutdowns” précédents, où les employés mis en congé étaient réemployés » dès la situation rétablie.
Une hypothèse loin d’être fantaisiste : en cas de « shutdown », la réduction des effectifs de fonctionnaires, mis au chômage technique, pourrait devenir permanente, a récemment menacé le directeur du budget de la Maison-Blanche, Russell Vought. Donald Trump a fait monter la pression en assurant que cela pourrait avoir des conséquences « irréversibles » si les démocrates ne finissaient pas par accepter le budget voulu par les républicains.
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« Nous pouvons, durant le “shutdown”, faire des choses qui sont irréversibles, qui seront mauvaises pour eux. Comme licencier de nombreuses personnes, mettre fin à ce qu’ils aiment, cesser les programmes » que les démocrates défendent, a de son côté agité Donald Trump.
• Combien de temps cela peut-il durer ?
En moyenne, depuis le premier en 1976, la paralysie n’a cependant duré que huit jours. Mais le « shutdown » le plus long de l’histoire des États-Unis, et également le dernier en date, a duré 35 jours, en décembre 2018 et janvier 2019, sous la présidence de Donald Trump.
La paralysie, situation hautement impopulaire, est une situation que les élus américains tentent souvent d’arrêter, et il n’est pas rare que des accords soient arrachés à la dernière minute, avant même qu’elle débute. Mais à un an des élections de mi-mandat de novembre 2026, qui pourrait remettre en cause la majorité de Donald Trump, les considérations politiques pourraient primer.