La Première ministre par intérim du Népal, Sushila Karki (au centre), à Katmandou, le 13 septembre 2025. NIRANJAN SHRESTHA/AP/SIPA
Vers une sortie de crise au Népal ? Après les émeutes meurtrières du début de la semaine, initiées par une jeunesse désabusée par la corruption du pays, une nouvelle Première ministre a été nommée vendredi. Réputée pour son indépendance, Sushila Karki restera en poste durant six mois, jusqu’à l’organisation d’élections législatives en mars prochain.
• « Travailler en accord avec la pensée de la génération Z »
La nouvelle Première ministre s’est engagée ce dimanche 14 septembre à répondre aux revendications des manifestants qui réclament « la fin de la corruption ». « Nous devons travailler en accord avec la pensée de la génération Z » regroupant les personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010, a déclaré Sushila Karki dans ses premières déclarations publiques depuis son entrée en fonction vendredi, après la démission du chef du gouvernement, KP Sharma Oli.
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« Ce que ce groupe réclame, c’est la fin de la corruption, une bonne gouvernance et l’égalité économique », a exposé l’ancienne présidente de la Cour suprême âgée de 73 ans. Et d’ajouter : « Vous et moi devons être déterminés à atteindre cet objectif ».
• Au moins 72 morts et 191 blessés, un bilan en hausse
La capitale, Katmandou, a été le théâtre lundi et mardi de violentes manifestations antigouvernementales qui ont fait au moins 72 morts et 191 blessés, selon un nouveau bilan communiqué dimanche par le secrétaire en chef du gouvernement, Eaknarayan Arya, révisant à la hausse un précédent bilan de 51 personnes tuées.
Sushila Karki a observé une minute de silence ce dimanche à la mémoire des victimes de ces troubles, les plus graves depuis l’abolition de la monarchie en 2008, suscités par la répression policière de manifestations dont les participants dénonçaient un blocage des réseaux sociaux et la corruption des élites.
• Un intérim de six mois jusqu’aux législatives du 5 mars
La nouvelle Première ministre a précisé qu’elle et son gouvernement intérimaire « ne (resteraient) pas plus de six mois », des élections législatives étant prévues le 5 mars 2026, après la dissolution du Parlement. « Quelle que soit la situation, nous ne resterons pas ici plus de six mois, nous assumerons nos responsabilités et promettrons de transmettre (le pouvoir) au prochain Parlement et aux ministres, » a-t-elle déclaré dans son allocution.
L’agenda de la première femme chargée de diriger le Népal s’annonce chargé et sa mission difficile, tant sont nombreuses les revendications des jeunes qui ont provoqué le départ du précédent gouvernement. La génération Z, durement frappée par le chômage, avait fait exploser sa colère lundi dans les rues du pays contre un gouvernement jugé corrompu et incapable de répondre à ses besoins.
Ce dimanche, Sushila Karki a entamé une série de réunions dans le complexe gouvernemental de Singha Durbar de la capitale, Katmandou, dont plusieurs bâtiments avaient été incendiés lors des manifestations mardi.
• Une situation « très difficile, compliquée et grave »
Son nom a émergé en début de semaine sur les réseaux sociaux, semblant faire l’objet d’un certain consensus parmi les jeunes contestataires pour diriger le gouvernement provisoire. Connue pour son indépendance et son franc-parler, sa nomination a fait l’objet d’intenses négociations entre le chef de l’armée, Ashok Raj Sigdel, et le président, Ram Chandra Paudel. « La situation dans laquelle je me trouve, je ne l’ai pas souhaitée. Mon nom a émergé dans les rues, » a-t-elle affirmé.
Le président Paudel a affirmé samedi soir qu’« une solution pacifique avait été trouvée à l’issue d’un processus difficile ». Il a qualifié la situation de « très difficile, compliquée et grave » dans ce pays himalayen de 30 millions d’habitants. « Je lance un appel sincère à chacun pour tirer le meilleur parti de cette opportunité (…) pour réussir les élections du 5 mars, » a-t-il déclaré.
Les soldats étaient moins présents ce dimanche dans les rues de la capitale, où ils avaient été déployés en grand nombre après les manifestations. Environ 12 500 détenus, qui ont profité des troubles pour s’évader de leurs prisons, étaient toujours dans la nature ce dimanche.
Des dirigeants asiatiques ont félicité Sushila Karki, notamment ceux des deux grands voisins du Népal, l’Inde et la Chine.