August 4, 2025

Départ de Ryanair de l’aéroport de Brive : le Lot crie à la fracture sociale et redoute un enclavement économique durable

l’essentiel
L’annonce choc de Ryanair, qui ferme sa ligne Brive-Porto dès octobre 2025, inquiète fortement élus et acteurs économiques lotois. Emplois, attractivité et cohésion sociale sont menacés dans un département déjà enclavé.

Le couperet est tombé mercredi 30 juillet 2025. Ryanair a décidé l’arrêt de ses opérations aux aéroports de Bergerac (Dordogne), de Brive (Corrèze) et de Strasbourg (Bas-Rhin), réduisant de 13 % ses capacités dans l’Hexagone. En Corrèze, cette décision concerne la ligne vers Porto, qui sera suspendue à compter du 26 octobre pour la saison hivernale. La raison de ce départ ? Selon la compagnie irlandaise : l’augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA), passée de 2,63 à 7,40 euros pour les vols intérieurs ou européens.

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Pour le Lot, cette annonce est une catastrophe. L’aéroport de Brive, dont le Syndicat mixte rassemble notamment le Département, la CCI du Lot et la communauté de communes Causses et Vallée de la Dordogne (Cauvaldor), est historiquement lié au Portugal. Avec près 16 000 passagers sur la seule saison hivernale, la ligne Brive-Porto est bien plus qu’une simple liaison aérienne : elle symbolise une connexion économique et culturelle essentielle pour le territoire.

“C’est catastrophique”, lâche Frédéric Gineste, vice-président du Département chargé des Infrastructures de mobilité, dont l’institution participe à hauteur de 250 000 euros à la régie et 100 000 pour le développement des lignes chaque année. “Au-delà de l’impact touristique, cette ligne est vitale pour notre économie locale.” Sans cette connexion directe, le Lot risque une aggravation de son enclavement, un facteur qui inquiète d’autant plus que les alternatives ferroviaires, notamment la ligne POLT (Paris-Orléans-Limoges-Toulouse), connaissent de nombreux dysfonctionnements.

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Une économie locale fragilisée

Le président de Cauvaldor, Jean-Claude Fouché, dénonce lui aussi “une décision préjudiciable”, pointant notamment les risques économiques. Cauvaldor verse chaque année 62 482 euros pour soutenir l’aéroport. “Cette annonce tombe particulièrement mal, alors même qu’une grande entreprise portugaise, Tekever, spécialisée dans les drones, vient de décider d’implanter son centre d’excellence à Cahors”, constate l’élu. Même inquiétude du côté de Jean Hugon, président de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) du Lot qui verse chaque année 100 000 euros. “La réduction de l’offre à Brive, c’est moins d’attractivité économique pour les entreprises et une menace directe pour l’activité de l’aéroport lui-même, déjà fragilisé.”

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Mais au-delà des chiffres, ce sont les liens humains qui risquent de pâtir de ce départ. Le Lot abrite une forte communauté portugaise. “Cette ligne Porto-Brive est avant tout une histoire de familles, de travailleurs et de savoir-faire”, rappelle Frédéric Gineste qui s’inquiète aussi pour l’avenir du site aéroportuaire, “c’est beaucoup d’emplois. Il y a 200 emplois induits”.

Une fiscalité justifiée, mais une décision contestée

Même si certains élus comprennent la volonté du gouvernement de rééquilibrer la fiscalité aérienne, à l’instar de Frédéric Gineste qui juge cette hausse “légitime” dans une optique écologique, ils déplorent unanimement que Ryanair fasse du Lot un dommage collatéral dans son bras de fer fiscal. Pour Jean-Claude Fouché, “Ryanair cherche à profiter de la situation pour négocier de meilleures conditions ou se redéployer sur des marchés plus rentables.”

Ryanair, de son côté, maintient la pression. “À moins que le gouvernement ne change de cap et n’abolisse cette taxe aérienne injuste, la capacité et les investissements de Ryanair en France seront inévitablement redirigés vers des marchés européens plus compétitifs”, confirme Jason McGuinness, directeur commercial de Ryanair dans un communiqué, tout en promettant qu’un retrait de cette taxe pourrait déclencher un investissement massif, avec la création de 750 emplois directs en régions.

Aucun représentant de la compagnie n’a accepté de répondre à nos questions sur le cas briviste.

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