La dermatose nodulaire contagieuse, qui sévit dans les élevages bovins des Alpes, préoccupe le monde agricole du Lot-et-Garonne. La chambre d’agriculture s’opposera à tout abattage systématique des troupeaux, a affirmé sa présidente.
Lors de la dernière session de la chambre d’agriculture, qui a vu l’élection de Karine Duc à la présidence mardi 22 juillet, la problématique de la dermatose nodulaire contagieuse, une maladie qui infecte actuellement les troupeaux de bovins dans les départements alpins de la France, a été mise sur la table. Le 25 juillet dernier, la 19e étape du Tour de France entre Albertville et La Plagne, en Savoie, avait été raccourcie en raison d’un foyer détecté dans un élevage du col des Saisies. Une volonté des organisateurs de la Grande Boucle d’éviter d’étendre la contamination avec les centaines de véhicules qui composent la caravane et le peloton.
“La maladie n’est pas transmissible à l’humain, ni au lait, ni à la viande”
Alors, même si le foyer de cette épidémie, qui se transmet via des insectes (mouche, taon, etc.), est actuellement à près de 600 km de là, les éleveurs lot-et-garonnais et les services de l’État dans le département sont inquiets. La direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDECSPP) de Lot-et-Garonne s’est d’ores et déjà équipée de kits de test, a confié sa directrice Viviane Dupuy-Christophe. Le préfet a affirmé qu’il fallait « tout faire pour éviter que cette maladie arrive chez nous ». Il a d’ailleurs proposé d’organiser assez rapidement une réunion sur le sujet avec les élus de la chambre d’agriculture.
Car, à chaque cas d’animal contaminé détecté, les services sanitaires de l’État ont ordonné l’abattage systématique. Et cette pratique a été fortement dénoncée lors de la séance de la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne par Marion Debats, éleveuse de vaches laitières et élue de la Confédération paysanne. « Depuis plusieurs semaines, la dermatose modulaire contagieuse, cette maladie virale transmise par des insectes, sème la panique dans nos campagnes », a déclaré l’agricultrice face au préfet du Lot-et-Garonne, Daniel Barnier, et à tous les représentants des services de l’État. Que fait l’État ? Il ordonne l’abattage total des troupeaux, même quand un seul animal est contaminé, même quand les autres sont sains, vigoureux, pleins de vie. Mais de quoi parlons-nous exactement ? La dermatose, oui, est une maladie très sérieuse. Elle provoque des nodules douloureux, de la fièvre, et peut affaiblir la production laitière ou l’état général des animaux. Mais elle n’est pas transmissible à l’humain, ni au lait, ni à la viande. Elle n’est pas mortelle dans la majorité des cas et, surtout, elle est maîtrisable. Alors pourquoi cet acharnement ? Pourquoi tuer tout un troupeau quand seule une vache est malade ? Pourquoi ne pas tester, isoler, soigner, vacciner ? Pourquoi infliger aux éleveurs ce que beaucoup appellent aujourd’hui un véritable massacre ? »
“Dans le Lot-et-Garonne, on ne se laissera pas faire”
Pour Marion Debats, « ce que l’on abat aussi aujourd’hui, ce que l’on détruit silencieusement, c’est un patrimoine génétique. Quand on élimine tout un troupeau, on efface une bibliothèque du vivant. On détruit une richesse irremplaçable. Et cela, ce n’est pas seulement une erreur scientifique, c’est une trahison. Une trahison envers les générations qui nous ont précédées et celles qui viendront après ».
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L’éleveuse ajoute : « Nous ne pouvons rester silencieux aujourd’hui. La Confédération paysanne et la Coordination rurale l’ont dit avec force : l’abattage total est inadmissible. Comment permettre aux animaux de développer une immunité si on les tue tous dès le premier cas ? Et la science, elle, que dit-elle ? Elle dit que la période d’incubation est longue, que la transmission est lente, que la maladie peut se contenir si on agit avec discernement. D’autres pays l’ont fait. La vaccination fonctionne, les avantages subsistent. Alors je vous le demande : pourquoi en France choisir la violence sanitaire ? Pourquoi détruire la vie plutôt que la protéger ? »
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Une prise de parole saluée par les autres élus de la Chambre. Karine Duc, nouvelle présidente de la chambre consulaire, a prévenu les élus et les représentants des services de l’État : « En Lot-et-Garonne, ça ne se passera pas comme en Savoie ou en Haute-Savoie. On ne se laissera pas faire. » Elle persiste et signe : la chambre de l’agriculture et les agriculteurs de la CR 47, le syndicat agricole majoritaire dans le Lot-et-Garonne, s’opposeront aux abattages systématiques si la maladie venait à arriver en Lot-et-Garonne. « Ce sera la décision de l’agriculteur, détaille Karine Duc. S’il souhaite abattre son troupeau, on ne va pas s’opposer à sa volonté, bien évidemment. Mais s’il ne le souhaite pas, s’il veut défendre sa génétique et faire en sorte que ses bêtes ne soient pas abattues dans leur intégralité, nous l’accompagnerons. Faire des abattages systématiques de cette façon-là et de cette ampleur-là n’a pas de sens. Le cheptel français est mis à mal et on ne peut pas se le permettre. »