Celles et ceux qui dénoncent la politique génocidaire du gouvernement de Benyamin Netanyahou, ses innombrables crimes de guerre, ses multiples crimes contre l’humanité, ses violations quotidiennes du droit international… continuent d’être stigmatisés par les pouvoirs publics et les élites politiques et médiatiques de notre pays, comme presque partout en Europe. Et cela malgré les quantités de preuves accumulées que plus personne ne peut nier ou faire semblant d’ignorer.
Les autorités, tant françaises qu’européennes, refusent toujours d’arrêter de vendre des armes à l’Israël de Benyamin Netanyahou, de stopper les importations des biens en provenance des colonies illégales en Cisjordanie (bien que la Cour internationale de Justice l’ait ordonné), de sanctionner les dirigeants israéliens qui tiennent des propos génocidaires, de suspendre l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël (bien que l’article 2 de cet accord en fasse une obligation légale en cas de manquement aux droits humains fondamentaux), de défendre la Cour pénale internationale contre les attaques de Donald Trump…
Il n’est manifestement pas possible pour tous les démocrates de France et d’Europe de se mettre d’accord pour poser ensemble, tout simplement, cette question : le gouvernement suprémaciste de Benyamin Netanyahou, poursuivi pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, mérite-t-il vraiment d’être traité avec tant d’égards ? Est-il normal qu’il bénéficie d’un traitement nettement plus favorable que les islamofascistes du Hamas responsables de l’ignoble massacre du 7 octobre 2023, que nous avons sanctionnés et avec lesquels nous n’entretenons à juste titre aucune relation ? Ce qui est vu partout dans le monde comme un « deux poids deux mesures » aggrave les tensions au sein de la société française et européenne et contribue à l’isolement international de la France et de l’Europe et à leurs difficultés à trouver des alliés face à l’agression conjointe désormais de Donald Trump et de Vladimir Poutine.
On a beau prendre la question dans tous les sens, on ne peut guère trouver qu’une seule explication logique à un tel comportement : le racisme. Ceux qui refusent de sanctionner l’Israël de Netanyahou le font parce qu’ils considèrent en réalité que la vie d’un Palestinien ne vaut pas autant que celle d’un Israélien ou d’un Européen. Il n’y a guère d’autre explication possible en effet pour un comportement aussi aberrant sur le plan tant des intérêts de la France et de l’Europe que des valeurs qu’elles sont censées défendre.
Face à ce genre de démonstration, les défenseurs de Benyamin Netanyahou ont généralement recours à un argument relativiste que l’on pourrait résumer ainsi : « Pourquoi les atrocités qui se produisent ailleurs – au Soudan, en Iran, contre les Kurdes, en Birmanie – suscitent-elles moins d’émotion en France et en Europe que le conflit israélo-palestinien ? N’est-ce pas en réalité à cause de l’antisémitisme insidieux de celles et ceux qui se mobilisent surtout sur ce sujet ? » Il existe pourtant une différence fondamentale entre ces atrocités et celles causées par le gouvernement de BenyaminNetanyahouu en Palestine. Et cette différence suffit à expliquer – et à justifier – la sensibilité plus importante de ce conflit particulier.
La France et l’Europe ont sanctionné le Hamas et ses dirigeants, les mollahs iraniens, les milices soudanaises, les dirigeants birmans… Elles ne livrent d’armes ni au Soudan, ni à l’Iran, ni au Hamas, ni à la Birmanie. Elles n’ont d’accord d’association ou de relations privilégiées avec aucun de ces pays ou de ces entités. Pour cette même raison, elles ne disposent cependant pas non plus malheureusement de levier significatif pour peser sur l’action des dirigeants qui commettent ces crimes. Les citoyens européens le savent et c’est la raison pour laquelle ils demandent moins de comptes à leurs dirigeants à ce sujet. Ce qui fait la spécificité du conflit israélo-palestinien c’est que le gouvernement de Benyamin Netanyahou est, dans le monde entier, le seul gouvernement piétinant chaque jour le droit international et défendant une politique ouvertement génocidaire que la France et l’Europe refusent pour l’instant de sanctionner et continuent de soutenir activement en lui livrant des armes et en maintenant avec lui des relations économiques et politiques privilégiées.
Alors que la France et l’Europe auraient bien entendu les moyens de peser significativement sur la politique menée par ce gouvernement d’extrême droite raciste et suprémaciste si elles le décidaient parce qu’Israël dépend lourdement des Européens. C’est cet état de fait très spécifique, indéniable, qui explique pourquoi ce conflit particulier est tellement plus sensible que d’autres en France et en Europe…
Pour la cohésion de la société française et européenne comme pour la crédibilité internationale de la France et de l’Europe, il est urgent maintenant de mettre enfin nos actes et nos paroles en accord en traitant enfin le gouvernement d’extrême droite de Benyamin Netanyahou comme doit l’être un gouvernement qui piétine chaque jour le droit international et commet en permanence des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
BIO EXPRESS
Guillaume Duval, coprésident du club Maison commune et ex-rédacteur en chef d’« Alternatives économiques », a été speechwriter de Josep Borrell, ancien haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité et ex-vice-président de la Commission.
Cet article est une tribune, rédigée par un auteur extérieur
au journal et dont le point de vue n’engage pas la rédaction.

