En un an et demi, le nombre d’arbres touchés a chuté de plus de 70 %.
En 2023, la commune de Morlhon-le-Haut, située près de Villefranche-de-Rouergue en Aveyron, constate qu’un de ses sites est infesté de chenilles processionnaires du pin. “Autour de notre plan d’eau, 40 pins étaient envahis par ces insectes. Il y a pas mal de personnes qui s’y promènent, j’étais inquiet”, se souvient le maire Philippe Guilhen.
En effet, les soies des chenilles sont urticantes. Elles peuvent provoquer des allergies chez les humains, voire tuer les animaux par réaction allergique.
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Philippe Guilhen contacte alors Rémi Castagné, gérant de l’entreprise Allo Frelons 12, “pour trouver une solution à ce problème”. Le maire envisage la pose de colliers, un système qui s’est répandu dans les forêts ou chez les particuliers. Mais Rémi Castagné, également coprésident de J’essaime ma planète, ne raffole pas des procédés chimiques et des insecticides : “Je trouve aberrant de mettre de l’insecticide pour ce type de problème, dans un lieu où je vis. Et ce d’autant que j’avais une solution efficace qui mérite d’être connue. Mais je cherchais des endroits pour la mettre en œuvre”.
Le gérant dispose en outre d’un argument de poids. “Le système des colliers représente un coût. Sa solution était naturelle et moins chère, on a opté pour celle-là”, confirme le maire de Morlhon-le-Haut.
“Reproduire toute la chaîne alimentaire des prédateurs”
Rémi Castagné fait un point de la situation : 42 pins sont touchés, dont 36 arbres fortement. Il va avoir alors recours à la nature et à ses animaux pour mettre un terme à ces chenilles. En février 2024, il installe des nichoirs pour mésanges et huppes fasciées, des abris pour chauve-souris, hérissons. Tout ce petit monde raffole des chenilles processionnaires, aux différents stades de son évolution que ce soit en stade de larves, papillons adultes, chrysalides enterrées que lors de leur procession au sol. Il y en a pour tous les goûts.

“En fait, il faut reproduire toute la chaîne alimentaire des prédateurs centrée sur la chenille”, explique le gérant. Pour fixer les prédateurs, notamment les mésanges, il laisse un peu de nourriture.
L’effet de sa méthode est radical. “L’été 2024, aucune chenille n’est descendue dans le sol, il n’y a pas eu de danger au sol et aucune procession”, assure le responsable. L’hiver 2024-2025, il nourrit régulièrement mais peu les oiseaux pour “entretenir l’écosystème”, et éviter que les mésanges ne quittent les lieux. Il reste alors dix pins attaqués, soit “une chute de plus de 70 %” d’arbres touchés.
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Depuis, la commune est quasiment débarrassée des chenilles processionnaires du pin. “Aujourd’hui, quatre à cinq pins sont touchés, et ce en un an et demi”, se réjouit le maire. “Le 25 novembre 2025, seulement 4 cocons ont été recensés sur l’ensemble du site”, précise Rémi Castagné.
Une surveillance régulière du site
Le site reste toutefois sous surveillance, en accord avec la mairie. Rémi Castagné passe afin de s’assurer le maintien des prédateurs. D’autres essences d’arbres ont aussi été plantées pour les inciter à rester.
En effet, que deviennent ces beaux hérissons ou chauve-souris quand les chenilles disparaissent ? La disette est-elle au programme ? “La nature s’équilibre. Les oiseaux vont se redispatcher, les hérissons ne vont pas mourir de faim, ils vont déménager et aller dans des endroits plus propices pour eux”, assure Rémi Castagné.

L’année prochaine, ce dernier souhaite lancer une émission sur le réseau social YouTube afin de partager ses connaissances et prouver que sa méthode fonctionne. “C’est quand même peu écologique de mettre des colliers plastiques sur les arbres, qui finissent soit brûlés, soit en enfouissement. En tout cas, c’est ma philosophie”.
Pour l’instant, les communes de l’ouest Aveyron n’ont pas fait appel à lui, mais le maire de Morlhon-le-Haut a évoqué sa méthode à l’intercommunalité Ouest Aveyron. Ce territoire s’avère plutôt touché par la chenille processionnaire du chêne, que Rémi Castagné peut gérer également.
Coup de chance ou méthode infaillible ?
En 2019, une régression de chenilles processionnaires du pin avait été constatée dans les forêts du sud de l’Aveyron. Les scientifiques et spécialistes avaient donné une explication à l’époque : « Les pics de population apparaissent tous les six ans. Cette année, le niveau est au plus bas. Cela fait partie du cycle de l’espèce ».
Alors, Rémi Castagné est-il intervenu au moment où la population de chenilles allait être au plus bas ? “Les chenilles dévorent les aiguilles des pins. Quand les pins sont totalement défoliés, elles meurent. Mais quand les pins retrouvent leurs aiguilles, elles reviennent. Un cocon peut rester actif huit ans dans le sol, mais les huppes peuvent trouver et manger les œufs contenus dans ces cocons”, se défend le responsable d’Allo Frelons.
Sa méthode se veut “durable” car il n’y a plus de pics de population, les chenilles sont détruites régulièrement.

