December 5, 2025

"Ils ont tué les vaches et inculpé l’éleveur pour tentative d’homicide" : près de 800 t de fumier déversées devant la préfecture par des agriculteurs en colère

l’essentiel
La crise agricole en Ariège atteint son paroxysme. L’abattage controversé de 82 vaches saines dans le Doubs a déclenché une manifestation massive d’éleveurs ce jeudi 4 décembre 2025 à 22 h, organisée au dernier moment. Plus de 800 tonnes de fumier ont été déversées devant la préfecture.

“Exaspération”, “sidération”, “manque de considération” : pour Sébastien Durand, chef de file de la Coordination rurale de l’Ariège, “C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, et un ras-le-bol général” que les éleveurs du territoire sont venus exprimer ce jeudi 4 décembre. Ce qui a fait sauter la goupille : l’abattage de 82 vaches saines, à cause d’une suspicion de DNC sur l’une d’entre elles dans le Doubs. Un abattage qui s’est déroulé sur des vaches vaccinées, alors même que le tribunal de Besançon était en train d’examiner un référé déposé contre cette mesure, par la Confédération paysanne et la Coordination rurale.

“C’est la première fois depuis le début de la crise de la dermatose nodulaire (DNC), qu’ordre est donné à la police d’intervenir pour permettre aux services vétérinaires d’abattre la totalité du troupeau, alors même qu’un référé est en cours d’audience. Et ce qui est inédit, relate Sébastien Durand, c’est que le tribunal a jugé qu’il n’était pas compétent pour prendre une décision. Ils ont tué les vaches, et inculpé l’éleveur pour tentative d’homicide”.

“L’État ne nous respecte plus”

Suite à l’appel à manifester lancé par la Coordination rurale – massivement relayé par la Confédération paysanne – près d’une centaine d’éleveurs se sont rassemblés devant la préfecture de l’Ariège ce jeudi 4 décembre 2025 aux alentours de 22 heures. Une manifestation organisée “au dernier moment”. Durant plusieurs minutes une cinquantaine d’engins ont défilé sur les allées de Villote, captivant les passants, avant de se rendre devant la préfecture. L’objectif : marquer de manière symbolique une colère grandissante. Une colère qui s’est matérialisée par le déversement de plus de 800 tonnes de fumier et gravats devant le bâtiment de la préfecture.

Près de 800 tonnes de fumiers ont été déversées.
Près de 800 tonnes de fumiers ont été déversées.
Stéphanie Leborne

“Là on ne peut plus. On veut alerter l’État, qui n’a plus de respect envers nous, donc on lui rend la pareille. On est au bord du gouffre, c’est une catastrophe, avec le nombre d’heures qu’on fait tous les jours, on ne peut plus, on ne se fait pas chier 80 heures par semaine pour crever”, reprend Sébastien Durand.

Une rencontre avec le préfet

Une autre mesure a mis le feu aux poudres : les nouvelles conditions d’accès à une indemnisation destinée à compenser les difficultés liées aux zones réglementées. Ces zones, instaurées pour lutter contre la dermatose nodulaire, compliquent en effet fortement la circulation des troupeaux. Les vaches estivées en zone DNC ne peuvent plus regagner leur étable située en zone indemne.

Près d’une centaine d’éleveurs se sont rassemblés devant la préfecture de l’Ariège.
Près d’une centaine d’éleveurs se sont rassemblés devant la préfecture de l’Ariège.
Stéphanie Leborne

“Tous ceux qui ont leurs animaux bloqués en zone réglementée alors que leur siège d’exploitation se trouve en zone indemne ne peuvent pas les faire rentrer. Certains n’ont que 2 km à parcourir pour les nourrir, mais d’autres doivent en faire 40”, souligne Sébastien Durand. Pour répondre à cette situation, l’État s’était engagé à verser une aide de 2 € par animal et par jour.

Mais un nouveau critère vient tout remettre en question : “Pour toucher cette aide, les agriculteurs doivent fournir un contrat de mise en pension. Or personne ne peut produire un tel document puisque les bêtes se trouvent sur les terrains mêmes des éleveurs”, dénoncent-ils. Pendant plusieurs heures, jusque tard dans la soirée, les agriculteurs ont fait le tour de la préfecture, y déversant des centaines de tonnes de fumier. Le nouveau préfet de l’Ariège, Hervé Brabant, est allé à la rencontre des syndicats au cours de la soirée.

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