SERIE 5/7. En service depuis le début des années 90, l’Iliouchine Il-80 a été conçu comme poste de commandement volant pour le chef des armées russes en cas de guerre nucléaire. Pour répondre à cette mission, il est doté de nombreuses spécificités. Les détails.
On le surnomme l’avion du jugement dernier ou encore l’avion de l’apocalypse… Autant dire que lorsque l’Iliouchine Il-80 est dans les airs, cela n’augure rien de bon. L’appareil de 60 m de long et de 48 m d’envergure a en effet vocation à être un poste de commandement pour les hauts responsables russes en cas de conflit nucléaire. En pareille situation, Vladimir Poutine monterait à bord et disposerait de tous les moyens de communication nécessaires pour coordonner ses forces armées depuis les airs. N’étant pas équipé d’armements, l’appareil serait escorté en vol par plusieurs avions de chasse russes qui assureraient sa protection.

Développé en pleine guerre froide, ce “Kremlin volant” est entré en service en 1990. Quatre exemplaires ont été construits, et trois seraient toujours opérationnels. Ils stationnent sur l’aéroport de Chkalovsky, à 30 km au nord-est de Moscou. L’Il-80 est une version militarisée de l’avion de ligne Il-86. Les informations relatives à ce bunker des airs sont forcément classifiées et aucune image de la cabine n’a jamais été publiée. Reste que, certaines caractéristiques du quadriréacteur sont visibles et connues des spécialistes.

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Perche de ravitaillement et antenne pour communiquer avec les sous-marins nucléaires
L’imposante bosse au-dessus du cockpit abrite par exemple des équipements de communication satellite et de liaisons radio. À l’arrière, on peut remarquer la présence d’une antenne pouvant être déployée en vol pour communiquer avec les sous-marins nucléaires. L’appareil est aussi doté de multiples antennes sur et sous le fuselage, ce sont en fait ses systèmes de communication satellite, hautes et basses fréquences. Équipé de quatre réacteurs (Kouznetsov NK-86), l’avion du jugement dernier affiche une distance franchissable modeste, de 5 000 km. Il peut néanmoins voler aussi longtemps que cela est nécessaire grâce à une perche de ravitaillement située à gauche sous le cockpit.

Autre particularité qui ne passe pas inaperçue, l’avion est totalement dépourvu de hublots. Cette absence est voulue. Elle permet de ne pas exposer ses occupants au flash thermique engendré par une explosion nucléaire. Et pour éviter d’être endommagés par les impulsions électromagnétiques, l’ensemble des circuits et des systèmes de l’avion sont dotés d’une protection renforcée.
Éviter la panne électrique et embarquer au pas de charge
Sous les ailes, on distingue aussi deux nacelles de dix mètres de long. Elles contiennent des générateurs électriques auxiliaires permettant de pallier toute panne d’équipements. Selon certaines indiscrétions, le système de conditionnement d’air de l’avion serait enfin équipé de filtres spécifiques afin de protéger l’équipage contre un environnement extérieur nocif.
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Avec toutes ces spécificités, vous l’aurez compris, l’Iliouchine Il-80 n’est pas un avion comme les autres. Il compte d’ailleurs seulement trois portes et un escalier repliable situé en position basse à l’avant gauche. Ce dernier permet un embarquement et un débarquement rapide, sans avoir recours aux traditionnelles passerelles aéroportuaires. Dernière particularité, avec une masse à vide de 115 tonnes, l’avion-bunker russe est équipé, en plus des trains principaux, d’un train d’atterrissage central qui offre une meilleure répartition des charges à l’atterrissage.

Hormis la Russie, seuls les États-Unis, avec leur Boeing E-4B, ont aujourd’hui un avion équivalent. Mais les Il-80 ne sont plus tout jeunes et se rapprochent de l’âge de la retraite. Le Kremlin préparerait donc la relève… Deux Ilyushin Il-96-400M seraient en effet en cours de conversion pour devenir les nouveaux postes de commandement aéroportés de la Force aérospatiale russe. Avec ces avions de l’apocalypse de dernière génération, Vladimir Poutine n’entend visiblement pas relâcher la pression sur l’Occident.

