November 1, 2025

"Pour moi, ce serait une catastrophe économique" : Abattages ciblés, vaccination élargie… Menacés par la dermatose bovine, les éleveurs pris entre deux feux

l’essentiel
Alors que 32 communes de l’Ariège sont placées en zone de surveillance pour la dermatose nodulaire bovine, une réunion d’information s’est tenue le jeudi 30 octobre à la chambre d’agriculture de Foix pour faire le point sur la situation. La question de l’abattage des troupeaux et celle des conséquences économiques de la vaccination ont suscité de nombreuses réactions.

“Cette maladie nous terrifie tous, nous qui sommes dans l’Ariège, pas loin des foyers des Pyrénées-Orientales”, lançait Philippe Lacube, le président de la chambre d’agriculture de l’Ariège, en ouverture d’une réunion organisée le 30 octobre à Foix, le lendemain de la confirmation d’un 9e foyer de dermatose nodulaire contagieuse (DNC) dans le département voisin. Car bien qu’aucun cas n’ait pour l’instant été confirmé en Ariège, 32 communes ont été placées en zone de surveillance à mesure que la maladie progressait dans les Pyrénées-Orientales.

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Face à une centaine d’éleveurs, une vétérinaire, une représentante du groupement de défense sanitaire (GDS) et un agent de la DDETSPP (Direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations, NDLR) ont rappelé les symptômes de la maladie, les précautions à prendre pour éviter sa propagation, les mesures à respecter en cas de suspicion et les contraintes imposées dans la zone réglementée. Mais au-delà de ces aspects, deux sujets ont suscité de nombreuses questions : l’abattage des troupeaux et l’extension de la vaccination à toute l’Ariège.

Une centaine d’éleveurs étaient présents à la réunion organisée dans les locaux de la chambre d’agriculture de l’Ariège.
Une centaine d’éleveurs étaient présents à la réunion organisée dans les locaux de la chambre d’agriculture de l’Ariège.
DDM – J-O.B.

Diviser les cheptels pour limiter l’abattage

La Coordination rurale et la Confédération paysanne de l’Ariège ont déjà exprimé avec force leur refus de l’abattage des troupeaux, allant jusqu’à manifester devant la préfecture de Foix le 23 octobre. “L’objectif est d’éradiquer la maladie et de protéger le territoire”, rappelait la représentante du GDS, après que la vétérinaire ait indiqué qu’il n’existe pas de traitement contre la DNC. Autre difficulté, le délai d’incubation de la maladie (jusqu’à 28 jours) et l’absence de test sanguin empêchent de la dépister avant qu’elle ne se déclare. Conclusion : seul le “dépeuplement rapide” des troupeaux infectés est à même d’empêcher la contamination de cheptels voisins.

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Pour autant, soulignait la DDETSPP, l’abattage ne concerne pas l’ensemble du cheptel infecté, mais seulement le lot de bêtes dans lequel un cas a été confirmé. “Vous avez la possibilité de diviser vos cheptels pour limiter la taille des lots”, précisait son représentant, soulignant que les mouches vecteurs de la DNC ne se déplacent pas très loin. Une décision qui n’appartient qu’aux éleveurs, l’éloignement des bêtes imposant de lourdes contraintes d’organisation.

3 500 bovins en cours de vaccination

Alors que 3 500 bovins sont en cours de vaccination dans la quarantaine d’exploitations placées en zone de surveillance, la question de la généralisation de la vaccination à toute l’Ariège a suscité bien des échanges. “Les répercussions en termes économiques ne sont pas neutres, ce n’est pas si simple que ça”, relevait Philippe Lacube.

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En effet, en raison de l’impossibilité de distinguer les anticorps issus de la vaccination de ceux d’origine naturelle, plusieurs pays, Espagne et Italie en tête, imposent un délai de 14 mois avant toute importation de bêtes vaccinées, “et 14 mois ce n’est pas rien”, commentait Philippe Lacube. Un délai qui, de surcroît, ne court qu’à partir d’un premier délai de 45 jours après que 95 % des cheptels ont 75 % de leurs bêtes vaccinées.

“Les animaux, qu’est-ce qu’on va en faire pendant deux ans ?”

“Ce ne sera pas 14 mois, plutôt deux ans, calculait un éleveur. Les animaux, qu’est-ce qu’on va en faire pendant deux ans ?” Un autre notait que pendant ce temps, les éleveurs des zones indemnes en tireraient un avantage majeur, en profitant de l’absence de concurrence des agriculteurs ariégeois pour écouler leurs bêtes. “Je ne sais pas s’il y en a qui ont la trésorerie pour, mais qui peut tenir deux ans sans vendre ?”, s’interrogeait-il. “Pour moi, ce serait une catastrophe économique”, assurait un autre agriculteur.

Vaccination étendue ou “dépeuplement rapide”, les éleveurs ariégeois sont donc pris entre deux feux aux lourdes conséquences économiques. Deux feux face auxquels ils ne peuvent que croiser les doigts, en espérant que les mesures en vigueur suffiront à tenir la DNC loin de leurs troupeaux.

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