La mairie de Cœur de Causse a mis en ligne un questionnaire de satisfaction. Hasard du calendrier : il y a un an, l’agence du Crédit Agricole fermait. Le but ici : savoir ce qui amène les gens à fréquenter le centre-bourg de Labastide-Murat et ce qui leur manque. On est allé le leur demander.
“Un sondage ? C’est bien de se réveiller à quatre mois des municipales”, ironise une jeune femme. En ce début de matinée, Cœur de Causse, dans le Lot, vaque à ses activités. Le rush de 8 h 30 est passé au magasin de presse. Un groupe papote devant le portillon de l’école, un autre attend son coach de gym devant la mairie. André, René et Jean-Paul se vannent sur un coin de trottoir.
“Ça chagrine, il faut aller à Gramat”
Ce sondage, c’est la mairie de Cœur de Causse qui l’a lancé le premier week-end d’octobre 2025. En dix-neuf questions, il vise à évaluer la fréquentation du centre-bourg par les habitants, les raisons qui les poussent à s’y rendre, leur satisfaction, les commerces et services qu’ils aimeraient y trouver. Une enquête menée dans le cadre du dispositif Villages d’avenir. Le but : “Recenser ce que veulent les gens, ce qui leur manque et, dans la mesure du possible, pouvoir y répondre”, dit la mairie. Dès le lundi, une centaine de questionnaires avaient déjà été remplis.
André et Jean-Paul, respectivement 78 et 75 ans, n’en ont pourtant pas entendu parler. À l’inverse de René, 69 ans, qui l’a déjà rempli. Lui se satisfait de ce qu’offre Labastide-Murat, village central de cette commune nouvelle. Il déplore juste la fermeture de la banque : “Ça chagrine, il faut aller à Gramat… Il faudrait surtout conserver le guichet”. En septembre 2024, 300 personnes étaient venues manifester contre la fermeture de l’agence du Crédit Agricole. En vain.
“On aurait besoin d’un autre docteur”
La mairie ne le cache pas : “La grosse déception, c’est la disparition du Crédit Agricole qui a impacté le territoire”. Elle est intervenue alors que Cœur de Causse était déjà engagée dans Villages d’avenir avec les services de l’État. La mairie reconnaît que la commune traversait alors une passe difficile : fermeture de la trésorerie, de commerces. Depuis, il y a eu du neuf : la reprise du bar, le restaurant qui va rouvrir, l’UEEA à l’école pour les enfants autistes et l’augmentation des effectifs cette année (vingt enfants en plus)… “On essaye de se maintenir et de rester attractif”, résume le maire René Courdès.
“Il ne faut pas se plaindre à Labastide-Murat”, lance le volubile André, avant de noter tout de même : “On aurait besoin d’un autre docteur. On en a deux c’est pas mal”. Même Jean-Paul, l’ancien Parisien, trouve son bonheur ici : maison de santé, Poste, commerces variés jusqu’à un magasin de bricolage. “Pour aller acheter un paquet de vis, s’il fallait faire 23 km…”, lance-t-il. Bref, un village plutôt vivant en somme. “Mais il n’y a rien autour : les gens viennent ici”, tempère René.
“Ce qui manque ? C’est des activités pour les enfants”
Comme lui, Régine, 70 ans, a déjà rempli le questionnaire, “une bonne idée”. Avec d’autres habituées du cours de gym, elles s’inquiètent des horaires de La Poste, se réjouissent de l’agrandissement du Super U. “Et les pompes funèbres marchent très, très bien”, commente une dame, taquine, avant d’ajouter : “On meurt beaucoup mais on tient le coup longtemps ici”. Les doyennes de la gym dépassent d’ailleurs les 90 ans. Seul regret pour Régine : “Il n’y a aucun commerce d’habillement. Le plus près, c’est Gramat. Moi, je vais sur Gourdon“.
“Ce qui manque ? C’est des activités pour les enfants”, commente une mère d’élève devant l’école Simone Veil. “Nous, a plein d’idées”, s’amusent ces mamans âgées de 35 à 42 ans. Soucieuses de rester anonymes, elles citent piscine, activités culturelles, maison des associations, transports, nounous. Deux d’entre elles ont déjà rempli le questionnaire, une a commencé avant de tiquer : “Il est sur le centre-bourg mais on n’y met pas le Super U”. Mais à les entendre, on se dit que Labastide-Murat, elles l’aiment : “C’est central, reprend la première, on peut travailler à Cahors, Saint-Céré, Figeac. Et dans le village, je pose ma voiture ici et je fais tout à pied”.
L’enquête est ouverte pendant quelques semaines avant qu’une synthèse en soit tirée. “On aura des réponses farfelues, des critiques”, anticipe le maire. Qu’importe : “Il faut être à l’écoute, dans tous les cas”.