Des manifestants brandissent un drapeau du manga « One Piece » lors de la manifestation du 25 septembre 2025 à Antananarivo, capitale de Madagascar. IAKO RANDRIANARIVELO/ZUMA/SIPA
A Madagascar, la capitale Antananarivo tourne au ralenti ce vendredi 26 septembre, la plupart des commerces et les écoles étant fermés, au lendemain d’une journée de manifestation réprimée par les forces de l’ordre et marquée par de nombreux pillages. Si les contestataires dénoncent les coupures d’eau et d’électricité, ils ciblent aussi la corruption de leur classe politique.
A lire aussi
Enquête
A Madagascar, les petites mains bien réelles de l’intelligence artificielle alimentent la machine
En déplacement cette semaine à New York pour l’Assemblée générale de l’ONU, où Emmanuel Macron a reconnu l’Etat de Palestine, le président malgache Andry Rajoelina a condamné les « actes de destruction et la volonté de ravager le pays » dans un communiqué diffusé sur Facebook. « Les conflits mènent à la destruction et personne n’en tire de bénéfices, sauf ceux agissant dans leur propre intérêt », a averti le chef d’État dans ce message diffusé à la mi-journée, appelant « tous les Malgaches à rester calmes ».
• Pourquoi les Malgaches manifestent-ils ?
Les habitants de Madagascar protestent contre les coupures d’eau et d’électricité. « Ce mouvement a été mené pour ramener l’eau et l’électricité à Madagascar. Ici, on a à peu près 12 heures de délestage par jour. Ça veut dire que pendant 12 heures de la journée, on sort de la maison, on va travailler, on paye les impôts et on retourne à la maison. Toujours pas d’électricité », ajoute l’étudiante, une pancarte à la main avec l’inscription « leo be » (« y en a marre »).
Les revendications des manifestants se sont élargies à la contestation du pouvoir, jugé opaque et corrompu. Sur les banderoles brandies ce jeudi 25 septembre, on pouvait lire : « Laissez-nous faire entendre nos droits » ou encore « Nous ne voulons pas de troubles, nous voulons juste nos droits ». Une manifestante d’une soixantaine d’années expliquait à l’AFP que la situation de l’approvisionnement en eau et en électricité était « devenue insupportable », critiquant « l’arbitraire », la « corruption » et « le manque de transparence de nos dirigeants ». Le président Andry Rajoelina avait été réélu fin 2023 lors d’un scrutin boycotté par l’opposition et auquel moins de la moitié des électeurs inscrits a pris part.
• Que s’est-il passé à Antananarivo ?
Les manifestations ont été marquées par de nombreux pillages. Les domiciles de trois parlementaires proches du pouvoir ont été embrasés et des manifestants ont caillassé les pompiers tentant d’éteindre les flammes touchant la maison de la sénatrice Lalatiana Rakontondrazafy, nommée en début d’année par le président.
Outre des commerces et des agences bancaires, une station du téléphérique (un des projets phare du gouvernement récemment inauguré) a également été incendiée. Malgré le déploiement des forces de sécurité et le recours répété à des tirs de grenades lacrymogènes et de balles en caoutchouc, la situation a dégénéré jeudi après-midi et dans la soirée. La capitale a été placée dans la soirée sous couvre-feu nocturne par les autorités.
• Qu’en est-il de la situation aujourd’hui ?
Ce vendredi matin, des habitants sonnés, pour certains en larmes, constatent les dégâts sur des supermarchés, banques et autres magasins d’électroménager pillés et saccagés la veille.
Les forces de l’ordre sont visibles uniquement sur la grande place du 13-Mai, au centre de la capitale, contrairement à jeudi où, déployées en nombre, elles avaient quadrillé la ville une bonne partie de la journée pour empêcher des manifestants de se rassembler.
Vendredi, les axes routiers du centre-ville ont été rendus à la circulation, toutefois moins dense qu’en temps normal. Si la situation est calme dans le centre-ville, des pillages sont signalés dans une zone commerciale de la banlieue d’Antananarivo.
• Pourquoi le drapeau « One Piece » est-il visible ?
Le drapeau pirate tiré de la série japonaise « One Piece » est devenu le signe de ralliement de mouvements de contestation anti-régime, comme cela a pu être le cas en Indonésie ou au Népal. Le drapeau noir a même été aperçu en France le 18 septembre dernier, lors des manifestations pour la justice sociale, fiscale et environnementale. La jeunesse voit la référence au célèbre manga comme un symbole universel de liberté, de courage et de solidarité.