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Le Nouvel Obs avec AFP
Un immeuble résidentiel est endommagé par une frappe russe sur un quartier résidentiel de Kiev, en Ukraine, le 10 octobre 2025. EVGENIY MALOLETKA/AP/SIPA / EVGENIY MALOLETKA/AP/SIPA
L’Ukraine a subi l’une des plus importantes attaques russes contre son réseau énergétique, plongeant ce vendredi 10 octobre dans le noir des centaines de milliers de foyers et causant la mort d’un enfant de sept ans.
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La Russie multiplie depuis plusieurs semaines à l’approche de l’hiver les frappes sur les infrastructures énergétiques et ferroviaires de l’Ukraine, faisant craindre que, comme les années précédentes, des millions de personnes ne se retrouvent sans chauffage.
Selon l’opérateur du réseau électrique ukrainien, Ukrenergo, les bombardements de la nuit ont privé de courant « un nombre significatif d’usagers » dans la capitale Kiev et neuf autres régions de l’est, du sud, du nord et du centre.
La Météo réduit les capacités antiaériennes ukrainiennes de « 20 à 30 % »
Maksym Timtchenko, le PDG du principal acteur privé du secteur, DTEK, a fait état de « centrales thermiques gravement endommagées ». Dans la soirée, DTEK a indiqué avoir rétabli l’électricité chez au moins 678 000 consommateurs (foyers et entreprises) et poursuivre son travail à « régime soutenu » pour rétablir le courant.
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Ces chiffres illustrent l’ampleur de la coupure — l’une des plus graves depuis le début de la guerre — dans une ville qui comptait environ 3 millions d’habitants avant l’invasion russe de 2022.
Une source au sein du secteur ukrainien de l’énergie a expliqué qu’en raison du temps nuageux, de nombreux drones russes avaient « réussi à contourner la défense antiaérienne ». Lors d’une conférence de presse vendredi soir, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a estimé que cette météo avait réduit les capacités antiaériennes ukrainiennes de « 20 à 30 % ».
Il a appelé son homologue américain Donald Trump à « faire pression » sur Vladimir Poutine pour qu’il arrête les attaques aériennes contre l’Ukraine. « J’espère qu’il utilisera tous les instruments, les Tomahawks (des missiles longue portée américains dont Kiev espère la livraison, NDLR), les sanctions, la diplomatie, les mesures financières et les droits de douane : tout pour arrêter Poutine », a-t-il insisté.
Selon les autorités, les frappes ont fait au moins un mort – un garçon de sept ans dans la région de Zaporijjia (sud) – et 33 blessés.
« Nuit terrible »
« Depuis plusieurs semaines, les Russes font tout pour plonger le pays dans l’obscurité », avait dénoncé plus tôt vendredi Volodymyr Zelensky, qualifiant l’attaque de « cynique et calculée ».
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Il avait une nouvelle fois plaidé pour une « action décisive » des Occidentaux qu’il exhorte à livrer des systèmes de défense antiaérienne supplémentaires. L’armée russe a de son côté affirmé avoir visé des sites énergétiques alimentant « le complexe militaro-industriel » ukrainien.
« Ce fut une nuit terrible » avec « des explosions tout le temps », a témoigné auprès de l’AFP Valentyna, une habitante de la capitale. Dans la soirée, la Première ministre Ioulia Svyrydenko a annoncé que l’eau courante, également coupée pendant des heures chez certains consommateurs, avait été rétablie dans tous les quartiers de Kiev.
D’après l’armée de l’air ukrainienne, la Russie a envoyé 465 drones et tiré 32 missiles sur l’Ukraine, dont respectivement 405 et 15 ont été abattus, toujours selon cette source.
Des journalistes de l’AFP à Kiev ont entendu dans la nuit plusieurs explosions ainsi que le vrombissement de drones d’attaque. Selon le correspondant de guerre russe Alexandre Kots, deux centrales électriques ont été touchées à Kiev et au moins six autres à travers l’Ukraine.
« Semer le chaos »
Volodymyr Zelensky avait déjà dénoncé cette semaine la multiplication des attaques contre des cibles énergétiques. Il a estimé que l’objectif de la Russie était de « semer le chaos » au sein de la population.
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Autre signe de la pression russe, les autorités ukrainiennes ont annoncé jeudi de nouvelles évacuations de civils à Kramatorsk et Sloviansk, dans l’Est, où se déroule l’essentiel des combats.
Le secteur gazier ukrainien est aussi mis à rude épreuve par les frappes russes, ce qui pourrait pousser l’Ukraine à recourir à de coûteuses importations. L’hiver dernier, les bombardements russes avaient déjà réduit de moitié la production ukrainienne de gaz.
Et selon un décompte de l’ONU rendu public vendredi, le mois de septembre a été particulièrement meurtrier pour les civils ukrainiens, confirmant « la tendance inquiétante à la violence intense » contre la population.
L’Ukraine vise elle aussi régulièrement la Russie, ciblant en particulier les raffineries, ce qui y a provoqué une hausse des prix du carburant depuis l’été. Volodymyr Zelensky a estimé cette semaine que les pénuries de carburant en Russie se chiffraient « à hauteur de 20 % des besoins ».
L’Ukraine a aussi récemment bombardé une centrale électrique dans la région russe frontalière de Belgorod, y causant des coupures de courant.