Père absent, Gérard D. n’a laissé à Cédric Jubillar qu’une brève rencontre adolescente et quelques silences lourds. Alors que le procès de son fils approche, cet homme reste une ombre.
Il y a des pères qui marquent une vie d’enfant par leur présence, d’autres par leur absence. Dans l’histoire de Cédric Jubillar, c’est cette deuxième trace qui domine. Son père biologique, Gérard D., 58 ans aujourd’hui, est longtemps resté une silhouette lointaine, un nom inscrit sur l’état civil, mais sans ancrage affectif.
Né à Béziers, militaire puis maçon avant de travailler dans un centre pour personnes handicapées, Gérard D. avait à peine 19 ans lorsqu’il rencontre Nadine, la mère de Cédric. Ils se fréquentent 8 mois puis la jeune femme, alors âgée de 16 ans, tombe enceinte.
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L’histoire d’amour tourne court. Trop jeune, trop différent, trop pris par le service militaire, Gérard s’efface rapidement. Il disparaît, refait sa vie. Nadine élève seule l’enfant avant de le placer. Cédric Jubillar est très vite ballotté, dès l’âge de 2 ans et demi, entre familles d’accueil et foyers des services sociaux. Sa mère referme la parenthèse Gérard, et quelques années plus tard, elle décide de renouer avec son fils. Entre temps, c’est un autre homme, Olivier Fabre, le nouveau compagnon de Nadine, qui prend la place de père, devenant le “papa” que Cédric choisira de reconnaître comme tel.
Une rencontre, une paire de baskets et un t-shirt en cadeau
Ce n’est qu’en 2001, à l’adolescence, que la rencontre entre Gérard et Cédric a lieu. Une seule journée. Quelques heures partagées, une paire de baskets et un t-shirt en cadeau. Cédric, 14 ans à l’époque, rencontre aussi les deux garçons – ses deux demi-frères – que Gérard a eus avec sa nouvelle femme.
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Et puis plus rien. Les routes de Gérard et de son fils se séparent aussitôt, comme si le lien biologique n’avait jamais suffi à combler les années de silence. Seul un coup de téléphone anonyme l’informe qu’il est grand-père en 2014. Lorsque l’affaire Jubillar éclate, ce père lointain surgit dans la lumière. Il est auditionné dans le cadre de la procédure.
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Il appelle encore Cédric “le petit”. Dans un entretien exclusif donné à La Dépêche du Midi en septembre 2021, il confie sa tristesse de le voir enfermé : “Ça fait mal de savoir qu’il est incarcéré, c’est malheureux pour lui”.
Mais derrière ces mots se glisse un paradoxe : Gérard n’a pas pris contact quand la disparition de Delphine a envahi les écrans, suscitant l’amertume de Nadine, qui lui reproche de chercher davantage une reconnaissance médiatique qu’une véritable proximité.
Un père absent, convoqué par l’actualité
Ce fan de football et de l’OM s’en défend, mais les faits demeurent : son fils ne l’a pas appelé la nuit de la disparition, et leur dernier échange remonte à février 2021, par téléphone, bien après l’arrestation.
Aujourd’hui, Gérard va suivre le procès qui s’ouvre le 22 septembre, comme des millions d’anonymes. Mais pour lui, l’histoire résonne autrement : celle d’un fils qu’il n’a jamais vraiment eu, d’un lien de sang qui ne s’est jamais transformé en lien de vie. Il n’est pas amené à témoigner à la barre, contrairement à Nadine Jubillar et Olivier Fabre.
Figure périphérique, il reste un témoin indirect, un père en creux. Assez proche pour être auditionné par les gendarmes, assez éloigné pour ne pas peser dans le quotidien de l’affaire. Dans cette tragédie, Gérard D. apparaît ainsi comme une ombre : celle d’un père absent, convoqué par l’actualité, mais qui n’a jamais trouvé sa place dans l’histoire intime de Cédric.