Guilhem Colombiès a conçu une technologie ingénieuse au sein de sa start-up Ex Creatio. Appliquée aux gouvernails des bateaux ou aux ailes d’avion, elle permet d’importantes économies de carburant.
Le goût du risque, peut-être ; la passion pour la recherche, assurément ; mais surtout, la conviction de tenir LA bonne idée. Il a fallu tout ça à Guilhem Colombiès pour lâcher un poste d’ingénieur chez Airbus et se lancer à son compte. D’ici quelques jours, le fondateur de la start-up Ex Creatio va rejoindre les locaux de la nouvelle pépinière d’entreprises du centre de Cahors. Une étape de plus, dans un parcours loin d’être linéaire pour ce quadragénaire, opticien pendant dix ans.
Parisien de naissance, mais dont les attaches lotoises (à Calamane) remontent à des générations, Guilhem Colombiès n’a pas hésité longtemps à tenter l’aventure. En 2020, alors que la crise du Covid met à l’arrêt toute la filière aéronautique et que les chercheurs sont redéployés sur des tâches de production, il profite d’un plan de départs volontaires et embarque sa bonne idée : s’inspirer des poissons pour augmenter la puissance des bateaux.
Passionné de biomimétisme
“Dans beaucoup de domaines, la solution est sous nos yeux dans la nature, résume ce passionné de biomimétisme. Il faut juste réussir à observer et comprendre. Dans l’aéronautique, on est très loin de ce que les oiseaux arrivent à faire.”
Et les poissons alors ? La clé est dans l’effet “fin-ray”. Cet agencement du cartilage, de l’arrête et de la peau, confère une incroyable flexibilité à la nageoire caudale. Il lui permet d’épouser au mieux la force du courant pour se propulser et remonter les rivières. Appliquée à la technologie, cette cambrure devient très intéressante pour le gouvernail d’un bateau ou l’aileron d’un avion. “La littérature scientifique le pensait, mais il n’y avait rien dans le domaine industriel.”
Lauréat de concours prestigieux
Guilhem Colombiès a donc déposé un brevet exploitant cette idée. Il a pu tester son idée à l’École navale de Brest. “Jusque-là, c’était de la théorie. Là, dans l’eau, voir que ça marchait, ça a été très important, resitue-t-il pudiquement. Mon prototype de gouvernail a obtenu 53 % de portance en plus. ” Une efficacité accrue et une puissance décuplée qui, sur un cargo porte-conteneurs par exemple, permettrait de réaliser 5 à 10 % d’économie de carburant.
Sa technologie innovante coche toutes les cases : deeptech, liée à la décarbonation et aux économies d’énergie, et applicable à différents domaines (le nautique, l’aéronautique, les éoliennes). D’ailleurs, en 2024, Ex Creatio a remporté des concours prestigieux, tel que le French Tech Tremplin et le Tremplin de l’Économie Bleue Nausicaà. Il a pu intégrer l’incubateur d’entreprises de l’École des Mines d’Albi, bénéficier du soutien de la Banque publique d’investissement, obtenir des financements et élargir son réseau. “Ça a été une reconnaissance aussi, sourit-il. La preuve du fonctionnement est faite.”
Traverser la vallée de la mort
“Maintenant, il me faut passer du prototype de labo au prototype de produit, qui me permettra de démarcher des industriels.” Pourquoi pas dans le domaine du nautisme de loisir, où les activités utilisant des foils se multiplient.
Cette étape est particulièrement coûteuse, avec des essais répétés et des échecs fréquents. L’année à venir sera déterminante. “Dans le jargon, on appelle ce moment la traversée de la vallée de la mort”, glisse Guilhem Colombiès, désormais en quête d’un associé. Il s’y présente armé de son meilleur atout : la conviction de tenir LA bonne idée.
En quête d’un associé
Les perspectives s’élargissent pour Ex Creatio, les besoins aussi. Certes, son installation à la pépinière d’entreprises Cadurcia Centre va lui apporter un accompagnement, mais Guilhem Colombiès ressent l’urgence de trouver un associé. Idéalement, dans le milieu maritime, puisqu’il vise en priorité ce domaine d’application. “Le scientifique, l’innovation, le design, ce sont mes points forts. Mais il y a aussi toute la partie prospection, commerciale. Actuellement, je fais tout.”