September 7, 2025

"Nous avons 40 ans de retard sur la rétention des eaux de pluie" : face à la sécheresse, les cours d’eau sont toujours en souffrance dans le Lot

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Dès le début de l’été, les niveaux et débits des cours ont été rapidement fragilisés, impactant lourdement l’agriculture. En ce mois de septembre, l’heure est toujours aux restrictions. Face à la sécheresse, l’État et la profession s’intéressent aux retenues d’eau.

“Le maïs n’a pas grandi, les épis sont petits, les pieds desséchés. Le tournesol et les plantes fourragères comme la luzerne n’ont pas résisté non plus et le travail pour tout rattraper va être considérable.” Ludovic Lagard est producteur de céréales et de semences à Montcuq, il évalue les pertes de 35 à 40 %. Selon lui, ces coups de chaud climatiques récurrents obligeront à abandonner certaines céréales trop gourmandes en eau, comme le maïs.

D’ailleurs, malgré les pluies tombées ces derniers jours, la préfecture du Lot maintient plusieurs arrêtés de restrictions d’irrigation et d’usage sur les cours d’eau et appelle tous les usagers à la sobriété. Certains secteurs du Lot restent en effet en alerte renforcée.
“En théorie, l’été se présentait plutôt bien, avec un hiver et un printemps relativement pluvieux, et une recharge en eau de + 9 % par rapport à la normale. La situation des cours d’eau s’est rapidement dégradée, aggravée par les deux canicules de fin juin et de mi-août”, retrace Claire Raulin, la préfète du Lot qui parle en ce mois de septembre d’une situation qui reste tendue, avec des remontées des cours d’eau et des débits différents selon les secteurs. Ainsi, les zones les plus touchées sont la Séoune, le Lendou, la Lère amont, le Céou, l’Alzou, la Tourmente, le Bléou et la quasi-totalité des affluents de la Dordogne rive gauche, qui sont en crise.

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À l’heure du premier bilan estival, les résultats sont sans appel. Cet été, 65 % de la superficie du Lot ont été concernés par des restrictions d’eau et notamment des interdictions de prélèvements dans les milieux pour les cultures. “Ce qui fait du Lot : le 3e département de l’ex-région Midi-Pyrénées le plus impacté, après le Tarn-et-Garonne et le Gers”, relève la représentante de l’État.

Une année “assez emblématique des étés qui nous attendent”

Une fois n’est pas coutume, c’est par le nord du Lot que s’est fait ressentir le manque d’eau, avec les premières restrictions prises sur le bassin de la Dordogne, dès le 21 juin. Pour rappel, en 2024, les interdictions n’avaient commencé qu’à la fin du mois de juillet.

“Cet été correspond à ceux de 2022 et de 2023. Et ce qui est sûr c’est qu’il est assez emblématique des étés qui nous attendent ces prochaines années. À 40°, on observe une évapo-transpiration des sols de 1 cm par jour, soit 10 mm d’eau. En une semaine, c’est 70 mm d’eau perdus”, préviennent les services de l’État.

D’ici 2100, c’est une réduction de la ressource en eau de l’ordre de 40 % qui est évaluée par les experts dans le Lot et une augmentation de + 4° en moyenne.

En ce mois de septembre, comme ce fut le cas dès les premières inquiétudes sur le niveau d’étiage des cours d’eau lotois, un comité de suivi se réunit chaque mercredi pour évaluer la situation secteur par secteur et adapter les autorisations au plus près des réalités de terrain, en fonction des relevés automatisés et des “tours de plaine”, effectués par des agents. “Face aux difficultés, il y a eu des cultures dérogatoires qui ont eu des autorisations d’irrigation de nuit, comme les maïs semences. Mais de nombreux agriculteurs ont eu recours à des retenues d’eau, déconnectées des cours d’eau”, souligne le directeur départemental des territoires du Lot.

Les professionnels tentent de s’adapter, mais cela a un coût et il y a urgence, comme le reconnaît Ludovic Lagard, également vice-président des Jeunes agriculteurs. “La solution réside dans la gestion de l’eau. J’ai pu arroser grâce à mon bassin de stockage, même si avec plus de 50° au soleil, tous les plants brûlent. Nous avons 40 ans de retard sur la rétention des eaux de pluie. Le gaspillage est énorme. Des retenues permettraient d’irriguer puis de restituer l’eau dans les rivières. Mais nous nous heurtons à des blocages administratifs et à des coûts de réalisation trop élevés”.

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Pour rappel, avec le Tarn-et-Garonne, le Lot a fait partie des départements expérimentaux pour curer des plans d’eau existants et retrouver du volume de stockage supplémentaire, avec un soutien financier de l’État. Cette opération a permis de mobiliser 100 000 m³ de plus en 3 ans, pour une trentaine de bassins. Désormais, une réflexion est engagée pour évaluer les besoins et voir s’il faut des retenues supplémentaires.

 

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D’ici là, à l’automne, un comité départemental d’expertise statuera sur l’impact du manque d’eau, secteur par secteur, pour évaluer les taux de pertes agricoles sur les céréales, la vigne, les noyers, etc., et déclencher un régime de calamités agricoles. La préfète rappelle que dans le Lot, l’an passé un dispositif de dégrèvement de la taxe foncière non bâtie pour l’agriculture a représenté 2,50 M€, auxquels se sont ajoutés 2,50 M€ d’aides conjoncturelles d’urgence ; et qu’au titre de la PAC 83 M€ ont été versés pour près de 3 000 dossiers déposés par les exploitants lotois.

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