Les décombres de la tour Soussi, détruite le 6 septembre par Israël. OMAR AL-QATTAA / AFP
Bientôt deux ans après le début de la guerre, l’armée israélienne intensifie ces dernières semaines ses opérations militaires dans la ville de Gaza. Disant contrôler 40 % de cette ville du nord de la bande de Gaza, elle affirme vouloir s’en emparer pour venir à bout du Hamas et libérer les otages capturés le 7-Octobre. Samedi 6 septembre, Tsahal a détruit une nouvelle tour d’habitation dans la ville et appelé ses habitants à évacuer vers le sud du territoire palestinien, en prévision d’un assaut au sol qui suscite de vives craintes pour la population civile. Des avions israéliens avaient largué des milliers de tracts au-dessus de quartiers ouest de Gaza-ville, demandant aux habitants de partir, et annonçant une frappe sur un immeuble. L’armée a ensuite détruit la tour Soussi, au lendemain du bombardement d’un bâtiment similaire. Elle avait prévenu vendredi qu’elle ciblerait les « infrastructures terroristes » dans la ville, en particulier les tours d’habitation. Elle accuse le Hamas, qui parle de « mensonges », d’utiliser ces bâtiments.
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La Défense civile de Gaza a fait état de la mort de 56 personnes samedi dans le territoire palestinien, dont quatre dans le quartier de cheikh Radwane, dans la ville de Gaza, et 19 près d’un centre de distribution d’aide dans le nord. Dans un communiqué, l’armée israélienne a appelé en matinée les habitants de Gaza-ville à évacuer « sans tarder » vers la « zone humanitaire » d’al-Mawasi, dans le sud de la bande de Gaza, et « rejoindre les milliers de personnes qui s’y sont déjà rendues ». Selon l’ONU, la quasi-totalité des plus de deux millions de Palestiniens dans la bande de Gaza ont été chassés de leurs foyers au moins une fois par la guerre qui fait rage depuis plus de 700 jours. L’ONU, qui estime à environ un million de personnes la population de la ville de Gaza et ses environs, a mis en garde contre un « désastre » et Amnesty International des conséquences « irréversibles » pour les Palestiniens. Dans la bande de Gaza, désormais en proie à la famine sur 20 % du territoire selon l’ONU, l’armée israélienne a souvent bombardé des zones déclarées « humanitaires », affirmant y viser des combattants du Hamas.
En Israël, des familles des otages craignent par ailleurs qu’une opération majeure sur Gaza-ville ne mettent en danger la vie de leurs proches. Comme tous les samedis soirs, des milliers d’Israéliens brandissant des photos des otages ont manifesté à Tel-Aviv et Jérusalem. « La guerre doit s’arrêter pour libérer les otages et sauver nos soldats », pouvait-on lire sur une pancarte. Selon l’armée israélienne, 47 captifs restent retenus à Gaza dont 27 présumés morts, sur un total de 251 personnes enlevées le 7-Octobre. Le président américain Donald Trump, allié d’Israël, a fait état vendredi d’une « négociation approfondie » avec le Hamas sur les otages. Le nouveau chef du commandement militaire américain pour le Moyen-Orient, Brad Cooper, a effectué samedi une visite en Israël.
L’attaque du 7 octobre 2023 a entraîné la mort de 1 219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles. Les représailles israéliennes ont fait au moins 64 368 morts à Gaza, en majorité des femmes et des enfants, selon le ministère de la Santé de Gaza, placé sous l’autorité du Hamas, dont les chiffres sont jugés fiables par l’ONU.
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Israël menace la France de représailles
Une reconnaissance d’un Etat palestinien par des pays occidentaux pourrait pousser Israël à prendre des « mesures unilatérales », a averti ce dimanche 7 septembre son chef de la diplomatie Gideon Sa’ar, après des informations sur des projets d’annexion de parties de la Cisjordanie occupée. Le président français Emmanuel Macron a annoncé en juillet que la France allait reconnaître un Etat de Palestine à l’Assemblée générale de l’ONU fin septembre. Dans la foulée, plusieurs pays parmi lesquels le Canada, l’Australie et la Belgique, ont annoncé leur intention de faire de même.
La Grande-Bretagne a dit en août qu’elle leur emboîterait le pas si une trêve n’est pas conclue à Gaza, où Israël mène une guerre contre le Hamas en riposte à l’attaque lancée par ce mouvement islamiste palestinien le 7 octobre 2023 sur le sol israélien. « Des Etats comme la France et le Royaume-Uni qui ont poussé à la soi-disant reconnaissance (d’un Etat palestinien) ont commis une énorme erreur », a dit Gideon Sa’ar lors d’une conférence de presse avec son homologue danois Lars Løkke Rasmussen en visite à Jérusalem. « On ne peut pas dissocier la question de l’Etat de celle de la paix, car cela rendrait la paix encore plus difficile à atteindre », a-t-il ajouté. « Cela poussera Israël à prendre également des mesures unilatérales », a-t-il averti, sans préciser lesquelles.
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Une reconnaissance d’un Etat palestinien serait largement symbolique en raison du refus d’Israël de la création d’un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens. Ces derniers ambitionnent de l’établir sur les territoires de Cisjordanie et de la bande de Gaza, séparés par le territoire israélien. Le 4 septembre, le chef de la diplomatie américaine Marco Rubio a critiqué l’intention de certains pays occidentaux de reconnaître un Etat palestinien, affirmant les avoir prévenus de possibles représailles de la part d’Israël sous la forme d’une annexion de territoires en Cisjordanie. Il a refusé de se joindre à la condamnation mondiale du plan de colonisation en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.
Israël a approuvé en août un projet majeur de construction de 3 400 logements dans un secteur de la Cisjordanie, qui menacerait selon la communauté internationale la viabilité d’un futur Etat palestinien. Les ministre israélien d’extrême droite Bezalel Smotrich avait auparavant déclaré, à l’adresse des dirigeants européens : « Si vous reconnaissez un Etat palestinien en septembre, notre réponse sera l’application de la souveraineté israélienne sur toutes les parties de Judée-Samarie », le nom qu’Israël emploie pour désigner la Cisjordanie.