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Le Nouvel Obs avec AFP
Le campus de l’université de Harvard, à Cambridge (Massachusetts). KENNETH MARTIN/ZUMA/SIPA
Une juge a ordonné ce mercredi 3 septembre l’annulation du gel des financements par l’administration Trump à Harvard, une victoire pour l’institution devenue le symbole de la croisade du président contre une partie des universités américaines.
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Depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier, Donald Trump accuse la doyenne des universités américaines de servir de vivier à l’idéologie « woke », un terme souvent détourné par les conservateurs pour qualifier de manière péjorative des idées progressistes en faveur des femmes et des minorités.
Grand soutien d’Israël, le président accuse également Harvard de ne pas avoir protégé suffisamment ses étudiants juifs ou israéliens lors de manifestations sur le campus pour un cessez-le-feu à Gaza.
En représailles, le gouvernement a retiré à Harvard un peu plus de 2,6 milliards de dollars en subventions, et a révoqué sa certification SEVIS, par laquelle les étudiants étrangers sont autorisés à étudier aux Etats-Unis.
« Violation du premier amendement »
Saisie par l’université, une juge de Boston « annule et écarte » les décisions de gel prises par l’administration, constitutives d’une « violation du premier amendement » de la Constitution, selon le texte de son ordonnance.
Elle note que « l’antisémitisme, comme d’autres formes de discrimination ou de préjugé, est intolérable. Et il est clair, de l’aveu même de Harvard, que l’université a été en proie à l’antisémitisme ces dernières années et aurait pu (et dû) mieux traiter ce problème ».
Mais en « réalité, il existe peu de liens entre les domaines de recherches affectés par les gels de subventions et l’antisémitisme ».
Elle accuse l’administration d’avoir « utilisé l’antisémitisme comme écran de fumée pour mener une attaque ciblée et idéologiquement motivée contre les universités les plus prestigieuses du pays ».
Le président de Harvard, Alan Garber, a souligné que cette décision validait les « arguments en faveur de la liberté académique de l’université ».
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« Cette juge militante nommée par Obama allait forcément statuer en faveur de Harvard », a réagi Liz Huston, attachée de presse de la Maison-Blanche.
Elle a ajouté que la Maison-Blanche allait « immédiatement faire appel de cette décision scandaleuse ».
Selon Ray Brescia, professeur à l’Albany Law School, Donald Trump « pourrait revenir à la table des négociations » afin de conclure un accord financier à l’amiable avec l’université.
« Des gens règlent souvent leurs désaccords à l’amiable pour diverses raisons, même s’ils pensent avoir complètement raison », a-t-il expliqué à l’AFP.
Un test pour les autres universités ciblées par Trump
La bataille judiciaire entre l’université, l’une des plus prestigieuses au monde établie près de Boston, dans le Massachusetts (nord-est), sert aussi de test pour d’autres institutions d’enseignement supérieur dans la ligne de mire du gouvernement Trump.
Au moment où s’ouvrait une première audience à Boston, Donald Trump avait accusé la juge d’être une opposante notoire et Harvard « d’être antisémite, antichrétienne et anti-Amérique ».
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L’université affirme de son côté avoir pris des mesures pour s’assurer que les étudiants et le personnel juifs ou israéliens ne se sentent ni exclus, ni intimidés sur le campus, tout en soutenant que des mesures du gouvernement fédéral « menaçaient » la liberté d’expression.
En sus du gel des subventions, le secrétaire d’Etat Marco Rubio a annoncé fin juillet l’ouverture d’une enquête pour savoir si Harvard se conformait à « toutes les réglementations » en matière d’échanges avec des universités étrangères.
« Le peuple américain est en droit d’attendre de ses universités qu’elles veillent à la sécurité nationale, qu’elles respectent la loi et qu’elles offrent un environnement sûr à tous les étudiants », a affirmé le chef de la diplomatie dans un communiqué.