August 19, 2025

"Dans un village âgé, ça manquait" : les habitants retrouvent leur pharmacie grâce à un dispositif inédit

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Après des mois de fermeture, la pharmacie de Puycasquier rouvre ses portes sous la forme d’un modèle expérimental inédit, redonnant accès aux soins aux habitants de ce village gersois.

Ce lundi 18 août, la petite commune de Puycasquier, dans le Gers, retrouve un service de santé de première nécessité. Après plusieurs mois de fermeture et de recherche de solutions, la pharmacie du village rouvre ses portes sous la forme d’une antenne rattachée à une pharmacie “mère” voisine. Une expérimentation nationale, la seconde sur le territoire et qui permet ainsi de redonner vie à ce commerce de proximité indispensable.

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“Puycasquier est heureux de retrouver sa pharmacie”, confie Paulette. “J’avais une ordonnance à renouveler depuis deux semaines mais je me suis dit que j’attendrai la réouverture pour le faire ici”, révèle-t-elle.

Cette cliente régulière de l’officine devait, depuis plusieurs mois, se rendre à Mauvezin pour se faire délivrer ses médicaments tandis que l’officine de Puycasquier affichait portes closes. “Dans un village âgé, ça manquait.”

Un trajet de dix kilomètres qui semblent anodins pour certains, mais qui peuvent devenir une réelle contrainte pour les personnes âgées comme Paulette.

L’établissement fonctionne sous la forme d’une "pharmacie annexe".
L’établissement fonctionne sous la forme d’une “pharmacie annexe”.
DDM – A.B.

Pour elle et d’autres habitants fragiles, cette réouverture est une bouffée d’oxygène. Devant l’établissement, certains automobilistes ralentissent pour saluer l’initiative d’Éric Milleret, pharmacien à l’origine de cette renaissance.

Une mobilisation locale pour un projet inédit

Fondateur de l’officine il y a trois décennies, Éric Milleret est resté profondément attaché à ce lieu. Ancien élu et habitant du village, il s’est mobilisé aux côtés du maire de Puycasquier, Louis Turchi, pour convaincre les autorités sanitaires d’autoriser cette réouverture sous un modèle inédit. Le dispositif repose sur des “antennes de pharmacie”, c’est-à-dire des points de vente annexes rattachés à une pharmacie principale voisine.

“Aujourd’hui, c’est une réussite. Les clients, patients, habitants, citoyens du village sont venus nous montrer qu’ils étaient toujours là et qu’ils comptaient sur nous.” Strictement encadrée, cette pharmacie annexe fonctionne comme une dépendance gérée par la pharmacie-mère, où les médicaments sont délivrés par un professionnel.

Franck Debant devient le gestionnaire de l’antenne.
Franck Debant devient le gestionnaire de l’antenne.
DDM – A.B.

“Le travail en soi reste le même que lors de l’ancienne pharmacie. Il y a juste les horaires qui vont changer”, précise Éric Milleret. La pharmacie-mère prend en charge l’approvisionnement en médicaments, le salaire du pharmacien sur place et les frais de gestion.

Le dispositif, encore en phase expérimentale (seul un autre projet similaire a vu le jour en Corse, NDLR) a été rendu possible grâce à la loi de financement de la Sécurité Sociale de 2018 qui introduit, en son article 51, un dispositif permettant d’expérimenter de nouvelles organisations en santé.

Un service de proximité vital

Aujourd’hui, la pharmacie fonctionne en horaires réduits (matinées uniquement) mais elle rend à nouveau un service de proximité essentiel, notamment pour les habitants les plus isolés. Pour Éric Milleret, il ne s’agit pas simplement d’un commerce mais bien d’un service de santé indispensable au maintien de la vie locale et à la lutte contre les déserts médicaux.

“Il est important pour la population d’avoir un service de santé optimal. Si la pharmacie ferme, il est certain qu’il n’y aura plus jamais de médecin. C’est important de garder ce commerce dit de santé”, insiste-t-il. “Aujourd’hui, c’est plus un service qu’un commerce.”

Derrière le comptoir, Franck Debant, qui a tenu cette pharmacie pendant une vingtaine d’années, a accepté d’en reprendre la gestion. “C’est la continuité avec des horaires allégés. Je connais bien la clientèle du village, j’habite moi aussi ici, donc c’est vrai que fermer la pharmacie, c’était compliqué. Comme je n’ai pas trouvé de repreneur, la solution de M. Milleret de créer une antenne n’a pas été simple. Il y est arrivé, on y est arrivé, tant mieux pour le village”, explique-t-il.

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Un événement qui donne également l’occasion à Éric Milleret de rebondir sur l’actualité. Une prise de parole qui intervient dans le sillage du mouvement social des pharmaciens, après la décision gouvernementale de réduire le plafond des remises sur les médicaments génériques. Une réforme qui avait suscité des réactions contrastées, entre soutien et incompréhension.

“Il ne faut pas oublier qu’un service ne peut se réaliser que s’il y a les moyens de rémunérer derrière les gens qui le rendent. Toute attaque aujourd’hui contre nos revenus, c’est une attaque directe sur le service de santé français”, conclut Éric Milleret, qui considère la profession comme “le dernier bastion de la santé dans toute la ruralité.”

L’antenne sera ouverte tous les matins du lundi au vendredi de 8 h 30 à 12 h 30.

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