August 17, 2025

Rouée de coups par une ado ultra-violente, une femme de ménage handicapée supplie la mairie de Toulouse de la changer de poste

l’essentiel
Traînée au sol, frappée au visage jusqu’au sang par une mineure, Hafida Taberkant peine à se relever. Insomnies, terreur persistante, traitement psychiatrique : elle réclame un changement de poste pour se sentir en sécurité.

Chaque matin, elle nettoie ce que les autres laissent derrière eux. Mais le 13 mars, c’est elle qu’on a piétinée. 6 h 20. Le jour ne s’est pas encore levé sur la Ville rose. Hafida marche, seule, comme chaque matin.

L’employée municipale reste totalement traumatisée par l’agression qu’elle a subie.
L’employée municipale reste totalement traumatisée par l’agression qu’elle a subie.
DDM – MARC SALVET

Elle descend à la station Capitole, traverse les ruelles encore endormies du centre-ville jusqu’à la rue Périgord Devant la bibliothèque où elle travaille, elle aperçoit une silhouette. “J’ai d’abord vu qu’il y avait une personne qui me suivait. Cela ne m’a pas semblé anormal”, murmure-t-elle, les yeux baissés.

Et soudain, tout bascule. “J’ai senti qu’une personne, par-derrière, me tirait par les cheveux en me disant : ‘Donne-moi ton sac !'”, lâche-t-elle, d’un ton sec, comme pour couper court à la scène. “Elle m’a aussi donné un coup à la tempe droite, tout en tenant mes cheveux. J’ai vu son poing arriver sur mon visage.”

C’est grâce à l’intervention d’un riverain que l’agresseuse a été arrêtée. Il a tenu en respect l’ado avant l’arrivée de la police.
C’est grâce à l’intervention d’un riverain que l’agresseuse a été arrêtée. Il a tenu en respect l’ado avant l’arrivée de la police.
DDM – DDM

Le coup la déséquilibre. “Je m’écrase sur le sol totalement sonnée”, confie-t-elle, la voix encore vibrante. Au sol, Hafida est traînée, battue, humiliée. Son sac est arraché, puis abandonné à côté d’elle, comme un prétexte inutile. “Elle m’a donné des coups de pied sur la jambe droite, cela faisait très mal”, ajoute-t-elle, sans hausser le ton.

Elle hurle. “Au secours ! La police !” Un couple de riverains descend en pyjama. L’homme s’interpose avec son parapluie. Deux de ses collègues, alertés par les cris, accourent. L’agresseuse s’enfuit. Mais un riverain la poursuit dans la rue, la rattrape et la ramène. La BAC arrive peu après.

“Elle m’a regardé, elle rigolait”

“Je suis traumatisée”, souffle Hafida, d’une voix rauque. “Depuis, les douleurs sont revenues, et je vis avec une peur constante.” La terreur ne l’a pas quittée.

Ce n’est pas la première fois qu’Hafida subit un choc sur le chemin du travail. En mars 2021, elle avait déjà chuté sur du verglas. “J’ai cassé plusieurs dents et me suis fracturée l’épaule”, rappelle-t-elle d’un ton grave. Huit mois d’arrêt. Depuis, elle est reconnue comme travailleuse handicapée. “Je ne peux plus utiliser la machine ni passer l’aspirateur. Je m’occupe uniquement de petites tâches : sanitaires, bureaux de chauffeurs, bureaux des chefs, mais je ne fais pas les vitres”, détaille-t-elle, sans chercher à se plaindre.

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Et pourtant, malgré l’agression, elle reprend son activité au bout de deux semaines et demie. “Je suis toujours tourmentée. Je regarde derrière moi, je me méfie de tout le monde”, confie-t-elle avec retenue. “J’ai peur que mes collègues ou ma cheffe ne puissent plus m’accompagner au métro.” Suivie par un psychiatre, elle décrit un quotidien sous tension. “Il m’a conseillé un arrêt définitif et m’a parlé d’inaptitude.” Elle prend un traitement pour dormir.

Le 15 mai 2025, elle assiste au procès. Une adolescente de 16 ans et demi dans le box, également impliquée dans l’agression d’une infirmière. Elle écope d’une lourde peine de prison. Mais ce n’est pas la sanction que retient Hafida. “Elle m’a regardé durant l’audience, elle rigolait”, lâche-t-elle, presque incrédule.

Déjà fragilisée par un grave accident

Employée de la mairie depuis 2010, titularisée en 2014, elle n’attend ni faveur, ni indulgence. Juste une protection minimale. “J’ai demandé à être affectée à un poste plus proche du métro, comme au Capitole”, insiste-t-elle. La seule alternative proposée l’a choquée. “On m’a proposé la médiathèque Marengo (José-Cabanis), mais j’ai refusé, car un collègue y a été agressé récemment. Je ne me sens plus en confiance.” Et en plus, elle culpabilise : “Je me suis dit que j’aurais dû parler plus tôt pour peut-être éviter cela. J’aimerais que mon histoire soit entendue, pour que la mairie prenne ses responsabilités.”

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“Je ne sais pas”, souffle-t-elle, quand on lui demande si elle peut continuer à exercer son métier. “J’essaie, mais je suis marquée. Ce que je vis est lourd, mentalement et physiquement.” Droite, digne, sans baisser les yeux, Hafida répète une ultime fois :
“Je ne demande pas la lune. Je veux juste pouvoir poursuivre mon activité dans un endroit sûr, adapté à mon état, et retrouver un peu de paix.”

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