SÉRIE 7/8. Nadine Jubillar, la mère de Cédric, s’est retrouvée plongée malgré elle dans une spirale judiciaire et médiatique après la disparition de sa belle-fille Delphine. Une femme en proie aux doutes, ballottée entre un amour inconditionnel pour son fils et sa quête de vérité au nom de ses petits-enfants.
Elle occupe une place singulière dans l’affaire Jubillar. Nadine, la mère de Cédric Jubillar, a vu son quotidien basculer lorsque sa belle-fille Delphine a disparu dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines. Ce drame a mis au jour bien plus qu’un soupçon d’homicide : un tissu familial fracturé, des non-dits durables et la difficile position d’une mère face à un fils accusé de meurtre.
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Elle-même a eu une trajectoire personnelle semée d’embûches. Née en 1971 à Carcassonne, Nadine était âgée d’à peine 16 ans lorsqu’elle a mis Cédric au monde. À sa majorité, elle est mise à la porte du domicile maternel et son fils est confié aux services sociaux.
La jeune mère le récupère quelques années plus tard, après avoir rencontré son futur mari, Olivier, avec qui elle aura deux autres enfants malgré une relation en dents de scie. La petite famille s’installe dans le Tarn, à côté d’Albi. Nadine enchaîne les petits boulots. La situation financière du couple est précaire et ils ont du mal à gérer l’hyperactivité de leur fils cadet. Cédric, lui, est à nouveau placé, de ses 14 ans jusqu’à sa majorité.
Des liens renoués entre une mère et son fils
C’est sans lui que la famille part s’installer à Limoges à partir de 2012. Quand Nadine revient dans le Tarn sept ans plus tard, son fils aîné vit avec son épouse Delphine à Cagnac-les-Mines. Le pavillon du couple n’est toujours pas achevé mais ils sont désormais parents de deux enfants, Louis et Elyah.
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Ce retour a permis de raviver les liens entre la mère de famille et son fils. Cédric vient régulièrement la voir avec ses enfants, pendant que Delphine se repose à la maison. Nadine en revanche ne leur rend pas souvent visite. “Je ne suis pas une belle-mère intrusive”, explique-t-elle devant les enquêteurs, reconnaissant des rapports “courtois” mais distants avec sa belle-fille.
Leur vie sentimentale, elle ne la connaît que par les mots – et parfois les colères – de son fils. Elle voit en lui un père aimant, un homme perdu. Lorsque les relations se tendent entre Cédric et son épouse et que le divorce semble inévitable, Nadine lui prodigue ses conseils. C’est elle aussi qui le “couvre” lorsqu’il tente de géolocaliser le téléphone de Delphine.
Du soutien inconditionnel aux doutes
Le 16 décembre 2020 à l’aube, Cédric tente de joindre sa mère. Elle le rappelle un peu après 8 h du matin. “Il me dit juste ‘monte’, je sens qu’il faut que j’y aille”, expliquera-t-elle plus tard. Delphine a disparu. Nadine accourt, trouve une maison en désordre, son fils “tournant en rond”, les enfants dans leurs chambres.
Pendant plus d’un mois après la disparition de Delphine, Nadine et son mari les hébergent dans leur petit appartement de Carmaux. La cohabitation avec Cédric est difficile mais la mère de famille soutient fermement son fils aîné. Elle gère ses papiers, s’occupe de ses enfants et essaye de l’aider à trouver du travail. Elle le défend aussi sur les réseaux sociaux, où elle scrute tout ce que qui se dit sur l’affaire.
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Le 16 juin 2021 marque un tournant. Nadine et Olivier sont interpellés à leur domicile, en même temps que Cédric, et placés en garde à vue. C’est un choc. Soupçonnés de complicité, ils seront finalement mis hors de cause mais Nadine découvre alors la réalité de la relation entre son fils et Delphine. Elle est prise par le doute. Est-il lié à la disparition de sa belle-fille ? “Je me refuse de le croire. Si c’était le cas, je prendrai un coup de bambou phénoménal derrière la tête”, répond-elle aux enquêteurs.
Déboussolée, Nadine va jusqu’à contacter une voyante sur une station de radio locale et s’épanche à l’antenne en disant être “malheureusement persuadée” de la culpabilité de son fils, avant de se rétracter quelques jours plus tard face à la tempête médiatique qu’elle a déclenchée.
C’est dans le bureau des juges d’instruction, où elle est entendue début 2022 en tant que partie civile, que Nadine livrera le fond de sa pensée concernant Cédric. Ses mots sont durs. “Je m’aperçois qu’en fait, mon fils je ne le connais pas. Pour moi, c’était un homme idéal, un mari idéal, un père idéal, et qu’il était travailleur, bosseur, franc. Finalement je découvre tout le contraire”.
C’est désormais pour ses petits-enfants que Nadine dit vouloir se battre. Si Louis et Elyah sont placés chez leur tante (la sœur de Delphine), elle aussi a obtenu un droit d’hébergement. Mais elle vit mal son statut de “mère de” et estime que son rôle de grand-mère n’est pas reconnu à sa juste valeur. “Ce que je veux aujourd’hui, dit-elle aux juges d’instruction, c’est vous aider à trouver la vérité pour pouvoir continuer à regarder droit dans les yeux de mes petits-enfants”.