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Le Nouvel Obs avec AFP
Vladimir Poutine et Donald Trump, lors de la conférence de presse où ils n’ont pas répondu aux questions des journalistes, le 15 août en Alaska. GAVRIIL GRIGOROV/ZUMA/SIPA
Article actualisé à 9h45 avec les premiers contacts entre Trump et les dirigeants européens et ukrainiens à l’issue du sommet.
Donald Trump et Vladimir Poutine ont passé, en tout et pour tout, six heures en Alaska vendredi, la première visite du président russe dans un pays occidental depuis le début de la guerre en Ukraine. Après une poignée de main, une longue entrevue et une conférence de presse commune, les deux hommes se sont séparés vendredi sans rien dévoiler d’un possible plan de paix pour l’Ukraine, tout en multipliant les déclarations engageantes et les gestes amicaux. Voici ce qu’on peut en retenir pour le moment.
« Des progrès » mais pas d’accord
Le président américain a parlé d’une réunion « très productive », Vladimir Poutine d’un entretien « constructif », mais en réalité rien n’a filtré immédiatement de leurs trois heures de discussion sur une base militaire de l’Alaska.
Le président américain, qui aime tant à se présenter en négociateur décisif, a assuré pendant des déclarations conjointes à la presse qu’il restait « très peu » de points à régler pour trouver une issue à la guerre déclenchée il y a plus de trois ans par l’invasion russe de l’Ukraine. « L’un d’entre eux (ces points) est probablement le plus important », a ajouté Donald Trump, mais sans dire lequel.
« Nous n’y sommes pas, mais nous avons fait des progrès. Il n’y a pas d’accord jusqu’à ce qu’il y ait un accord », a averti le président des Etats-Unis, avant de redécoller pour Washington.
Le milliardaire de 79 ans s’était fixé pour ambition d’organiser très vite un sommet tripartite avec le chef d’Etat russe et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, et de décrocher un cessez-le-feu. Il n’a rien évoqué de tout cela aux côtés de Vladimir Poutine, face aux journalistes.
Au contraire, avec son homologue russe, le président américain n’a plus eu le ton quelque peu bravache d’avant la rencontre, lorsqu’il menaçait de claquer la porte en cas d’impasse, ou assurait qu’avec lui Vladimir Poutine ne « ferait pas le malin ». Donald Trump, qui avait menacé la Russie de « conséquences très graves » si elle n’acceptait pas de mettre un terme à la guerre, a précisé ne plus envisager de mesures dans l’immédiat.
« Vu comme cela s’est passé aujourd’hui, je ne pense pas que je doive penser à cela maintenant », a-t-il déclaré, en réponse à une question de Fox News, dans un entretien réalisé après la conférence. Vladimir Poutine, sur la même tonalité engageante et cordiale, a dit espérer que « l’entente » trouvée en Alaska apportera « la paix » en Ukraine.
Les deux hommes, qui s’exprimaient devant un fond bleu portant l’inscription « Pursuing Peace » (« Oeuvrer pour la paix »), avaient promis une conférence de presse. Mais ils se sont seulement serré la main après avoir fini leurs discours et sont partis sans répondre aux journalistes qui, debout, les assaillaient de questions.
Une mise en scène qui remet Poutine sur le devant de la scène
Avec ce sommet au ton chaleureux, Poutine signe un spectaculaire retour sur la scène internationale, alors que le conflit le plus meurtrier en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale continue.
Donald Trump a brièvement applaudi pendant que son homologue russe s’avançait vers lui sur le tarmac. Ont suivi des poignées de mains et des sourires dans une mise en scène exposant toute la puissance militaire américaine, avec des avions de combat de pointe rangés auprès du tapis rouge et survolant les deux hommes.
Vladimir Poutine est ensuite monté dans la voiture blindée de Donald Trump où ils ont eu un court tête-à-tête, avant leur réunion en compagnie de quelques conseillers.
A l’issue de la conférence de presse, le président américain a estimé qu’il pourrait revoir « très bientôt » le président russe. Ce à quoi Vladimir Poutine a réagi en lançant, en anglais, « la prochaine fois à Moscou », sur un ton léger. « J’imagine que cela pourrait arriver », a rétorqué le président américain, amusé.
Ukrainiens et Européens informés par Trump
L’Ukraine et les Européens redoutaient par-dessus tout que ce sommet ne permette à Vladimir Poutine de manipuler son homologue américain, qui avait évoqué en amont la possibilité de concessions territoriales.
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Donald Trump a eu un « long appel » avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky lors de son vol retour d’Alaska pour l’informer des « principaux points » de sa conversation avec Vladimir Poutine. Dans un entretien sur la chaîne Fox News, le président américain a estimé qu’un accord pour mettre fin à la guerre « dépendait vraiment du président » ukrainien. Trump et Zelensky doivent se rencontrer lundi à Washington a annoncé Kiev.
Premier concerné mais grand absent de ce rendez-vous, Volodymyr Zelensky avait déclaré « compter » sur Donald Trump pour mettre un terme au conflit. Les soldats russes « continuent à tuer le jour des négociations », avait-il déploré en amont du sommet, tandis que l’armée ukrainienne annonçait vendredi avoir repris six villages dont des unités russes s’étaient emparées ces derniers jours, lors d’une avancée particulièrement rapide.
La Russie réclame que l’Ukraine lui cède quatre régions partiellement occupées (Donetsk, Lougansk, Zaporijjia et Kherson), en plus de la Crimée annexée en 2014, et qu’elle renonce aux livraisons d’armes occidentales et à toute adhésion à l’Otan.
C’est inacceptable pour Kiev, qui veut un cessez-le-feu inconditionnel et immédiat, ainsi que des garanties de sécurité futures.
La présidente de la Commission Ursula von der Leyen, le président français Emmanuel Macron, le chancelier allemand Friedrich Merz, le Premier ministre britannique Keir Starmer et le secrétaire général de l’Otan Mark Rutte, se sont dans un second temps joint à la conversion téléphonique entre Trump et Zelensky, avant de poursuivre la discussion entre eux samedi matin.