August 15, 2025

DECRYPTAGE. Canicule : restauration, BTP, agriculture… quel est le réel coût économique des fortes chaleurs ?

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La canicule qui s’installe depuis plusieurs jours en France bouleverse le quotidien des habitants. Entre baisse d’activité, coûts supplémentaires et pertes de production, l’impact économique se fait sentir dans tous les secteurs.

Depuis la semaine dernière, et pour plusieurs jours encore, la France subit sa deuxième vague de chaleur de l’été. La quasi-totalité des départements a été placée en vigilance orange canicule. Ces températures extrêmes ne sont pas sans répercussions sur l’activité économique. D’après une récente étude d’Alliance Trade, une seule journée de chaleur extrême, au-delà de 32 °C, équivaut en perte d’activité à une demi-journée de grève.

Cette étude précise qu’entre le 1er mai et le 14 juillet, les journées de forte chaleur ont déjà amputé la croissance de 0,3 point de PIB, soit près de 9 milliards d’euros. Ce montant correspond quasiment à la prévision de croissance annoncée par la Banque de France pour le troisième trimestre 2025. Avec l’épisode en cours, le cumul des pertes pourrait atteindre 0,4 % du PIB annuel.

“La chaleur aggrave la situation”

En Occitanie, le secteur de la restauration est particulièrement touché. “On enregistre une baisse incontestable de 20 % depuis le début de l’été. C’est énorme, surtout dans un contexte où le pouvoir d’achat est déjà en berne, déplore Jacques Mestres, président de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie (UMIH) de l’Hérault. À midi, il fait tellement chaud que les gens n’ont pas envie d’aller au restaurant. Beaucoup d’établissements sont au bord du dépôt de bilan, et la chaleur aggrave encore la situation, ajoute-t-il. Le rendez-vous est donné aux pouvoirs publics à l’automne pour dresser un bilan qui s’annonce déjà mauvais”.

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Baisse de production agricole

Même son de cloche du côté des agriculteurs, contraints de s’adapter dans l’urgence. “Toutes les prairies ont grillé dès juillet, constate Marie-Amélie Viargues, présidente de la FDSEA de l’Aveyron. Il n’y a plus rien à pâturer dehors. Les éleveurs qui disposent de ventilation l’utilisent. Cela entraîne des coûts supplémentaires d’électricité, sans compter les charges d’eau pour les animaux.”

Conséquences de cette chaleur : les vaches passant en “mode résistance” et la production de lait diminue. “Les éleveurs tentent d’adapter l’alimentation avec des sels minéraux pour éviter les fragilités, mais ces ajustements génèrent de nouvelles dépenses”, ajoute l’agricultrice.

La filière céréalière n’est pas épargnée. “En ce moment, la chaleur et la sécheresse réduisent la valeur alimentaire du maïs et font chuter les rendements, poursuit Marie-Amélie Viargues. On gère au jour le jour, et on fera les comptes à la fin de l’été pour voir s’il faut demander des indemnisations.”

Les chantiers s’adaptent

Dans le BTP, la canicule impose aussi des ajustements, alors que le secteur est en difficulté depuis plusieurs mois. “On a la chance que l’activité soit déjà ralentie par les congés d’été, note David Morales, administrateur de la CAPEB 31 et plaquiste en Haute-Garonne. Mais pour ceux qui travaillent, la chaleur modifie fortement l’organisation, surtout sur les chantiers extérieurs en zone urbaine, comme à Toulouse. Pour limiter les risques, on réduit les heures aux moments les plus chauds et on rattrape plus tard. Lors de la canicule de fin juin, l’impact avait été bien plus fort”. L’entrepreneur prévient : “Si les canicules se multiplient, il faut réfléchir et trouver des solutions pour travailler de manière performante”.

Ces dernières années, Santé publique France a tenté de chiffrer le coût économique des vagues de chaleur sur les dépenses sanitaires engendrées. Entre 2015 et 2020, ces impacts représentaient déjà entre 22 et 37 milliards d’euros. Un gouffre qui pourrait bien continuer de se creuser si le nombre de canicules augmente.

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