August 1, 2025

"Des effets catastrophiques" : les stations thermales ariégeoises fragilisées après l’annonce d’un possible déremboursement des cures

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L’annonce de la ministre de la Santé sur un possible déremboursement des cures thermales inquiète les stations ariégeoises, qui redoutent des conséquences économiques majeures.

En consultant Le Monde ce samedi 26 juillet, la gorgée de café a eu un peu de mal à passer chez certains Ariégeois. Dans un entretien accordé au quotidien, la ministre de la Santé et du Travail, Catherine Vautrin, a détaillé en effet “les pistes du gouvernement pour économiser 5,5 milliards d’euros sur les dépenses de santé”. Et parmi elles, la fin du remboursement total des “cures thermales et des médicaments dont le service médical rendu est faible pour les patients en ALD”.

Une annonce qui fait trembler le secteur du thermalisme ariégeois, porté par ses trois stations : Ax-les-Thermes, Aulus-les-Bains et Ornolac-Ussat-les-Bains. “Le déremboursement des cures conventionnées pourrait avoir des effets catastrophiques”, réplique d’emblée Vincent Querol, à la tête depuis un an des thermes (privés) d’Ussat-les-Bains, petite station qui accueille 1 500 curistes chaque année. “C’est une vraie médecine […] moderne qui se veut curative et également préventive. Tout se base sur des faits scientifiques, nous faisons de la vraie recherche. […] La cure en elle-même coûte moins qu’une hospitalisation ou une prise de médicaments à long terme”, assure le directeur, en réponse aux doutes soulevés sur l’efficacité des traitements.

En 2019, la Cour des comptes interrogeait déjà l’efficacité de ces traitements, et “le service médical rendu” qui resterait “à confirmer”. “Les propriétés thérapeutiques des eaux sont souvent considérées comme acquises, dès lors qu’elles présentent un certain nombre de caractéristiques en termes de composition et/ou de température”, indiquait la juridiction financière, qui a préconisé dans son rapport d’avril 2025 un déremboursement progressif des soins thermaux pris en charge par l’Assurance maladie, par mesure d’économie. “J’invite la Cour des comptes et tout le monde à venir constater le résultat des cures sur les patients”, ajoute Vincent Querol.

“Des répercussions immédiates”

Au-delà de l’enjeu médical, le secteur du thermalisme est un pilier du tourisme ariégeois. “Les thermes sont un levier important du tourisme. Si on coupe les vivres de moitié, forcément, il y aura une moindre affluence avec une moindre activité, avec des répercussions immédiates”, prévient Michel Pichan, président de l’Agence de développement touristique et vice-président de la communauté de communes Couserans-Pyrénées (CCCP), qui gère la station thermale d’Aulus-les-Bains. “En cure à Aulus, nous avons près de 700 curistes par an. Mais la fréquentation augmente car nous avons obtenu le label rhumatologie. […] L’objectif serait d’atteindre 1 200 et, à terme, 1 400 personnes avec la réactivation de l’immobilier pour les loger”, espère l’élu, qui l’annonce : “On fera du lobbying pour que la loi ne passe pas.”

À Ussat-les-Bains, l’annonce de la ministre pourrait aussi bousculer les plans de développement de la petite commune de 248 âmes. “Je me lance dans les prochaines années sur plusieurs projets importants avec de gros investissements, de plusieurs millions d’euros. […] Avec ces travaux de rénovation, on va doubler, voire plus, le nombre de curistes à l’année. Aujourd’hui, j’ai une soixantaine de salariés et demain je pourrai atteindre 80, voire au-delà”, se projette Vincent Querol, inquiet suite aux annonces. “C’est loin d’être anodin. Le secteur d’activité va s’en retrouver freiné et tout le monde va être pénalisé, jusqu’à la moindre station essence.”

Des nouvelles offres pour “s’adapter à l’évolution du marché”

À Ax-les-Thermes, la plus célèbre station ariégeoise, on se prépare déjà à une baisse des prises en charge des cures. “Cela fait plusieurs années que la question des remboursements des cures est soulevée. C’est clair que c’est un message regrettable pour la filière. Pour autant, et quand bien même cet impact serait minimisé par une négociation qui éviterait un déremboursement complet, on sent bien que c’est la tendance”, analyse Anne Chevalier, qui voit passer 4 000 curistes chaque année dans son établissement.

Directrice générale de la société Thermale d’Ax-les-Thermes depuis un an, elle se fait peu d’illusions sur l’avenir du secteur. “Il faut qu’on s’adapte. C’est ce qu’on commence à faire en se diversifiant et en proposant une approche un peu différente, pour faire découvrir les soins thermaux à une autre cible de clientèle, sur des cures loisirs, non conventionnées et non médicalisées.” Depuis cette année, en complément des Bains du Couloubret, un spa thermal ouvert au public, l’établissement propose ainsi de nouvelles cures “loisir”, sur des temps plus courts que celles conventionnées, et qui ne rentrent pas dans le cadre d’une prescription médicale. “C’est un produit que nous lançons pour s’adapter à l’évolution du marché.”

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