August 1, 2025

DECRYPTAGE. Contrefaçons : parfums à l'urine animale, faux médicaments… comment l'inquiétant phénomène explose en France

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Produits de luxe copiés, baskets “dupes” vendues sur TikTok, cosmétiques trafiqués… les faux inondent les marchés et les réseaux sociaux. Cet été, les marques alertent les consommateurs sur les risques sanitaires et criminels de ces pratiques. Un fléau mondial.

Un sac de luxe à 30 euros sur une plage, un parfum à 5 euros sur Instagram. Derrière ces affaires trop belles pour être vraies se cache un fléau pour la santé publique et une manne pour le crime organisé. “Les pratiques des contrefacteurs ont changé”, constate Régis Messali, directeur général adjoint de l’Union des fabricants (Unifab). “On a aujourd’hui des unités de production qui se rapprochent de l’Europe. Les pièces détachées sont envoyées dans plusieurs colis et assemblées sur place.” Cette stratégie rend les faux plus difficiles à repérer et complique la coopération internationale entre services douaniers.

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Les copies touchent désormais tous les secteurs : jouets, pièces automobiles, cosmétiques, mais aussi médicaments ou high-tech. “Ce marché criminel a compris que les consommateurs recherchaient des prix cassés et surfe sur la crise du pouvoir d’achat”, souligne le représentant des marques. Les faux circulent via des réseaux logistiques sophistiqués et s’appuient sur le commerce en ligne pour atteindre un public mondial.

Les “dupes”, nouveau visage du faux

La tendance des “dupes” illustre cette mutation. “Comme le mot contrefaçon est perçu comme illégal, on assiste à l’émergence de nouveaux termes : dupe, clone, pink tea, générique”, explique Régis Messali. Ce vocabulaire adoucit la perception du faux et séduit particulièrement les jeunes consommateurs.

Un sondage IFOP mené pour l’Unifab révèle que deux tiers des 15-34 ans ont déjà acheté une “dupe”. “Le syndrome de la bonne affaire reste un vecteur fabuleux pour vendre ces faux produits”, observe-t-il. Cette banalisation nourrit un marché qui pèse des milliards et échappe largement à la fiscalité des États.

Des risques méconnus

La promesse de payer moins cher cache des dangers considérables. “Pour 10 % du prix, on a généralement 10 % du produit”, rappelle Régis Messali. Faux parfums contenant de l’urine animale, chaussures assemblées avec des colles toxiques, médicaments sans principe actif : “On retrouve tout et n’importe quoi à l’intérieur de ces contrefaçons qui ne sont jamais testées, qui ne correspondent jamais aux normes”, alerte-t-il.

Ces faux ont aussi un coût écologique. “Les contrefacteurs n’ont aucune obligation de respecter l’environnement. Ils polluent massivement là où ils produisent et utilisent les matières les moins chères, souvent interdites en Europe”.

Un arsenal légal sous-utilisé

La France prévoit des sanctions fortes : “Un consommateur pris en possession d’un faux produit risque la saisie et une amende qui équivaut à deux fois la valeur du produit authentique”, explique Régis Messali. Mais ces peines sont rarement appliquées.

Pour y remédier, l’Unifab milite pour une amende forfaitaire délictuelle, applicable immédiatement par la police, la gendarmerie ou les douanes. “Si on veut être efficace, il faut que chaque autorité puisse dresser une amende sans passer par un long processus judiciaire”, insiste-t-il.

Une campagne de terrain

Cet été, l’Unifab déploie une vaste campagne de sensibilisation sur les plages et marchés du sud de la France, de Cannes à Biarritz. “C’est là que nous touchons le plus de vacanciers et de locaux”, indique Régis Messali. L’opération se décline aussi en ligne via TikTok, Instagram, Facebook et Google. Flyers, affiches et vidéos alertent sur les risques sanitaires et financiers.

“Une trop bonne affaire, c’est souvent louche”, résume Régis Messali. Se méfier des prix cassés, vérifier le lieu d’achat et consulter les avis en ligne restent les meilleurs réflexes. En France, 34 % des consommateurs ont déjà acheté une contrefaçon en pensant acquérir un produit authentique – et ce chiffre grimpe à 37 % chez les 15-18 ans. “La peine est double : on paie presque le prix de l’authentique et on se retrouve avec un faux”, conclut-il.

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