L’entrée de l’Institut d’Etudes politiques de Lille, photographiée le 2 mai 2024. FRANCOIS GREUEZ/SIPA
Elle devait intégrer Sciences Po Lille mais a désormais « vocation à quitter le territoire », pour une destination encore inconnue : une étudiante gazaouie, à qui sont attribués des messages violemment antisémites partagés sur les réseaux sociaux, est visée par une enquête sur fond d’indignation en France. Voici ce que l’on sait.
• Une enquête ouverte
Le parquet de Lille a annoncé ce jeudi 31 juillet avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l’humanité concernant les publications de l’étudiante gazaouie.
Des captures d’écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu’un compte – attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis – a notamment repartagé des messages appelant à tuer des juifs.
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« Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l’humanité avec utilisation d’un service de communication au public en ligne », a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l’AFP.
Une source diplomatique française a indiqué jeudi que cette jeune femme, qui avait bénéficié d’une bourse du gouvernement pour pouvoir étudier au sein de l’Institut d’études politiques de Lille, a « vocation à quitter le territoire national ».
• Désinscrite de Sciences Po Lille
Cette étudiante gazaouie a été désinscrite de l’Institut d’études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre. « Après concertation avec le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, le Rectorat de Région académique et la Préfecture, la direction de Sciences Po Lille a pris la décision d’annuler l’inscription prévue de cette étudiante dans notre établissement », écrit Sciences Po Lille sur son compte X.
Le contenu de certaines publications de cette étudiante sur les réseaux sociaux « entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille, qui lutte contre toute forme de racisme, antisémitisme et discrimination, ainsi que contre tout type d’appel à la haine, contre quelque population que ce soit », a souligné l’école.
Sollicité par l’AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir « accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem ». « Elle est venue en France via la diplomatie française », précise-t-on.
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La jeune fille a été hébergée provisoirement dans le logement du directeur de Sciences-Po Lille, où il ne vit plus, « dans l’attente du logement universitaire qui lui était réservé » explique également l’établissement.
La destination vers laquelle elle pourrait être renvoyée n’a pas été précisée, alors que tirs et bombardements israéliens se poursuivent sur la bande de Gaza, après 22 mois de guerre sans répit contre le Hamas, à la suite de l’attaque menée contre Israël le 7 octobre 2023. Le territoire est aujourd’hui menacé d’une « famine généralisée », selon l’ONU.
• Vives réactions du gouvernement
L’incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu’au gouvernement. « Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n’a rien à faire en France », a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir « demandé à ce qu’une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire ».
Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir « demandé de faire fermer ce compte haineux », et a martelé que « les propagandistes du Hamas n’ont rien à faire dans notre pays ».
« Pourquoi on est passé à travers ? Il y a quand même une question, il faut y répondre », a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l’Intérieur. « Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d’être renvoyée dans son pays, bien évidemment », a-t-il ajouté.
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« Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n’y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s’en est rendu compte », a-t-il ajouté, précisant que « les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères ».
Interrogé lors d’un déplacement à Montreuil (Seine-Saint-Denis) jeudi, le Premier ministre François Bayrou a assuré que « la vigilance sur le profil des personnes admises en France, elle est de tous les instants ». « Est ce qu’elle peut être améliorée ? Sûrement. Est ce qu’il peut y avoir sanction lorsqu’il y a des manquements ? A coup sûr », a-t-il estimé.