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Le Nouvel Obs avec AFP
Un portrait défiguré de l’ex président syrien Bachar al-Assad dans un centre de sécurité gouvernemental saccagé, à Damas, le 8 décembre 2024, le jour du renversement de son régime. RAMI AL SAYED/AFP
L’immunité personnelle dont bénéficient les chefs d’Etat en exercice ne peut souffrir d’aucune exception a jugé ce vendredi 25 juillet la Cour de Cassation, annulant ainsi le mandat d’arrêt pour complicité de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre émis par des juges d’instruction parisiens contre l’ex-président syrien Bachar al-Assad concernant des attaques chimiques en 2013 ayant fait plus de mille morts.
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Le mandat d’arrêt avait été délivré en novembre 2023 alors que Bachar al-Assad « était encore chef d’Etat en exercice » et n’était donc pas « régulier », a déclaré le président de la Cour de Cassation, Christophe Soulard, lors d’une audience publique diffusée de manière inédite en direct sur internet. La plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français « annule » donc le mandat d’arrêt.
« Cependant », depuis que Bachar al-Assad a été renversé en décembre 2024 et n’est plus président, « de nouveaux mandats d’arrêt ont pu ou pourront être délivrés à son encontre pour des faits susceptibles de constituer des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité », a développé Christophe Soulard. L’information judiciaire ouverte à son encontre peut donc se poursuivre, a-t-il ajouté.
Cette décision était très attendue en France comme à l’étranger, notamment par les organisations de défense des droits de l’homme engagées dans la lutte contre l’impunité des chefs d’Etat soupçonnés de crimes internationaux sur leur population.
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Le mandat d’arrêt émis par les juges d’instruction parisiens en novembre 2023 avait été contesté par le Parquet national antiterroriste, au nom de l’immunité absolue dont jouissent les chefs d’Etat en exercice devant les tribunaux de pays étrangers. Mais la cour d’appel avait validé ce mandat en juin 2024, estimant que ces crimes « ne peuvent être considérés comme faisant partie des fonctions officielles d’un chef de l’Etat ». Puis, après un appel du parquet général, c’était à la Cour de Cassation de se prononcer.
La plus haute juridiction française n’a pas suivi la position du procureur général Rémy Heitz qui avait proposé lors de l’audience le 4 juillet de maintenir le mandat d’arrêt contre Bachar al-Assad, en écartant l’immunité personnelle dont il bénéficiait car la France ne le considérait plus depuis 2012 comme le « chef d’Etat légitime en exercice » eu égard aux « crimes de masse commis par le pouvoir syrien ».
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En revanche, la Cour de Cassation a reconnu pour la première fois une exception à l’immunité fonctionnelle dont bénéficient les agents d’Etats étrangers s’ils sont poursuivis pour des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité. La mise en examen pour complicité d’un ancien gouverneur de la Banque centrale syrienne (2005-2016) et ex-ministre de l’Economie (2016-2017), Adib Mayaleh, est donc validée.