Si la fréquentation touristique de Lourdes progresse, notamment hors saison, les commerces de piété autour du Sanctuaire restent, eux, limités par des contrats saisonniers de huit mois. Une aberration selon leur syndicat, qui demande un alignement sur la convention hôtelière afin de prolonger l’activité.
Alors que le Sanctuaire a enregistré une fréquentation assez “exceptionnelle” cette année, nous sommes allés à la rencontre de Claudine Aubert, présidente du syndicat des professions souvenirs et piété ainsi que de l’intersyndicale des professionnels du tourisme à Lourdes. L’occasion de faire le bilan de la saison pour les commerçants du bas de la ville, mais aussi d’évoquer une problématique liée au changement du modèle touristique de la cité mariale. Entretien.

Quel bilan tirez-vous de cette année 2025 à Lourdes ?
Claudine Aubert : La fréquentation a été très bonne. On estime à environ quatre millions le nombre de visiteurs sur le Sanctuaire… L’année jubilaire a sûrement eu un effet d’entraînement : des pèlerins du monde entier ont profité de leur passage en Europe, à Rome notamment, pour venir à Lourdes. Il y a eu beaucoup de pèlerins philippins, indonésiens, américains ; des nationalités qu’on ne voyait plus depuis le Covid. Et puis, c’est un vase communicant : si la fréquentation est bonne, tout le monde en profite. Donc, je pense que nous sommes tous assez contents de la saison.
La fréquentation avait déjà été bonne en 2024… Peut-on dire que Lourdes a retrouvé ses chiffres d’avant Covid ?
Exactement. En revanche, on observe qu’il y a moins de grands groupes organisés et plus de petits groupes ou d’individuels. La fréquentation se fait en quelque sorte différemment par rapport aux années avant Covid.
On a aussi l’impression que Lourdes attire davantage hors saison, en hiver. Vous le constatez ?
C’est ce qui se passe actuellement, mais il faudra voir si c’est durable ou si c’est un effet du Jubilé. En tout cas, on le souhaite : on aimerait que la fréquentation globale augmente chaque année.
Pourtant, il y a toujours autant de commerces fermés à cette période de l’année…
Il y a une raison à cela : les contrats saisonniers que nous proposons à nos salariés sont fixés à huit mois maximum. Au-delà, c’est très compliqué puisqu’on doit embaucher en CDI, ce que de nombreuses boutiques ne peuvent pas se permettre… Donc beaucoup de magasins ferment dès la fin octobre, faute de pouvoir employer du personnel plus longtemps.
Pourquoi cette limite de huit mois ?
C’est une question de convention. D’ailleurs, l’hôtellerie a une convention nationale de neuf mois, et nous huit… Ce n’est pas logique ! On demande justement à s’aligner sur la convention hôtelière pour pouvoir travailler neuf mois sereinement, avec des CDD. Ce qui est également plus intéressant pour nos saisonniers.
Vous demandez donc un allongement de la saison légale d’un mois à Lourdes pour le commerce ?
Tout ce qu’on demande, c’est pouvoir travailler puisqu’il y a un allongement de la saison, comme constaté cette année… Que l’on puisse travailler et rester ouverts neuf mois, sans devoir embaucher en CDI.
Où en sont les discussions sur ce sujet ?
Nous sommes en campagne municipale, donc c’est le moment d’en parler. L’intersyndicale du tourisme rencontrera la future municipalité pour lui demander si c’est possible de nous aider sur le sujet… C’est une question de bon sens : si les hôtels restent ouverts neuf mois parce qu’il y a du monde et que les commerces ferment au bout de huit, l’attractivité de Lourdes en souffre. Vous l’avez vu vous-même : à cette période, peu de boutiques sont ouvertes. Pour un visiteur logé à l’hôtel, c’est frustrant. L’attractivité de la ville passe aussi par la vie commerciale.
Vous allez donc porter cette revendication auprès des élus locaux…
Oui. On a la mairie, on a un député, et s’il faut monter jusqu’au ministère du Travail, on le fera. Aujourd’hui, la réglementation n’est plus adaptée à la réalité du terrain.
Cette réglementation date de quand ?
Elle remonterait à un décret de 1999… Alors qu’on est bientôt en 2026 ! Le modèle a changé. On ne peut pas nous demander de faire un effort sur le prolongement de la saison, comme évoqué pendant le Covid, et en même temps nous pénaliser. Ce n’est pas possible. Il faut que la réglementation suive.

