December 20, 2025

Livres, santons et confidences : à Agen, la Sainte Famille une librairie pas comme les autres

l’essentiel
Petite librairie centenaire spécialisée dans le domaine religieux (livres, croix, chapelets, statues, icônes, bijoux, santons de Provence), la Sainte Famille enracinée rue des Héros-de-la-Résistance, a ses vitrines de Noël ornées de colombes de la paix. C’est une institution ouverte à tous.

Installée au 2 bis rue des Héros-de-la-Résistance à Agen, la librairie La Sainte Famille fait partie du paysage agenais depuis des décennies. Connue dans des temps reculés sous le nom de “La Croix de Lorraine”, elle a été tenue pendant 17 ans par Pierre-Yves et Hélène Camiade qui l’ont baptisée “Librairie Camiade”. Pierre-Yves Camiade n’est autre que le frère de Laurent Camiade, prêtre bien connu dans le diocèse et aujourd’hui évêque de Cahors. Mais au-delà des figures qui s’y sont succédé, la librairie s’est surtout imposée comme une adresse familière dans la mémoire collective des Agenais.

Une librairie de proximité

Depuis 2011, c’est Françoise Delaleau-Ducros qui en tient les rênes. Un choix mûrement réfléchi pour cette professionnelle du monde de l’édition, passée par la librairie universitaire Les Volcans à Clermont-Ferrand, puis par la librairie Martin-Delbert à Agen, où elle a travaillé pendant dix-sept ans. « Je rêvais de tenir une petite librairie indépendante, de proximité, à l’esprit familial, au plus près de la clientèle », explique-t-elle.
Si la dimension catholique constitue le socle historique de l’établissement, Françoise Delaleau-Ducros refuse toute étiquette réductrice. « La porte est grande ouverte, pour les croyants comme pour les non-croyants. » Dans ses rayonnages, elle se réserve le luxe de choisir ses livres au coup de cœur : romans contemporains, essais philosophiques, poésie, littérature générale, inspirés de ses lectures personnelles, d’émissions littéraires ou encore des recommandations de ses clients. Nicolas Mathieu y côtoie aussi bien des auteurs plus confidentiels que des écrivains plébiscités par des Prix. Sur commande, on trouve également livres de cuisine, de bricolage ou ouvrages pratiques : « Tout ce que souhaitent les clients. »

Revendeuse officielle de santons de Provence

La librairie propose aussi une offre jeunesse variée : littérature profane pour enfants, romans sentimentaux issus de maisons d’édition catholiques, porteurs de valeurs mais sans discours religieux explicite. En cette fin d’année, ce sont toutefois les santons de Provence qui attirent tous les regards. Revendeuse officielle de la maison Carbonel, référence en la matière, Françoise a également une sélection de santons d’Arterra, de Gâteau et du Moulin à Huile. Pour Gâteau, elle a même fait fabriquer Monsieur et Madame Pruneaux, un couple unique en France. Des pièces vendues entre 12 et 23 euros, pensées comme des objets de transmission familiale et de collection.
La scène se répète chaque jour : Timothée, un enfant de six ans, choisit un ange, une cliente venue pour un âne repart avec une vache, les rois mages s’arrachent pour compléter les crèches. Dans le département, rares sont les commerces à proposer de véritables santons de Provence. Et depuis début novembre, l’affluence est réelle.
Mais au-delà des objets pieux, de l’art monastique, des médailles, icônes et autre artisanat qu’elle source exclusivement auprès de maisons françaises, La Sainte Famille est surtout un lieu de lien social. « La clientèle est fidèle. Je fais la bise à beaucoup de monde », se réjouit la commerçante, qui accueille aussi bien des familles modestes que des catégories plus aisées. Elle observe également une évolution sociétale marquante : depuis un an, de jeunes adultes franchissent la porte pour acheter une Bible ou un chapelet. Catéchumènes en quête de sens, souvent en rupture de lien, parfois isolés par les écrans. « Ils ont le sourire jusqu’aux oreilles, ils sont heureux d’être en recherche. »
Lieu de passage pour des pèlerins de retour de Saint-Jacques-de-Compostelle qui viennent acheter un livre à glisser dans leur sac à dos avant le train, refuge pour ceux qui ont besoin de parler et de déposer leur fardeau de soucis et de chagrin, la librairie dépasse sa fonction commerciale. « Je m’y régale », confie Françoise Delaleau-Ducros. « Pour la lecture, pour le service rendu, et surtout pour les rencontres. » Une librairie comme un espace de respiration, à l’heure où ces lieux se font de plus en plus rares.

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