Après une première nuit passée sur place, les agriculteurs mobilisés sur l’autoroute A64, à hauteur de Carbonne, s’organisent pour un blocage appelé à durer de longues semaines.
Ils ont passé la nuit sur place et comptent bien s’installer dans la durée. Depuis vendredi soir, des agriculteurs bloquent l’autoroute A64, à hauteur de Carbonne, pour protester contre la gestion de la dermatose nodulaire contagieuse. Malgré la vaccination des animaux promise par la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, l’abattage total des cheptels reste la norme. Un contexte qui met le feu aux poudres dans le monde paysan.
Au petit matin, l’ambiance est calme autour du feu de camp érigé en plein milieu de la voie rapide. “Ça rappelle des souvenirs d’il y a deux ans”, glisse Bertrand Loup, éleveur à Boulogne-sur-Gesse et vice-président des Ultras de l’A64, qui avait déjà participé aux mobilisations agricoles de 2024.
Ce samedi matin, l’ambiance est presque trompeuse. Croissants partagés, sapins de Noël installés à proximité des palettes et discussions animées autour des braseros : une trentaine d’agriculteurs tiennent le barrage pendant que d’autres ont regagné leurs fermes pour assurer les travaux indispensables. “On a dormi dans nos véhicules pour cette nuit. Maintenant, on va structurer un peu le campement pour tenir plus longtemps, sur la durée.” Pour ces paysans habitués aux conditions difficiles, l’organisation ne pose pas de problème. La détermination, elle, demeure intacte.
“Être entendus sur nos mesures”
Le but du mouvement est assumé sans détour. “Le seul objectif qu’on a, c’est d’être entendus sur nos mesures et qu’elles soient mises en place”, insiste Bertrand Loup. Tant que les réponses n’arrivent pas, la levée du blocage n’est pas envisagée. “Tant qu’on n’a pas été entendus par la ministre de l’Agriculture et le gouvernement, on restera là le temps qu’il faudra.”
Malgré l’agacement, les visages sont marqués par l’inquiétude. Tous redoutent de voir leurs élevages décimés par la maladie. Une peur qui s’ajoute à une exaspération profonde envers l’État et la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard. “L’abattage total, c’est une hérésie, on pouvait vacciner”, lâche un éleveur de Carbonne, résumant le sentiment largement partagé sur le site.

La récente découverte d’un foyer de dermatose nodulaire dans un élevage à Touille, à environ 45 kilomètres de là, cristallise les tensions. L’éleveur concerné a accepté l’abattage de son troupeau, une décision qui alimente les discussions parmi les manifestants. “L’éleveur a accepté l’abattage, mais a-t-il été contraint de l’accepter ?”, s’interroge l’un des paysans présents sur le barrage. Une question qui renvoie, pour beaucoup, à la pression administrative et financière ressentie par la profession.
Manque de vaccination
Au-delà des considérations sanitaires, c’est l’attachement aux bêtes qui transparaît dans les témoignages. José, agriculteur près de Carbonne, raconte son parcours avec émotion : “C’est un crève-cœur de voir ses vaches abattues. Moi, j’ai démarré avec quatre ou cinq vaches, et j’ai mis 10 ans pour faire mon cheptel.” Pour lui, comme pour beaucoup d’autres, l’élevage est le fruit d’années de travail et de patience. “Aujourd’hui, toutes mes vaches sont nées à la ferme, ça me ferait mal de toutes les abattre”, confie-t-il.
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Si l’abattage total est au centre des critiques, les difficultés d’accès à la vaccination alimentent également la colère. Plusieurs agriculteurs dénoncent “la difficulté, voire l’impossibilité de faire vacciner ses bêtes”, alors même que la vaccination est présentée comme une alternative crédible par la profession.

Sur l’A64, la mobilisation dépasse ainsi le simple cadre d’un blocage routier. Elle incarne le malaise profond d’un monde agricole qui se sent incompris et sacrifié. Dépités mais solidaires, les agriculteurs assurent être prêts à tenir le siège aussi longtemps que nécessaire pour défendre leurs élevages et leur métier.

