La cour administrative d’appel de Toulouse examinait ce jeudi 11 décembre les recours de l’État et des concessionnaires, après l’annulation des autorisations environnementales de l’autoroute A69, entre Toulouse et Castres. On saura d’ici le 30 décembre si le chantier peut aller à son terme.
Une heure avant le début de l’audience, dans le quartier du Grand Rond à Toulouse, une soixantaine de soutiens des associations écologistes se masse devant la cour administrative d’appel, banderoles et thermos en main. Ils forment une haie de soutien aux avocates.
Quelques jours avant, le rapporteur public de la cour a rendu un avis favorable à la poursuite du chantier. Les opposants ont été “choqués” par la nouvelle, mais ils restent “combatifs et mobilisés”.

À l’intérieur, c’est lui, le rapporteur public, M. Diard, qui prend la parole en premier, pendant plus de 40 minutes.
Il estime que les trois conditions de la dérogation espèces protégées — Raison impérative d’intérêt public majeur, absence d’alternative, mesures compensatoires suffisantes — sont remplies.
Le projet d’autoroute entre Toulouse et Castres, dit-il, “réduit significativement le temps de trajet, améliore le cadre de vie et renforce la sécurité”. Le bassin Castres-Mazamet “justifie structurellement une liaison rapide avec Toulouse”.
L’État défend un projet “structurant”
Le représentant de l’État, Me Eric Sachet juge le jugement annulant les autorisations, en février 2025, “anormal au regard de toute la jurisprudence antérieure”.
Il écarte les alternatives, notamment ferroviaires, jugées incapables d’atteindre les objectifs fixés.
Les associations dénoncent une dérogation injustifiée
Me Alice Rover, représentante des associations, oppose une série d’avis défavorables : Autorité environnementale, CNPN, OFB, Commissariat à l’investissement. La Raison impérative d’intérêt public majeur, dit-elle, “doit rester exceptionnelle : impératif signifie urgent, majeur signifie essentiel”.

Avec 15 000 véhicules attendus chaque jour sur l’autoroute, “on est loin d’une infrastructure indispensable”. L’avocate rappelle que les alternatives ferroviaires “n’ont jamais été étudiées malgré l’obligation légale”.
Me Yzquierdo : “J’ai l’impression que les dés sont jetés”
Moment fort de cette audience, Me Marine Yzquierdo revient sur la demande de récusation déposée deux semaines plus tôt.
“Elle ne vous visait pas personnellement, mais concernait l’impartialité objective”, adresse-t-elle à la cour.
L’avocate raconte qu’il y a eu débat pour savoir si les avocats des associations devaient se rendre à l’audience du jour. Elle est venue, finalement, “par respect pour la justice et les citoyens présents”.

Mais elle confie ne “plus avoir le cœur à plaider”, évoque “47 rapports de non-conformités” et un chantier “pavé d’atteintes à l’environnement”. “J’ai l’impression que les dés sont jetés”.
Sur le fond, elle dénonce “400 hectares sacrifiés et 152 espèces protégées pour un gain de temps dérisoire”. “C’est une autoroute de confort.”
À la sortie : applaudissements, huées et prises de parole
Sous un petit abri monté pour l’occasion, un système audio grésille. Les porte-parole prennent la parole devant un public réchauffé par les slogans.

Jean Olivier, figure des opposants, dénonce “l’absence totale d’étude” sur l’alternative ferroviaire :
“Le ministère a reconnu qu’il n’y en avait pas. On nous dit que le rail coûterait des milliards, mais nous avons montré qu’un désenclavement ferroviaire coûterait 40 millions, avec un train toutes les 30 minutes.”
Les avocats des concessionnaires, mais aussi ceux des collectivités, sont hués par les sympathisants écologistes.
La cour doit désormais trancher un dossier devenu emblématique. L’arrêt sera rendu d’ici le 30 décembre, a annoncé le président Chabert à la fin de l’audience.

