Le président américain Donald Trump s’adresse aux membres de la presse le 19 octobre 2025 à bord d’Air Force One. ALEX WONG / GETTY IMAGES VIA AFP
La politique étrangère de Donald Trump en Amérique du Sud est-elle à un tournant de son histoire ? Dimanche 19 octobre, il a qualifié Gustavo Petro, président colombien, de « baron de la drogue qui encourage fortement la production massive de stupéfiants ». Deux jours plus tôt, il avait assuré que son homologue vénézuélien, Nicolas Maduro, proposait des concessions majeures pour apaiser les tensions entre les deux pays. Alors que les Etats-Unis poursuivent leurs frappes contre de présumés narcotrafiquants, au moins 27 personnes ont été tuées depuis le début du mois de septembre. La crise menace d’entraîner la région dans la guerre et provoque des soubresauts au cœur des appareils d’Etat.
Les Etats-Unis ont déployé sept navires de guerre dans les Caraïbes, et un dans le golfe du Mexique officiellement dans le cadre d’une opération contre le narcotrafic, visant particulièrement le Venezuela. Donald Trump accuse Nicolas Maduro d’implication directe dans les trafics, ce que celui-ci dément formellement. L’arrestation du président vénézuélien, inculpé par la justice américaine, fait d’ailleurs l’objet d’une prime de 50 millions de dollars.
« Nous avons attaqué un sous-marin, et c’était un sous-marin transportant de la drogue, construit spécifiquement pour transporter d’énormes quantités de drogue », a affirmé Donald Trump le 17 octobre, après une question sur l’existence de survivants rapportée dans la presse américaine. « Ce n’était pas un groupe de gens innocents », a insisté le président américain, sans présenter d’éléments factuels.
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Donald Trump s’appuie sur de supposés trafics, pour faire accepter le déploiement de navires. L’agence antidrogue (DEA) et le ministère de la Justice américain précisent que les principales routes de la drogue ne traversent pas le Venezuela, mais plutôt la Colombie et le Mexique, deux autres pays visés par Trump dans sa guerre contre le « narcotrafic ».
Des accusations sans preuves pour justifier des opérations meurtrières
Ces accusations sans preuves tangibles suffisent à Donald Trump pour mener des attaques, meurtrières, dans les eaux internationales. Voilà ce que le président américain a rétorqué à un journaliste qui lui demandait pourquoi les Etats-Unis coulaient les bateaux plutôt que de les arraisonner : « Parce que nous faisons cela depuis trente ans et que cela s’est avéré totalement inefficace. Ils ont des bateaux plus rapides. Mais ils ne sont pas plus rapides que des missiles. »
Donald Trump a indiqué le 15 octobre avoir autorisé des opérations clandestines de l’Agence centrale de Renseignements (CIA) sur le territoire du Venezuela. Cette intervention secrète « constitue une violation grave du droit international », a réagi le ministère des Affaires étrangères du Venezuela dans un communiqué.
Le président américain attaque la politique migratoire de ses prédécesseurs, qui auraient largement laissé entrer aux Etats-Unis « des criminels et des malades mentaux » relâchés par Nicolas Maduro. Il justifie également ces opérations par le flux de drogue massif qu’il suppose provenir du Venezuela. « Beaucoup de drogues arrivent du Venezuela, une grande partie par la mer. Mais nous allons aussi arrêter celle qui arrive par voie terrestre », a indiqué Donald Trump.
Donald Trump peut-il se « cacher » derrière la CIA ?
Selon les informations du journal britannique « The Guardian », la CIA est à l’origine de la majorité des renseignements qui justifieraient les frappes meurtrières. Cela signifie que la plupart des preuves ne seront jamais révélées parce que classifiées. Un porte-parole de la CIA a renvoyé les questions vers le Pentagone, qui lui-même s’est retourné vers la Maison-Blanche.
Pete Hegseth, secrétaire à la Défense, avait par ailleurs annoncé le 16 octobre sur X la démission du commandant du Southcom (chef des forces américaines pour l’Amérique latine), sans donner plus de détails. L’amiral Alvin Holsey a précisé sur X qu’il quitterait son poste le 12 décembre pour « prendre sa retraite », rejoignant la longue liste de hauts responsables militaires américains évincés ou partis depuis le début du second mandat de Trump.
En plus de défier les règles internationales, Donald Trump fait fi des lois de son propre pays. L’autorisation d’« usage de la force militaire » doit logiquement être donnée par un vote au Congrès américain, ce qui n’a pas été le cas. Congrès qui regrette d’ailleurs l’absence de preuves de la présence de drogue sur les bateaux détruits dans les Caraïbes.