October 17, 2025

RÉCAP. Cédric Jubillar condamné à 30 ans de prison : faisceau d’indices, incohérences… les raisons d’une lourde condamnation

l’essentiel
Ce vendredi 17 octobre, la cour d’assises du Tarn a condamné à 30 ans de réclusion criminelle, Cédric Jubillar, 38 ans, pour le meurtre de son épouse Delphine, en décembre 2020, à Cagnac-les-Mines. La défense de l’artisan plaquiste a annoncé faire appel du jugement. À l’issue du verdict, soulagement du côté des parties civiles qui voient leur statut de victime reconnu. Même si le corps de Delphine est toujours introuvable.

Après six heures de délibéré, la cour d’assises du Tarn a condamné Cédric Jubillar à une peine de 30 ans de réclusion criminelle, pour le meurtre de sa femme, Delphine Jubillar (née Aussaguel), 33 ans, dont le corps n’a jamais été retrouvé. Une lourde sanction fidèle aux réquisitions des avocats généraux, Pierre Aurignac et Nicolas Ruff, qui ont maintes fois répété, mercredi 15 octobre, “n’avoir aucun doute sur la culpabilité de l’accusé”.

À l’énoncé du verdict, ce vendredi 17 octobre, l’artisan plaquiste de 38 ans n’a manifesté aucun geste dans sa cage de verre. Quelques heures auparavant, il a redit face à la présidente, Hélène Ratinaud, “n’avoir absolument rien fait à Delphine”.

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L’immense soulagement des 15 parties civiles

Il est reconnu coupable d’avoir tué son épouse Delphine, dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020, à Cagnac-les-Mines, sur fond de crise conjugale aiguë. Une affaire sans corps, ni traces, ni aveux, mais cela n’a pas empêché les jurés, à une majorité de 7 voix, de condamner l’accusé.

Une décision accueillie avec un énorme soulagement de la part des quinze parties civiles représentées par leurs neuf avocats dont les démonstrations, tantôt brouillonnes, tantôt émouvantes, ont pesé lourd dans la décision finale. Durant ces quatre semaines, la cour a croulé sous l’indigne vacuité de certains témoignages. Des ressentis, des récits purement subjectifs se sont succédé à la barre, jusqu’à la nausée. Certains témoins n’ayant pas d’autres missions que de vider le barillet de la haine contre Cédric Jubillar, avant même la sanction finale. D’autres, se portant au secours d’un accusé acculé, confondant tribune politique et enceinte judiciaire.

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Le poids des enfants

Les enfants du couple Jubillar, Louis et Elyah, 11 et 6 ans, dont les voix sont portées par leur représentante légale, elle-même convaincue de la culpabilité de leur père, tout comme la propre mère de Cédric Jubillar, Nadine Fabre, partie civile, aux côtés de ses petits enfants, ont été des soutiens de poids, de l’autre côté de la barre.

La lecture très émouvante d’une lettre de Louis, à deux reprises par Me Chmani, a sans doute constitué un tournant dans ce procès. Une lettre manuscrite dans laquelle il affirme que “Cédric ment”, tout en insistant sur les maltraitances subies par son père “quand maman n’était pas là”. À l’issue du verdict, Me Chmani regrette que Cédric Jubillar “ait raté le rendez-vous avec ses enfants”. “Ils lui ont donné la possibilité à plusieurs reprises de s’exprimer, de dire les choses, mais il a raté ce rendez-vous”.

Nadine Fabre, la propre mère de l’accusé, dont la relation parfois conflictuelle avec son fils a été évoquée, rongée par le poids des remords, est venue relater les menaces proférées par Cédric, quelques jours avant les faits. Il lui a confié, “j’en ai marre de Delphine, elle m’énerve, je vais la tuer, je vais l’enterrer, personne ne va la retrouver”. Nadine explique “avoir mis ça sur le compte de la colère, je lui ai dit arrête tes conneries. Je regrette de ne pas avoir donné plus de sens à cette phrase. On ne serait pas là aujourd’hui”.

Un second procès dans un an

Les jurés ont suivi le réquisitoire des avocats généraux et leur implacable logique estimant que, quel que soit le sens dont on aborde cette affaire, “tout converge vers Cédric Jubillar”. Les événements réseaux qui déterminent, d’abord, la position du téléphone de Delphine Jubillar, qui n’a pratiquement pas bougé d’une zone proche de la maison familiale, rue Yves-Montand, mixés aux recherches du chien pisteur, dont le trajet fait une boucle autour de la maison, sans aucune rupture, accréditent la thèse selon laquelle l’infirmière n’a ni été enlevée, ni kidnappée dans un véhicule.

Selon Pierre Aurignac, Delphine Jubillar “n’est pas partie vivante de cette maison”. Son confrère du ministère public, Nicolas Ruff, estimant, lui, que l’agression fatale se situe “à l’extérieur de la maison”, venant ainsi corroborer les “cris de peur et d’effroi” entendus cette nuit-là, peu après 23 heures, par deux voisines. Des indices qui entrent en résonance avec la situation électrique du couple en instance de divorce. Un mari quasiment ruiné, “jaloux et colérique”, sur le point de perdre sa femme et sa maison. Le mobile est tout trouvé. Un geste fatal, voire explosif et une dissimulation du corps pour s’enfermer dans une sorte de déni. “Cédric Jubillar croit que l’absence du corps lui procure une sorte d’impunité”, souligne, Me De Caunes, l’avocat des frères et de la sœur de Delphine.

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Une défense combattive mais vaine face à la montagne

La défense stratosphérique de Mes Emmanuelle Franck et Alexandre Martin, deux avocats extrêmement combatifs et inspirés, maîtrisant à la perfection la moindre ligne des 33 000 pages de ce dossier, n’a pas suffi à renverser la montagne. Tout comme le torpillage en règle du faisceau d’indices. “Je peux vous décrire un homme abattu”, confient les avocats de Cédric Jubillar. “Mais ce n’est pas notre défaite, c’est notre combat. On a dit à Cédric : on sera là dans un an, on va continuer. Il y a un vrai problème à condamner un homme sur un faisceau d’indices, avec des preuves que nous estimons défaillantes.”

Les interrogatoires de Cédric Jubillar durant lesquels ce dernier a multiplié les réponses incohérentes ou contradictoires ont effacé l’ombre du doute. Ce doute qui aurait pu profiter à un accusé qui n’a eu de cesse de se tirer une balle dans le pied. Un accusé qui aura finalement été son principal ennemi.

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Pour le reste, les parties civiles ont obtenu ce qu’elles sont venues chercher : une lourde condamnation. De quoi soulager une immense peine dans la reconnaissance de leur statue de victime. Même si la famille et les amies de Delphine n’ont pas toutes les réponses à leurs questions. “Nous savons que Cédric Jubillar ne dira jamais où il a caché le corps de Delphine”, conclut, Me Philippe Pressecq. L’avocat de Lolita, la cousine de Delphine. “Ce qui a fait basculer le jugement, ce n’est pas un élément isolé, mais la multiplicité d’indices et de faits concordants”.

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