October 13, 2025

Cyclisme-Dopage : les dirigeants ont demandé aux coureurs d’inhaler du monoxyde de carbone, une grande équipe du Tour de France contrainte d’avouer

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Face à des révélations choc nées d’une longue enquête, les patrons de l’équipe n’ont eu d’autre choix que de reconnaître avoir eu recours à cette pratique polémique.

Une affaire qui réveille, une nouvelle fois, les vieux démons du dopage. Un temps soupçonnée, désormais confondue : l’équipe britannique INEOS Grenadiers, ex-équipe Sky qui notamment hébergé Christopher Froome et Bradley Wiggins, deux ex-vainqueurs du Tour de France, a bien eu recours à l’inhalation de monoxyde de carbone pour ses coureurs. Une méthode à la frontière de la légalité, utilisée sous couvert d’évaluation scientifique.

Selon une enquête du Times, ces tests controversés ont eu lieu en début d’année 2025, dans la chambre 101 d’un hôtel en Espagne, lors d’un camp d’entraînement organisé par la formation de Jim Ratcliffe, par ailleurs propriétaire du club de foot de Nice.

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Sept coureurs, dont certains âgés de moins de 20 ans, auraient participé à ces séances. Ils devaient inhaler un mélange d’oxygène et de monoxyde de carbone pendant cinq à six minutes, se reposer un quart d’heure, puis recommencer.

L’équipe, d’abord dans le déni, a fini par reconnaître les faits, uniquement après confrontation avec les preuves obtenues par les journalistes. “Ce n’est qu’après avoir été confronté aux informations du Times concernant les tests effectués en Espagne […] qu’INEOS a confirmé son utilisation de monoxyde de carbone”, écrit le quotidien britannique.

Face à la polémique, la direction d’INEOS s’est empressée de publier un communiqué pour calmer la tempête : “Nous n’avons jamais utilisé cette méthode pour améliorer la performance. […] Cela n’a servi que d’outil de mesure afin d’évaluer la réaction des coureurs à l’altitude et au stress thermique. Nous avons toujours respecté les règles de l’UCI.”

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Un gaz au cœur de la zone grise

Le monoxyde de carbone n’est pas un produit dopant à proprement parler. À faibles doses, il est utilisé depuis les années 1980 pour mesurer la masse totale d’hémoglobine, un indicateur clé de la capacité d’un athlète à transporter l’oxygène. Mais répété trop souvent, ce test pourrait stimuler la production de globules rouges, et donc mimer les effets d’un stage en altitude ou d’une microdose d’EPO.

L’UCI et l’Agence mondiale antidopage (AMA) ont réagi en urgence. Depuis février 2025, l’inhalation de monoxyde de carbone est strictement limitée à un seul test toutes les deux semaines, sous supervision médicale, et son usage à des fins non diagnostiques est désormais interdit.

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Pogacar et Vingegaard aussi concernés

La révélation met en lumière une pratique plus répandue qu’on ne l’imaginait. Déjà, lors du Tour de France 2024, Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard avaient reconnu y avoir recours dans le cadre de tests d’altitude. “C’est pour mesurer le volume sanguin et la masse totale d’hémoglobine. […] Ce n’est pas comme respirer les gaz d’échappement d’une voiture, c’est juste un test scientifique”, avait expliqué Pogacar, tentant de banaliser la méthode.

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Mais d’autres voix s’élèvent pour dénoncer une dérive inquiétante. Le Français Romain Bardet, désormais retraité, s’était interrogé : “Le monoxyde de carbone pourrait expliquer la trajectoire de certains coureurs que l’on ne connaissait pas il y a un an. Il y aura toujours la tentation de chercher un avantage compétitif.”

Pour INEOS, héritière de la mythique équipe Sky, ce scandale est un coup dur pour une structure déjà souvent critiquée pour sa gestion opaque de la “marginal gains science”, cette quête obsessionnelle du détail qui améliore la performance sans franchir officiellement la ligne rouge.

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