À Arvigna, petit village de l’Ariège, les cloches de l’église ne sonnent pas tout à fait comme ailleurs. Depuis quelques années, le maire Maxime Roubichou a instauré un système original mêlant tradition et modernité : des mélodies bien connues, comme La marche impériale ou Au clair de la lune, ponctuent les journées des habitants.
“Ça fait revivre l’esprit même de la commune”, affirme fièrement Maxime Roubichou, maire d’Arvigna, en Ariège, ce mercredi 8 octobre 2025. Chaque jour, à 13 h 30 précises, trois notes retentissent dans ce village de 253 habitants, suscitant souvent la curiosité des clients du restaurant situé à proximité de l’église Saint-Vincent-et-Saint-Martial.
Ces quelques notes marquent symboliquement la fin de la sieste et le retour au travail. Mais pour y ajouter une touche d’humour, l’édile a choisi de faire retentir un air bien connu de la trilogie Star Wars. “Ah ! Vous avez reconnu ? C’est le début de la marche impériale !”, glisse-t-il en riant. “ Je suis fan depuis toujours. ”
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Le soir venu, à 23 h 30, les cloches reprennent du service, cette fois sur l’air d’Au clair de la lune, afin d’inciter les habitants à rejoindre leur lit. “ Ça évite de mettre une sonnerie religieuse comme l’angélus…”, précise le maire. Pour mettre en place ce système musical original, il a fait appel en 2021 à l’entreprise Bodet, spécialiste européen de la mesure et de la gestion du temps. “ Il a fallu trouver les bonnes notes pour obtenir une mélodie fidèle. Un micro intégré au clocher permet aussi de contrôler la qualité sonore et le bon fonctionnement du dispositif. L’entreprise peut ainsi vérifier en temps réel que tout fonctionne correctement.” Coût du dispositif ? 400 euros par an.
Conserver les traditions rurales
Le système, installé à l’entrée de l’église, se pilote via une tablette, remplaçant l’ancien mécanisme électrique. “On a fini par mettre un code d’accès, raconte le maire. Avant, il n’y avait aucune sécurité, et un jour, les cloches se sont mises à sonner n’importe comment. Quelqu’un avait complètement bidouillé la tablette… “
Depuis, un dispositif sécurisé permet à l’édile de 45 ans de gérer l’application aussi bien sur la tablette qu’à distance depuis son téléphone. Dessus, on retrouve la volée, le glas homme, le glas femme, l’angélus, le tocsin, servant à alerter la population d’un danger imminent… “C’est important pour moi de conserver les traditions rurales et les faire perdurer dans le temps”, appuie Maxime Roubichou. Il faut dire que les cloches n’ont retrouvé leur voix que fin 2018 grâce au clocher entièrement électrifié et à la mise en place d’une troisième cloche, ornée d’une croix occitane.
“C’était important de refaire sonner ces cloches, insiste le maire. On entendait celles des villages voisins, mais plus les nôtres. Aujourd’hui, cela nous permet de renouer avec la tradition, en conciliant à la fois le côté religieux et le côté laïque.” Fin septembre 2025, l’élu s’est également mobilisé autour de la restauration des œuvres du chœur de l’église. Un vaste programme de rénovation de ce “lieu de culte chargé d’histoire” est prévu sur cinq ans.
“Dans ce cas, je les invite à aller ailleurs”
Pour autant, la préservation des sons de la ruralité ne se fait pas toujours sans tensions. “De plus en plus de néoruraux s’installent en campagne, mais ne supportent plus les coqs, les tracteurs… Ils imposent une inquiétude supplémentaire”, déplore Maxime Roubichou, qui tranche : “ Dans ce cas, je les invite à aller ailleurs. ”
Pas question donc de faire taire les cloches, qui sonnent ici toutes les heures et les demi-heures, de jour comme de nuit. Le maire tient d’ailleurs à affirmer son soutien à l’édile de Bézac, en référence à la controverse qui a opposé Jean-Paul Chabé, maire de cette commune ariégeoise, à une habitante incommodée par les trois cloches de l’église Saint-Amans, situées à seulement 30 mètres de son domicile et lui provoquant, selon elle, d’importantes douleurs auditives.
À Arvigna, la musique des cloches fait au contraire pleinement partie du quotidien. Et lorsque l’une vient à manquer, les habitants ne tardent pas à le signaler. “Quand ça ne sonne plus, je reçois des textos d’habitants qui me disent : “Monsieur le maire, il n’y a pas eu les mélodies aujourd’hui ?” “, raconte-t-il en souriant.