Au terme de deux jours de procès, Hervé Salfati a été reconnu coupable des faits de viols incestueux vendredi 26 septembre.
Dans un silence de plomb, la victime s’est livrée sur son enfance meurtrie par les agressions sexuelles et les viols, dont elle accuse son père Hervé Salvati d’être l’auteur. “J’ai été violé dans énormément d’endroits dans cette maison. La chambre, le salon, le grenier, le jardin… Et puis, cette machine à laver… Je m’en souviendrais toujours”, retrace Dawa Salfati.
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La cour criminelle départementale du Lot-et-Garonne a reconnu le sexagénaire coupable de ces faits – que ce dernier conteste fermement – et l’a condamné ce vendredi à 15 ans de réclusion criminelle, avec une peine de sûreté de moitié. Pour rappel, tout se serait déroulé entre 2004 et 2009 à Saint-Beauzeil (82) dans la maison familiale, lors de déplacements professionnels, puis dans le domicile de la mère de l’accusé à Villeneuve-sur-Lot ; alors que la jeune fille était encore mineure.
Par ses proches, l’accusé de 66 ans est dépeint comme “un père autoritaire et dominant”, ayant toujours manifesté une préférence affective pour sa fille, au dépit du dernier de la famille. “Mon frère était frappé, humilié, sans cesse traité de nul”, raconte Dawa Salfati. “Nous n’avions aucun droit. Des meubles, aux vêtements, jusqu’à nos coupes de cheveux, il choisissait tout. Mon père décidait, et ma mère était comme un fantôme derrière”, poursuit-elle. Des scènes, durant lesquelles le mis en cause aurait abattu le chien de la fillette, ou bien brûlé sa peluche tandis qu’elle était de sortie avec sa mère, sont relatées par les membres de la famille. “Je voulais simplement séparer ma fille de sa petite jeunesse. Il n’y a rien de dramatique. Concernant le chien, il était mourant et souffrait. Je l’ai euthanasié”, soupire le mis en cause interrogé ce vendredi.
Quitter de force son statut d’enfant
Quand les parents de la victime divorcent, la mère de famille s’installe en Dordogne avec son deuxième enfant, l’adolescente – qui assure aujourd’hui avoir agi sous la menace d’Hervé Salfati – ayant décidé de rester vivre avec son père. Pendant plusieurs années, le duo père fille voyage au gré des aspirations professionnelles de l’ancien journaliste, souhaitant s’illustrer comme photographe de mode. L’enfant est déscolarisée et devient l’assistante de son géniteur, dont elle ne sera que très rarement séparée. Hervé Salfati souhaite propulser sa fille dans le monde de la musique, art dont il est le seul à lui transmettre l’enseignement. “Je voulais en faire une chanteuse internationale. Elle est devenue une petite chanteuse de bal de rue”, fustige-t-il à l’audience. “Votre fille avait-elle le droit d’avoir des contacts extérieurs, avec d’autres enfants par exemple ?”, s’assure la présidente Marianne Douchez-Boucard. “Je ne vois pas l’intérêt”, rétorque-t-il.
En Espagne, au Portugal, sur la Côte d’Azur ou bien à Villeneuve-sur-Lot, les maltraitances sexuelles persistent. “Elle rapporte que les viols avaient lieu environ tous les deux jours. Ils travaillaient ensemble, dormaient ensemble. Elle vient à déclarer : j’étais devenue la femme de mon père”, déclarait Pascal Satel, enquêteur de personnalité.
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“Rien ne le prédestinait à être le monstre décrit”
Conduites addictives, sexualité débridée… Une fois à l’âge adulte, les stigmates de ces années d’abus transparaissent dans les comportements de la jeune femme. “Hervé Salfati lui a volé son enfance, son adolescence, au moment où le corps de la femme se forme, où elle aurait dû avoir ses premières amourettes, relations. Elle aurait dû aborder tout cela dans l’ignorance, mais elle n’a pas pu. Elle était dans la soumission totale à l’homme. Pour elle, c’était normal”, plaide l’avocate de la partie civile, Me Frédérique Pohu-Panier.
Me Éléa Cerdan, conseil de l’accusé, appuie sur le complexe cheminement de la mère de famille à concevoir que son ancien époux ait pu commettre un tel crime sur leur enfant. “Je me demande si elle affirme qu’il l’a violée par intime conviction ou par peur de perdre sa fille. Il lui aura fallu 13 ans pour s’en convaincre. C’est que pour elle, rien ne prédestinait Hervé Salfati à être le monstre décrit par sa fille.”
Entre les différents témoignages, les multiples dépositions de Dawa Salfati “qui n’ont jamais changé”, pour le ministère public, chacun des éléments de cette procédure “a permis d’établir la matérialité des faits”. La cour s’est alignée aux réquisitions de l’avocate générale. L’inscription d’Hervé Salfati au fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles (FIJAIS) a également été ordonnée.