Rongé par les charges, Julien Chevallier a fermé sa boulangerie à Tarbes, Comme dans l’temps, à la fin du mois d’août. En quatre ans d’activité, le chef n’a jamais pu se verser l’équivalent d’un SMIC.
Il ne pouvait plus faire autrement. En juillet dernier, Julien Chevallier a pris l’une des décisions les plus difficiles de sa vie : fermer sa boulangerie. “L’amplitude horaires était devenue trop conséquente et invivable. J’étais sans arrêt en train de produire du pain et des viennoiseries, en train de passer des recrutements pour trouver des vendeurs, réfléchir au planning…” commence le boulanger. Il avait ouvert Comme dans l’temps en 2021, rue George Lassalle, à Tarbes. Une petite boulangerie de quartier avec ses habitués où il faisait bon vivre. Mais côté laboratoire, en arrière-scène, Julien Chevallier trimait plus de dix heures par jour pour joindre les deux bouts.
En juillet dernier, il nous faisait part de ses difficultés face à l’augmentation du prix de l’énergie et des matières premières, notamment du beurre et du sucre. Il avait dû se résoudre à augmenter le prix de ses viennoiseries de 20 centimes. Mais ce n’est pas tout. ” Les cotisations payées à l’Urssaf ont augmenté de 50 % en trois ans. Je me suis retrouvé à payer, pour 6000 euros de salaire par mois, 3000 euros à l’Urssaf, c’est de la folie pour une petite structure comme la mienne “, détaille le commerçant. Son établissement qui employait 8 salariés à l’ouverture, en 2021, ne comptait plus que 4 salariés dont deux apprentis avant sa fermeture. Aux cotisations salées, s’est ajouté le problème de recrutement. ” J’ai eu du mal à trouver les profils adaptés. Souvent, les horaires ne convenaient pas au candidat car on ne peut pas proposer des ouvertures et fermetures classiques. En peu de temps, j’ai eu quatre vendeuses différentes. Je n’arrivais pas à constituer une équipe stable “, regrette également l’entrepreneur.
À lire aussi :
De la margarine, des viennoiseries plus chères… Comment les boulangers s’adaptent à l’explosion du prix du beurre
Même pas 900 euros par mois
Et ce n’est pas fini. ” En tant que boulangerie artisanale, je devais verser une prime obligatoire de fin d’année à mes salariés, l’équivalent d’un 13e mois. Socialement bien sûr, c’est un avantage. Mais la trésorerie était à sec. J’ai déclaré 10 500 euros sur ma ligne de salaire l’année dernière, à peine 900 euros par mois, même pas un Smic “, déplore le boulanger. Enfin, la concurrence des chaînes de boulangerie a aussi eu raison de sa petite échoppe. ” J’étais face à une autoroute et il y avait un mur. Soit je le prenais en pleine tête, soit je me résignais à arrêter la course “, résume Julien Chevallier. Suite à une cessation de paiements, il a demandé une liquidation judiciaire auprès du tribunal de commerce.
À lire aussi :
” J’ai fait la surprise à mon fils ” : à Tarbes, il participe à l’émission La meilleure boulangerie de France
” Ca fait mal, j’y ai passé du temps. Je me suis sacrifié. Avant, devenir boulanger était une concrétisation de carrière. Aujourd’hui, il n’y a plus aucune gloire”. Le 26 août, il a baissé le rideau après une dernière journée riche en émotion : un client a joué de la guitare dans la boulangerie pour dire au-revoir, les habitués sont venus saluer le patron et d’autres ont laissé des courriers sur la porte d’entrée. Aujourd’hui, Julien Chevallier est responsable adjoint du rayon pâtisserie, au Méridien. Un nouveau défi. ” Je tourne la page difficilement. De nouvelles choses m’attendent “, conclut le boulanger.