Le parti socialiste sait que prendre Matignon dans l’état actuel des finances est une véritable gageure. D’autant qu’il sera bien difficile de réunir une majorité pour faire voter un budget. Mais Olivier Faure se trouve contraint de s’y préparer pour ne pas obérer ses chances en 2027.
La barbe. Arborée au lendemain d’une défaite ou à la veille d’une bataille, elle fait toujours sens. Battu par François Hollande au printemps 2012, Nicolas Sarkozy en avait fait le signe visible de sa prise de recul toute provisoire. En 2016, Emmanuel Macron, alors jeune ministre de l’Économie se rêvant un destin élyséen, s’était laissé pousser une barbe de trois jours avant de la faire raser sous l’œil des caméras. Et voilà qu’à la veille de la rentrée politique, Olivier Faure a son tour semble avoir laissé tomber le rasoir. Difficile de ne pas y voir un signe. Le premier secrétaire du Parti socialiste tout au moins fait savoir qu’il se tient prêt à remplacer François Bayrou si l’actuel Premier ministre est contraint de donner sa démission le 8 septembre prochain. Mais la gauche veut-elle vraiment du pouvoir ?
À la disposition du Président
« On a pesé le pour et le contre car se retrouver aux responsabilités dans une situation catastrophique financièrement et sans le soutien de LFI, c’est totalement casse-g… », nous avouait une proche d’Olivier Faure présente aux universités d’été socialistes à Blois ce week-end. Tous, cadres et militants, pensent aux conséquences catastrophiques qu’un échec de la gauche à Matignon pourrait avoir sur les élections municipales de mars prochain et surtout sur la présidentielle de 2027. Mais l’entourage du Premier secrétaire en est malgré tout arrivé à la conclusion qu’il serait encore pire de s’aligner sur LFI et de refuser de gouverner. C’est ainsi qu’Olivier Faure a assuré mardi qu’il était « à la disposition » du président de la République.
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Pour autant, les dirigeants socialistes ont bon espoir qu’Emmanuel Macron fasse un autre choix et préfère l’un de ses proches comme le ministre des Armées Sébastien Lecornu ou le Garde des Sceaux Gérald Darmanin. « On sait qu’au final il ne nous nommera pas », sourirait ce week-end un cadre du parti. D’autant qu’Olivier Faure a présenté samedi un programme économique très marqué à gauche et bien loin du fameux mantra macroniste du ruissellement. Pas vraiment un signe d’ouverture.
L’échec n’est pas permis
Les socialistes se préparent pourtant à toutes les éventualités car ils savent le Président imprévisible et veulent être prêts au cas où celui-ci, contre toute attente et peut-être pour les piéger avant les municipales et la présidentielle, viendrait les chercher. « On ne se dérobera pas. Si on est appelés, on prendra nos responsabilités, on ne restera pas sur le bord de la route », nous assure par exemple le président du Conseil départemental de Haute-Garonne Sébastien Vincini. Mais il s’agira à ce moment-là d’être en capacité de gouverner. L’échec ne sera pas permis. Dans cette perspective, « il faut que l’on réussisse à arrimer les Verts et le PC, qui sont actuellement tentés de suivre LFI », avouait samedi un cadre socialiste qui ajoutait : « Ensuite nous devrons parler avec le bloc central ». Gabriel Attal a d’ailleurs proposé à Olivier Faure de venir à Blois ce week-end. Refus du Premier secrétaire qui estime qu’il est encore trop tôt pour s’afficher ensemble. Mais il s’y prépare.
Cazeneuve en embuscade
Si Olivier Faure s’avance ainsi, c’est aussi parce qu’il se sait en concurrence avec Bernard Cazeneuve et Eric Lombard, plus Macron-compatibles que lui. Or si l’un ou l’autre était appelé, le PS aurait bien du mal à refuser de travailler avec eux. La situation économique n’est plus la même qu’en 2024 et impose plus de pragmatisme. Mais soutenir un Cazeneuve ou un Lombard, c’est leur accorder une longueur d’avance pour 2027. Cornélien… Le PS aimerait éviter Matignon mais se trouve donc contraint de le réclamer. Pas facile de conjuguer intérêt à court et à long terme. 2 025 ne doit pas obérer 2 027. La barbe d’Olivier Faure est là pour rappeler quel est son véritable objectif.