August 17, 2025

"Calme apparent, risque présent" : entre nature idyllique et danger caché, les hydroguides d’EDF se mobilisent pour sensibiliser les usagers des rivières

l’essentiel
Baignade, randonnée, pêche… En ces temps caniculaires, les rivières deviennent attirantes pour se rafraîchir ou s’amuser. Mais en aval des centrales hydroélectriques, elles peuvent devenir piégeuses, raison pour laquelle EDF déploie des hydroguides pour alerter et sensibiliser les populations.

Peut-on décrire la vallée d’Orlu autrement que par l’expression “paysage de carte postale” ? Un ciel d’un bleu étincelant, du vert, des fleurs et des montagnes à perte de vue, un paysage baigné par l’Oriège qui serpente lascivement au cœur du village éponyme. Comment ne pas vouloir profiter de l’eau de l’affluent de l’Oriège, qui invite à la baignade sous ces chaleurs caniculaires ?

Mais comme le proverbe le dit bien, il faut toujours se méfier de l’eau qui dort. Le T-shirt de Margaux et Rodrigue, les hydroguides d’EDF, le dit différemment, mais de manière tout aussi percutante : “Calme apparent, risque présent”. Ce jeudi 7 août, les deux étudiants arpentent les rives de l’Oriège, prospectus en main et conseils de prudence en bouche, pour sensibiliser touristes, pêcheurs et locaux au risque de variation de débit lié au fonctionnement des aménagements hydroélectriques d’EDF : ici, la centrale hydroélectrique d’Orlu, qui veille sur la vallée à quelques kilomètres en amont.

Comme le rappelle le t-shirt des hydroguides, le calme est apparent, mais le risque est présent.
Comme le rappelle le t-shirt des hydroguides, le calme est apparent, mais le risque est présent.
DDM ML

L’ombre du drame du Drac plane sur la mise en place de cette politique de prévention il y a une dizaine d’années. En 1995, un lâcher d’eau du barrage de barrage de Saint-Georges-de-Commiers dans cette rivière iséroise avait emporté six enfants et leur accompagnatrice, alors en sortie scolaire pour observer les castors. Il est devenu donc impératif pour EDF d’évaluer les sites à l’aval, mais aussi dans une certaine mesure en amont, pour connaître au mieux les rivières, ses méandres, sa topographie et les dangers qui peuvent en découler quand des litres d’eau y sont déversés. “Identifier au mieux les sites à risque, ça permet de préparer les parades”, résume Jean-Pierre Koudiao, responsable d’EDF Hydro Vallées d’Ax.

Les hydroguides bien accueillis par le public

Dans l’arsenal de la centrale orlunaise pour contrer les risques, on retrouve évidemment les panneaux jaunes signalant le danger d’une montée des eaux soudaines, qui jalonnent les berges de la rivière, mais aussi un dispositif qu’on ne retrouve pas partout : une première vague d’alerte de prévention, pour que les gens voient le niveau de l’eau monter et se disent qu’il est temps de sortir ; puis une deuxième de dissuasion, pour marteler le message qu’il faut s’éloigner de la rivière avant le lâcher d’eau.

Les hydroguides sont une autre des armes pour cette politique de sensibilisation aux risques. “Ils vont faire de la prévention, mais aussi faire du relevé de fréquentation de sites, pour évaluer si ces sites sont très fréquentés et donc qu’il faut s’y concentrer pour sensibiliser les gens”, précise Jérémy Lamory, ingénieur chez EDF. Les deux jeunes hydroguides ont pour cela une application, qui couvre les sites fréquentés de leur secteur – les vallées d’Ax et Aston. Téléphone en main, Margaux indique : “On note le nombre de personnes, si ce sont des touristes ou des locaux, s’ils connaissaient les risques et les règles…” De cette manière, ils peuvent aussi signaler de nouveaux espaces qui attirent les usagers, ainsi que rayer des non fréquentés de la carte.

Les hydroguides ont le secteur des vallées d’Ax et d’Aston à couvrir.
Les hydroguides ont le secteur des vallées d’Ax et d’Aston à couvrir.
DDM ML

Et sur le terrain, les retours sont quasi unanimement positifs. “Au début, je pensais qu’on aurait peut-être du mal avec les locaux, mais en fait pas du tout, confesse Margaux. Au contraire, ils sont super positifs avec nous, ils nous disent que c’est bien de faire passer le message.” Car locaux ou pas, tout le monde peut se retrouver pris au piège d’une rivière de montagne, qui peut vite devenir vite périlleuse. “On se dit qu’on connaît le site, qu’il n’y a jamais eu de problème, mais il suffit d’une fois pour que ce soit fatal, autant par le débit d’eau qui augmente vite, les cailloux qui glissent ou autre”, constate sombrement Jérémy Lamory.

“Je trouve ça bien qu’ils passent rappeler les règles, ça ne fait pas de mal”

Alors, les jeunes hydroguides sillonnent le territoire, alertent, préviennent, avec le sourire et en plusieurs langues s’il vous plaît ! “On a deux jours de formation et on apprend des petits trucs pour expliquer les règles, comme par exemple prendre en repère un caillou dans la rivière et regarder régulièrement que l’eau ne monte pas plus haut, sinon c’est signe qu’il faut sortir”, avance Rodrigue.

Pour être recruté, pas besoin d’avoir un diplôme d’ingénieur ou d’électricien : “On demande un bac + 2, pour des questions de maturité et de syntaxe, avec la maîtrise d’une seconde langue. Il faut aussi avoir le permis”, détaille Jérémy Lamory. Car Margaux et Rodrigue passent du temps dans leur voiture à surveiller les berges de leur vaste secteur de travail, qui s’étend de Mérens-les-Vals à Orlu en passant par Aston.

Leurs conseils sont toujours bien accueillis.
Leurs conseils sont toujours bien accueillis.
DDM ML

Mais leur mission ne s’arrête pas là. Les deux prennent aussi contact avec les pouvoirs publics, les commerces ou encore les offices de tourisme pour distribuer affiches et petits guides à destination du public. Une politique plutôt efficace puisque des gens rencontrés sur la berge de l’Oriège ce jeudi matin, plusieurs connaissaient déjà certaines des règles de sécurité. Une jeune habitante du coin sourit tout de même : “Mes grands-parents viennent d’ici, il y a le barrage là-haut donc on sait que ça peut être dangereux. Mais je trouve ça bien qu’ils passent rappeler les règles, ça ne fait pas de mal.” Et pour les autres, comme cette mère se baignant avec son fils et leur chien ou un joggeur se rafraîchissant après sa course sous un soleil étincelant, les conseils de Margaux et Rodrigue ne sont pas trop.

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