Benyamin Netanyahou durant une conférence de presse avec Emmanuel Macron à l’Elysée, le 5 juin 2018. JACQUES WITT/SIPA
Premier cri d’alerte univoque au sein de la communauté internationale après le vote par le cabinet de sécurité israélien, dans la nuit de jeudi au vendredi 8 août, d’un plan visant à « prendre le contrôle de Gaza » dans l’optique d’y établir « une administration civile alternative qui ne soit ni le Hamas ni l’Autorité palestinienne ». Voici les principales réactions internationales face à ce tournant dans la guerre à Gaza, territoire sujet à une grave crise humanitaire.
• L’ONU appelle à « stopper immédiatement » ce plan
Le plan du gouvernement israélien « visant à une prise de contrôle militaire complète de la bande de Gaza occupée doit être immédiatement stoppé », a déclaré vendredi dans un communiqué le Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme Volker Türk. Le responsable onusien accuse ce plan d’aller « à l’encontre de la décision de la Cour internationale de Justice selon laquelle Israël doit mettre fin à son occupation dès que possible, de la réalisation de la solution à deux Etats et du droit des Palestiniens à l’autodétermination ».
Le Haut-Commisaire a fait part de son inquiétude quant aux conséquences humaines d’une telle politique : « Tout porte à penser que cette nouvelle escalade entraînera des déplacements forcés encore plus massifs, plus de meurtres, plus de souffrances insoutenables, des destructions insensées et des crimes atroces. » Volker Türk appelle le gouvernement israélien à l’apaisement, lui demandant de laisser l’aide humanitaire entrer « sans entrave » dans la bande de Gaza « au lieu d’intensifier cette guerre », tout en réaffirmant la nécessité de « libérer immédiatement et sans condition » tous les otages israéliens.
• L’UE appelle Israël à « revenir » sur sa décision
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a appelé en début d’après-midi Israël à « revenir » sur son plan pour Gaza.
« Le gouvernement israélien doit revenir sur sa décision de prolonger son opération militaire à Gaza », a dit la cheffe de l’exécutif européen sur le réseau social X. « Un cessez-le-feu est nécessaire immédiatement », a-t-elle aussi précisé.
• L’Allemagne suspend ses exportations d’armes
Alors que l’Union européenne demande un retour en arrière, l’Allemagne a indiqué prendre une mesure concrète, celle de la suspension des exportations d’armes. Un changement de cap majeur vis-à-vis d’Israël dont l’Etat allemand était jusqu’ici l’un des plus fidèles alliés. Berlin s’était notamment opposé à la suspension ou à la résiliation de l’accord d’association UE-Israël, qui faisait l’objet d’un réexamen par les Vingt-Sept.
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Il devient « de plus en plus difficile de comprendre » en quoi le plan militaire israélien permettrait d’atteindre ses objectifs dans la bande de Gaza et, « dans ces circonstances, le gouvernement allemand n’autorise pas, jusqu’à nouvel ordre, les exportations d’équipements militaires susceptibles d’être utilisés dans la bande de Gaza », a déclaré le chancelier allemand Friedrich Merz, dans un communiqué.
• L’Espagne « condamne fermement »
« Nous condamnons fermement la décision du gouvernement israélien d’intensifier l’occupation militaire de Gaza », a déclaré le ministre espagnol des Affaires étrangères, Manuel Albares.
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Pour le responsable espagnol, qui craint « davantage de destructions et de souffrance », les priorités actuelles devraient être celles d’« un cessez-le-feu permanent, de l’entrée massive et immédiate d’aide humanitaire et la libération de tous les otages ». L’homme d’Etat a aussi indiqué sur X que « la paix définitive dans la région ne sera atteinte qu’en établissant la solution à deux Etats, qui inclut un Etat de Palestine réaliste et viable ».
• Le Royaume-Uni évoque une « erreur »
Même son de cloche du côté du gouvernement britannique, qui avait fait savoir fin juillet l’intention du Royaume-Uni de reconnaître l’Etat de Palestine en septembre. « La décision du gouvernement israélien d’intensifier son offensive à Gaza est une erreur et nous l’exhortons à reconsidérer sa décision immédiatement », a déclaré vendredi le Premier ministre britannique Keir Starmer dans un communiqué. Il a ajouté que cette « action ne contribuera en rien à mettre fin au conflit ni à obtenir la libération des otages. Elle ne fera qu’engendrer davantage de massacres ».
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Le Royaume-Uni partage les mêmes attentes que le chef de l’exécutif espagnol, appelant à un « cessez-le-feu, une augmentation de l’aide humanitaire et la libération de tous les otages ». Pour Keir Starmer, « la solution diplomatique est possible », mais il faut pour cela que les deux parties « s’éloignent de la voie de la destruction ». Elle ne pourra se faire avec le Hamas, a rappelé le responsable britannique, qui appelle à son désarmement.
• La Chine se dit « gravement inquiète »
La Chine, elle, a exprimé vendredi sa « grave inquiétude » face au plan, exhortant Israël à « cesser immédiatement ses actions dangereuses ». Dans une réponse écrite à l’AFP, un porte-parole du ministre chinois des Affaires étrangères a déclaré : « Gaza appartient au peuple palestinien et fait partie intégrante du territoire palestinien. »
• La Turquie exhorte la communauté internationale à « empêcher » le plan israélien
« Nous appelons la communauté internationale à assumer ses responsabilités en vue d’empêcher la mise en œuvre de cette décision, qui vise à déplacer de force les Palestiniens de leur propre terre en rendant Gaza inhabitable », a écrit quant à lui le ministère turc des Affaires étrangères vendredi, dans un communiqué.
• L’opposition israélienne dénonce une « catastrophe »
Plusieurs personnalités de la société israélienne ont réagi, manifestant leur opposition à cette nouvelle offensive à Gaza. Le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a fustigé vendredi matin sur le réseau social X une « catastrophe qui va entraîner beaucoup d’autres catastrophes ». Il dénonce les conséquences de ce plan qui amènerait, selon lui, « la mort des otages, celle de nombreux soldats, coûter des dizaines de milliards aux contribuables israéliens et [provoquer] une faillite diplomatique ». Jeudi, le lieutenant-général israélien Eyal Zamir a lui-même évoqué publiquement des réticences vis-à-vis de ce plan : « Nous continuerons d’exprimer notre position sans crainte, de manière pragmatique, indépendante et professionnelle. ».
• « Une aventure criminelle qui lui coûtera cher », indique le Hamas
Avertissant sur « un nouveau crime de guerre » que s’apprêterait à commettre Israël, le Hamas a aussi réagi : « cette aventure criminelle coûtera cher et ne sera pas un voyage facile » pour l’armée israélienne, a-t-il écrit vendredi dans un communiqué, diffusé sur Télégram. « Les plans de Netanyahou […] confirment sans l’ombre d’un doute son désir de se débarrasser des otages et de les sacrifier dans la poursuite de ses intérêts personnels et de son agenda idéologique extrémiste », a affirmé jeudi le Hamas, qui retient toujours 49 otages, dont 27 sont présumés morts.