Vivre ou survivre ? David Leconte, 29 ans, raconte son choix de ne pas laisser sa vie être définie par la maladie. Atteint de la mucoviscidose, il a écrit ce livre depuis son lit d’hôpital en soins palliatifs au CHU de Toulouse à Purpan avec l’aide de l’association Notes de Vie.
“Je n’ai jamais lu un livre de ma vie, et aujourd’hui j’en ai écrit un”, plaisante David Leconte. Le masque respiratoire qu’il porte n’empêche pas de voir l’immense sourire de ce patient de 29 ans, atteint de la mucoviscidose. Son livre raconte son combat contre cette maladie des poumons incurables, qui l’a mené jusque dans cette unité de soins palliatifs du CHU de Toulouse.
“Tu peux être fière de toi David” lui glisse Valérie Bernard, biographe hospitalière de l’association Notes de vie, qui l’a aidé à écrire son livre. En 6 mois, elle lui a permis de mettre en forme son récit, puis en a fait imprimer et relier 100 exemplaires, grâce à des dons, notamment de la part de la fondation Gregory Lemarchal.
“J’étais coincé entre la volonté de me battre et mon refus obstiné de me soustraire aux règles de la maladie”
“Chambre 322” raconte l’histoire de cet homme né à la Guadeloupe et atteint de la mucoviscidose, une maladie génétique qui provoque un excès de mucus dans ses poumons. Depuis ses 2 ans, il est suivi par des médecins, notamment à l’Hôpital des Enfants de Toulouse. David raconte tout : les séances de kiné épuisantes, les traitements et hospitalisations à répétition pour lutter contre cette maladie qui ne dort jamais.
Il parle aussi de son dilemme. “J’étais coincé entre mon envie de me battre et mon refus obstiné de me soustraire aux règles de la maladie” écrit-il. David veut vivre comme tous les jeunes gens de son âge. Il sort avec ses amis, boit, fume, tombe amoureux, voyage, et commence même une formation d’agent cynophile à 25 ans après une greffe des poumons. Mais la maladie ne lui laisse aucun répit, et aujourd’hui, il ne quitte plus ni son lit d’hôpital, ni son respirateur artificiel.
Quand on lui demande s’il regrette la manière dont il a vécu, sans toujours respecter les consignes de ses médecins, il prend le temps de réfléchir à sa réponse. “Oui et non. Si je n’avais pas vécu comme ça, je serais peut-être dans un meilleur état de santé aujourd’hui. Mais je n’aurais rien connu d’autre que la maladie”.
“Laisser une trace”
Ce livre, c’est son grand projet. “Je n’ai rien. Je n’ai pas d’argent, je n’ai pas fondé de famille. Ce livre c’est ma trace, c’est un truc tout bête mais c’est à moi” confie-t-il. Laisser une trace, mais aussi remercier sa famille, et les soignants.
“Sans eux, je ne pense pas que je serais encore là aujourd’hui. Je me serais suicidé.” affirme David, embrassant du regard l’équipe de soignantes venues assister à l’entretien dans la chambre. Il a dédicacé un exemplaire de son livre pour chacune d’entre elles.

Cependant, la majorité des 100 exemplaires de son livre est destinée à un autre public. “Je veux que chaque patient qui a une maladie incurable comme moi ait accès à ce livre” déclare-t-il avec détermination. Son histoire est un message pour eux : “Profitez de la vie, mais faites-le intelligemment. Moi j’ai profité trop, trop vite. J’ai fait n’importe quoi. On ne peut pas gagner à ce jeu avec la maladie”.
La biographie hospitalière, un “soin de support” encore méconnu
Valérie Bernard hoche la tête, sourire aux lèvres. Elle l’a aidé pendant plusieurs mois à mettre en forme son livre. “La biographie hospitalière, c’est un soin de support à part entière”, explique-t-elle. Cette infirmière de formation recueille les témoignages de patients en fin de vie pour en faire des livres, souvent destinés aux proches. Toute l’équipe du service de soins palliatifs a pu observer l’efficacité de cette activité auprès des patients, à commencer par le chef du service, Dr Nicolas Saffon. “Cela apporte beaucoup aux patients, ils sont moins anxieux, plus en confiance. Cela leur permet de retrouver un peu de vie” approuve-t-il.
Impossible d’en douter quand on entend la fierté dans la voix de David, et sa détermination à faire connaître son histoire au plus grand nombre. Le jeune homme ne se fait pas d’illusions. Il sait qu’il ne lui reste que peu de temps à vivre. Mais grâce à ce livre, il part “fier d’avoir réussi son projet”. Et en paix.
Soutenir la biographie hospitalière
L’association toulousaine Notes de Vie recueille les témoignages de patients en fin de vie dans toute l’Occitanie depuis 2019. Considérée comme un soin de support à part entière, comme l’art-thérapie par exemple, la biographie hospitalière permet aux patients de laisser une trace, sous forme de livre ou de lettres, à leurs proches. Reconnue d’intérêt général, Notes de Vie fonctionne uniquement grâce aux dons et mécénats. Les activités de l’association sont à découvrir sur leur site internet. Pour la soutenir, il est possible de faire un don via ce lien. Contact à Toulouse : valerie.bernard0@orange.fr ou 0608522752.