Un camp de réfugiés à Jenine, en Cisjordanie, le 11 janvier 2025. KHADIJA TOUFIK / MIDDLE EAST IMAGES VIA AFP
Un ministre israélien a appelé jeudi à accélérer un projet clé de construction de 3 400 logements en Cisjordanie et à annexer ce territoire palestinien occupé par Israël, en riposte aux annonces de plusieurs pays de reconnaître un Etat palestinien, suscitant des condamnations à l’international.
A lire aussi
Récit
Cisjordanie-Israël, voyage en terres brûlées : « Tu vois, il est tout petit, notre pays. C’est le seul qu’on a »
L’ONU et l’Union européenne ont appelé Israël à ne pas appliquer ce projet, baptisé E1, qui selon ses détracteurs couperait la Cisjordanie en deux et empêcherait définitivement la création d’un éventuel Etat palestinien disposant d’une continuité territoriale. « Le Nouvel Obs » fait le point.
• Le ministre des Finances menace d’occuper toute la Cisjordanie
« Ceux qui veulent aujourd’hui reconnaître un Etat palestinien recevront une réponse de notre part sur le terrain (…) Par des faits concrets : des maisons, des quartiers, des routes et des familles juives qui construisent leur vie », a déclaré jeudi le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich, lors d’un événement organisé dans la colonie de Maalé Adoumim.
« En ce jour important, j’appelle le Premier ministre Benyamin Netanyahou à appliquer la souveraineté israélienne en Judée-Samarie [référence au nom biblique de la Cisjordanie utilisé par les Israéliens], à abandonner définitivement l’idée d’une partition du pays et à faire en sorte que d’ici septembre, les dirigeants hypocrites européens n’aient plus rien à reconnaître », a-t-il dit. Israël occupe la Cisjordanie depuis 1967. Quelque trois millions de Palestiniens y vivent, aux côtés d’environ 500 000 Israéliens, installés dans des colonies, illégales au regard du droit international. « Si vous reconnaissez un Etat palestinien en septembre, notre réponse sera l’application de la souveraineté israélienne sur toutes les parties de Judée-Samarie », a-t-il menacé.
A lire aussi
Entretien
En Cisjordanie, Israël « rend la vie des Palestiniens invivable pour les inciter à partir d’eux-mêmes »
Face à la poursuite de l’offensive israélienne et du désastre humanitaire à Gaza, ravagée par plus de 22 mois de guerre, plusieurs pays occidentaux dont la France, le Royaume-Uni et le Canada ont dit envisager de reconnaître un Etat de Palestine, à l’occasion de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre. Mais une telle reconnaissance sera largement symbolique en raison du refus d’Israël de la création d’un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens. Ces derniers ambitionnent de l’établir sur les territoires de Cisjordanie et de Gaza avec comme capitale Jérusalem-Est, annexé par Israël.
• L’Autorité palestinienne « condamne fermement » le projet
L’Autorité palestinienne basée à Ramallah en Cisjordanie a « condamné fermement » ce projet et « appelé à une intervention internationale et des sanctions pour arrêter sa mise en œuvre ». « La construction dans la zone E1 est une continuation des plans d’occupation visant à anéantir toute possibilité d’établir l’Etat palestinien », a-t-elle affirmé.
A lire aussi
Entretien
Elie Barnavi : « Le camp de la paix n’a pas disparu »
L’ONG israélienne anti-colonisation, La Paix maintenant, a dénoncé un « plan fatal pour l’avenir d’Israël et pour toute chance d’une solution à deux Etats » du conflit israélo-palestinien vieux de plusieurs décennies. Selon elle, un accord final au plan sera discuté mercredi prochain par un comité technique dépendant du ministère de la Défense et, après toutes les étapes bureaucratiques, « il pourrait être mis en place d’ici quelques mois avec des constructions dans un an environ ». L’ONG affirme que ce comité a déjà rejeté toutes les objections légales au projet.
• L’ONU s’inquiète pour la solution à deux Etats
Le patron de l’ONU, Antonio Guterres, a averti que ce projet, « s’il se concrétisait » « mettrait fin aux perspectives d’une solution à deux Etats » et « couperait le nord du sud de la Cisjordanie ». « La décision des autorités israéliennes de faire avancer le plan de colonisation E1 sape davantage la solution à deux Etats tout en constituant une violation du droit international », a déclaré la cheffe de la diplomatie de l’Union européenne Kaja Kallas.
A Berlin, soutien historique d’Israël, le ministère des Affaires étrangères a pour sa part dit s’opposer « fermement » à la poursuite par Israël de son projet en Cisjordanie occupée. « La construction de colonies viole le droit international », les résolutions « du Conseil de sécurité des Nations unies » et « complique une solution négociée à deux États », souligne la diplomatie allemande.