Nicolás Maduro et Donald Trump, présidents du Venezuela et des Etats-Unis. JUAN BARRETO, ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP
Une annonce inattendue et belliqueuse, aux conséquences troubles. Donald Trump a averti samedi 29 novembre au soir qu’il considérait l’espace aérien du Venezuela comme « entièrement fermé », déclenchant la colère de Caracas qui a dénoncé un « acte hostile » et lancé des manœuvres militaires. « À toutes les compagnies aériennes, pilotes, trafiquants de drogue et trafiquants d’êtres humains, » a écrit en lettres majuscules le président des Etats-Unis sur son réseau Truth Social, « veuillez considérer L’ESPACE AÉRIEN AU-DESSUS ET AUTOUR DU VENEZUELA COMME ENTIÈREMENT FERMÉ ». Sans donner plus de détails.
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Selon des sources auprès du « New York Times » et du « Wall Street Journal », cette publication fait suite à un appel téléphonique entre Trump et le dirigeant vénézuélien Nicolás Maduro la semaine dernière. Jeudi, Trump a laissé entendre que des frappes terrestres contre le Venezuela pourraient être imminentes. « Cela va commencer très bientôt. Nous les avons avertis : cessez d’envoyer du poison dans notre pays », a-t-il déclaré lors de son discours de Thanksgiving à Mar-a-Lago.
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• Ce que reproche Trump au Venezuela
Le gouvernement Trump, qui dit lutter contre les cartels de la drogue du Mexique et d’Amérique centrale, intensifie la pression avec un déploiement militaire majeur dans les Caraïbes, notamment au moyen du plus grand porte-avions du monde. Ces derniers jours, une activité constante d’avions de combat américains a été enregistrée à quelques dizaines de kilomètres des côtes vénézuéliennes, selon des sites de suivi des aéronefs. Donald Trump accuse Caracas d’être derrière le trafic de produits stupéfiants qui inondent le marché des Etats-Unis.
Caracas dément et insiste sur le fait que l’objectif véritable de Washington serait un changement de régime et la mainmise sur les réserves pétrolières du pays. Le gouvernement du président Maduro a condamné samedi « la menace colonialiste qui prétend affecter la souveraineté de son espace aérien, constituant ainsi une nouvelle agression extravagante, illégale et injustifiée contre le peuple vénézuélien ». Il s’agit d’« un acte hostile, unilatéral et arbitraire, incompatible avec les principes les plus élémentaires du droit international », a tonné le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.
Au pouvoir depuis 2013, le président socialiste Nicolás Maduro, héritier politique de Hugo Chavez, figure de la gauche radicale en Amérique latine, a été réélu en 2024 à l’issue d’un scrutin contesté, marqué par des troubles et des arrestations.
• Liaisons aériennes suspendues
La Federal Aviation Administration (FAA) a renvoyé les questions concernant le message publié samedi par Trump sur les réseaux sociaux à un avis aux aviateurs qu’elle a publié la semaine dernière et qui est en vigueur jusqu’en février. La FAA demande aux pilotes de faire preuve de prudence lorsqu’ils survolent le Venezuela en raison de « la détérioration de la situation sécuritaire et de l’intensification des activités militaires » dans et autour du pays.
Les États-Unis n’ont pas le pouvoir de fermer l’espace aérien d’un autre pays, mais la FAA peut interdire aux compagnies aériennes américaines de voler vers certains pays ou dans leur espace aérien. L’aéroport de Maiquetia qui dessert Caracas fonctionnait normalement samedi mais six compagnies aériennes ont suspendu cette semaine leurs liaisons avec le Venezuela pour des raisons de sécurité, ce qui leur a valu de se voir retirer leurs licences par Caracas.
En outre, Caracas a dénoncé le fait que Washington « a suspendu de manière unilatérale » le rapatriement de migrants clandestins vénézuéliens expulsés des Etats-Unis, Donald Trump ayant fait de la lutte contre l’immigration sa priorité. « A ce jour, 75 vols ont été effectués pour le rapatriement de 13 956 personnes », rappelle Caracas.
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• Chantage et menace d’intervention terrestre
Donald Trump avait prévenu jeudi que ses forces armées allaient « très bientôt » commencer à cibler des « trafiquants de drogue vénézuéliens » lors d’opérations terrestres, suscitant l’opposition de parlementaires américains du Congrès, républicains comme démocrates. « Pour rappel, seul le Congrès a le pouvoir de déclarer la guerre », a affirmé la républicaine Marjorie Taylor Greene, figure de la droite radicale, mais qui a rompu avec son mentor Donald Trump et démissionné de la Chambre des représentants.
Selon les informations du « New York Times » et du « Wall Street Journal », Trump et Maduro ont discuté par téléphone des demandes du Venezuela concernant une amnistie générale pour Maduro, ses principaux collaborateurs et leurs familles, dont beaucoup font l’objet de sanctions financières et de poursuites pénales de la part des États-Unis. Trump a déclaré à Maduro que s’il ne quittait pas le pouvoir de son plein gré, les États-Unis envisageraient d’autres options, y compris le recours à la force, selon des personnes proches du dossier.
Les Etats-Unis ont mené des frappes contre plus de 20 navires vénézuéliens soupçonnés de trafic de drogue dans la mer des Caraïbes et le Pacifique depuis début septembre, tuant au moins 83 personnes, sans fournir de preuves que les navires étaient utilisés pour le trafic de drogue. Washington a désigné comme « organisation terroriste étrangère » le Cartel des Soleils, dont l’existence reste à démontrer selon de nombreux experts et qui, d’après Washington, serait dirigée par le président Maduro. « Nous venons tout juste de commencer à tuer les narco-terroristes », a déclaré le secrétaire à la Défense Pete Hegseth vendredi sur les réseaux sociaux.
• Manœuvres et déploiements militaires
Les forces armées vénézuéliennes ont conduit samedi des manœuvres militaires le long des côtes du pays, selon la télévision d’Etat qui a diffusé des images d’armements anti-aériens et de pièces d’artillerie. A Maracay, à une centaine de kilomètres de Caracas, des avions de combat d’origine russe Sukhoi et F-16 ont pris part à un meeting aérien.
Selon des données de suivi des vols et un responsable de la défense auprès du « Wall Street Journal », les États-Unis ont simulé des attaques contre le Venezuela à l’aide d’avions de chasse et de bombardiers au cours des dernières semaines. Ils ont également renforcé leur présence dans les Caraïbes afin de pouvoir accélérer le rythme des opérations aériennes si Trump décidait de poursuivre l’action militaire. Les États-Unis ont déployé une puissance de combat considérable dans les Caraïbes, notamment leur porte-avions le plus avancé, plusieurs destroyers de la marine, des avions de combat F-35B et des drones MQ-9 Reaper, entre autres armements.
Dans un communiqué, le Commandement Sud des États-Unis, qui supervise les activités militaires dans les Caraïbes, a déclaré : « Le renforcement de la présence militaire américaine […] permettra de renforcer la capacité des États-Unis à détecter, surveiller et perturber les acteurs et les activités illicites qui compromettent la sécurité et la prospérité du territoire américain et notre sécurité dans l’hémisphère occidental. »
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Mercredi, lors d’une visite de Pete Hegseth sur place, le président de la République dominicaine a déclaré avoir autorisé les États-Unis à ravitailler en carburant des avions et à transporter du matériel et du personnel dans des zones réglementées du pays afin de lutter contre le trafic de drogue. Les États-Unis installent également un système radar sur l’île de Tobago, située à plusieurs kilomètres de la côte vénézuélienne. Le Premier ministre de Trinité-et-Tobago a déclaré que des Marines américains se trouvaient à l’aéroport de l’île. Les États-Unis utilisent déjà les aéroports de Porto Rico et de Sainte-Croix, et effectuent des missions aériennes à partir du porte-avions USS Gerald R. Ford, selon les données de suivi des vols et des photos provenant de sources ouvertes.
« Les actions imprudentes du président Trump envers le Venezuela poussent les États-Unis de plus en plus près d’une nouvelle guerre coûteuse à l’étranger », a martelé samedi soir Chuck Schumer, le chef de file des démocrates au Sénat.
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