October 3, 2025

"Il ne doit pas y avoir un gagnant et 60 perdants" : salariés et élus réclament des réponses au patron de Gerstube

l’essentiel
Six mois après l’incendie qui a détruit l’usine Gerstube, salariés, élus et direction se sont enfin rencontrés jeudi soir à Vic-Fezensac. Entre plan social minimaliste et pistes de relance en coopérative, l’avenir des 60 emplois reste incertain.

Ce jeudi soir, la salle des conférences de l’hôtel de ville de Vic-Fezensac accueillait la réunion entre élus, salariés et patron de Gerstube. De 17 h 30 à 20 heures, les interlocuteurs ont échangé sur le futur de l’entreprise détruite par un incendie en avril. Si aucune décision n’a été prise, les salariés ont pu se réjouir du soutien des collectivités.

Aux côtés du préfet du Gers et du maire de Vic-Fezensac, le PDG Baptiste Allainé n’a pas convaincu la salle, jeudi, lors de la réunion entre élus, salariés et direction de Gerstube.
Aux côtés du préfet du Gers et du maire de Vic-Fezensac, le PDG Baptiste Allainé n’a pas convaincu la salle, jeudi, lors de la réunion entre élus, salariés et direction de Gerstube.
DDM – SEBASTIEN LAPEYRERE

Cette réunion, les employés de Gerstube l’attendaient depuis des mois. Appuyés par la CGT, ils ont fini par l’obtenir. La plupart d’entre eux s’interrogent toujours sur l’absence pesante de communication de la part de la direction du site, pendant des mois.

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Baptiste Allainé, le PDG du groupe Alfiplast qui avait racheté Gerstube quelques mois avant le sinistre, avait répondu à l’invitation.

“Il n’a jamais fourni de documents”

Mais l’entrepreneur a peiné à convaincre ses salariés, comme les élus présents, des motivations économiques de la fermeture du site. “On a perdu beaucoup de temps, du fait de ce patron qui s’est justifié en arguant de la fermeture du site, de la durée de l’enquête, souligne le conseiller régional Eric Cadoré. M. Allainé avance beaucoup d’arguments financiers pour justifier la fermeture de Gerstube, des seuils de rentabilité insuffisants, etc. mais il n’a jamais fourni de documents !”

Salariés, délégués syndicaux, élus et direction réunis ce jeudi 2 octobre à Vic-Fezensac.
Salariés, délégués syndicaux, élus et direction réunis ce jeudi 2 octobre à Vic-Fezensac.
DDM – SEBASTIEN LAPEYRERE

Les salariés attendaient en effet que leur patron produise des faits, plus de six mois après le sinistre. “On l’a vu se retrancher derrière des arguments sans jamais les démontrer, relève le délégué syndical CGT de Gerstube, Christophe Boronad. Monsieur Allainé parle de passif, de dettes, mais jamais de la trésorerie, des budgets, etc.”

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Au point que le préfet du Gers, Alain Castanier, a réclamé des listes de chiffrages, même sommaires, pour estimer les coûts réels d’une reprise d’activité de Gerstube.

Comment reprendre l’activité ?

Car le fond de cette réunion consistait à étudier les possibilités de reconstruire l’usine, et de préserver ses près de 60 emplois, actuellement suspendus à un plan de sauvegarde (PSE). D’autant que le PSE mis sur la table par Baptiste Allainé n’est pas d’une générosité excessive. Le préfet, encore une fois, a indiqué que les services de l’État examineraient de près ce plan, taclant au passage un PSE minimaliste, qui mériterait une révision à la hausse.

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Nombreux sont les salariés à envisager une reprise en SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif), un format qui pourrait associer des collectivités, et même l’actuel propriétaire de Gerstube. Encore faut-il savoir sur quoi se fonder. La Région se dit prête à appuyer grâce à ses divers dispositifs une relance, mais il manque les informations économiques. “Nous demandons ces informations pour permettre de monter un dossier, explique Christophe Boronad. Pour le moment, les contours sont trop flous pour avancer sur une SCIC.”

Par exemple, les coûts qui ont été présentés aux assurances pour les indemnisations se montent à 19 M€ pour les machines et 6 M€ pour les bâtiments. “Mais cela correspond à du très haut de gamme et à une reconstruction à l’identique, fait valoir le syndicaliste. On peut envisager de reprendre l’activité avec un matériel moins coûteux, et une structure plus petite.”

“Un chemin étroit”

Député de la 2e circonscription et élu régional, David Taupiac rappelle que la Région a fait venir tous les services à même d’aider. “Les dispositifs de la Région ne sont pas limités dans le temps. Ils sont toujours valables. Mais le patron ne veut pas s’en saisir. En dépit de nos propositions, il ne nous a jamais sollicités pour en savoir plus. Pour lui, il y a un modèle économique qui n’était pas viable et qu’il ne s’agit pas de reconstruire.”

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La création d’une SCIC, où l’entreprise pourrait être partie prenante dans l’un des 3 collèges, celui des salariés, celui des partenaires et celui des clients, est envisagée par les services de la Région, avec l’union régionale des Scop.

Les élus régionaux et le président du Département présents lors de la rencontre.
Les élus régionaux et le président du Département présents lors de la rencontre.
DDM – SEBASTIEN LAPEYRERE

“Aujourd’hui, cela reste très improbable, reconnaît le député, mais il y a une piste, un chemin étroit.” Un chemin qui passe par l’argent, celui de la plus-value potentielle faite par le groupe, une fois les indemnités des assurances payées, la dépollution du site effectuée et le PSE réglé, et qui selon l’élu, “devrait revenir irriguer le territoire. Il n’y a pas d’obligation pour l’entreprise, mais j’ai dit au PDG que je saisirais, dès qu’il sera nommé, le ministre de l’Industrie. Il y a un sujet économique, un sujet territorial et un sujet éthique de l’emploi de l’industrie.”

Une idée que le délégué syndical résume d’une phrase : “Dans cette histoire, il ne doit pas y avoir un gagnant et 60 perdants.”

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