September 23, 2025

"Ma vie a failli se terminer beaucoup plus tôt" : le couple victime de home-jacking témoigne, les accusés se contredisent

l’essentiel
La troisième journée de procès des auteurs présumés du home-jacking à Hautefage-la-Tour s’est articulée autour des dépositions des parties civiles, puis des auditions des quatre accusés quant au déroulé des faits.

“Imaginez pour un homme qui doit protéger sa femme, ce que j’ai ressenti quand j’ai repris connaissance et vu qu’elle avait été frappée si violemment”, s’émeut le septuagénaire, droit dans son costume trois pièces. Quand les retraités se croisent sur le chemin menant à la barre, ils joignent leurs mains et échangent quelques mots discrets, comme pour se donner le courage d’évoquer leurs pénibles souvenirs. Dans les témoignages de Bernard Hayes et Célia Bridges, l’élégance est constante et les mots semblent toujours bien choisis. Même quand vient le moment pour le couple de Britanniques, ce lundi 22 septembre devant la cour d’assises du Lot-et-Garonne, de décrire les violences subies dans la nuit du 29 août 2022, dans son domicile de Hautefage-la-Tour.

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Versions opposées

Contradictions, explications décousues… Du côté de la partie adverse, interrogée dans l’après-midi, on ne peut pas dire que les accusés ont fait preuve d’une même unité. À l’exception des deux hommes dans le box, Tarik El Malouani et Fouad Faize, les seuls à avoir pénétré l’habitation des parties civiles. Selon le duo de braqueurs, Ylsem Adib les aurait entraînés dans cette virée criminelle au cours d’une soirée alcoolisée, en raison de dettes liées aux stupéfiants que ces derniers traînaient envers lui. “Il est venu chez moi, nous avons bu, nous sommes allés chez Faize. Ylsem a insisté pour que nous fassions ce braquage, on s’est exécuté”, maintient Tarik El Malouani. Sur place, celui-ci atteste n’avoir porté “que trois coups” à Bernard Hayes et n’était, selon ses mots, pas armé d’un couteau mais d’un tournevis.

Quid de la participation d’Abderrahmane Gomri dans ce sombre projet ? Il serait intervenu quelques mois avant les faits, conseillant à Ylsem Adib – désireux de “se faire de l’argent rapide” – de visiter la maison des Britanniques, ce dernier en connaissant déjà la prospérité pour y avoir effectué des travaux de plomberie dix ans auparavant. “Ce n’était que des paroles en l’air. Nous avions bu. Nous sommes partis en voiture, je lui ai montré la maison. Mais jamais je n’aurais imaginé qu’ils allaient y faire un cambriolage”, s’explique le mis en cause. “Pourtant, vous avez prêté main-forte pour la revente des bijoux volés”, remémore Maître Sarah Labadie, au soutien des victimes. Sur ce point, l’homme explique avoir joué, “par peur”, l’interlocuteur entre le brocanteur et les détenteurs du butin : trois bagues en or brutalement dérobées à Célia Bridges.

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Une vie chamboulée

L’instigateur présumé contredit les déclarations de ses coaccusés. Ylsem Adib, le conducteur, assure avoir été impliqué dans cette épopée sans en connaître la finalité. “Je suis arrivé chez Faize, Tarik m’a dit : on va aller péter de la marijuana. J’ai suivi. Mais une fois arrivé devant la maison, j’ai compris qu’il ne s’agissait pas de cela. Quand les chiens du voisin ont aboyé, j’ai fait demi-tour. J’ai attendu dans la voiture. Je les ai vus revenir couverts de sang et je leur ai dit : mais qu’est-ce-que vous avez fait ?”. L’argument des dettes serait également, d’après lui, inventé de toutes pièces par ses anciens acolytes. “Je n’ai jamais été dans la drogue. Quand je les voyais consommer ces produits, je les jetais.”

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Si les interrogatoires des accusés n’ont pas permis de déterminer les circonstances exactes de cette soirée, les parties civiles ont pu, à la barre, témoigner des séquelles qu’elle leur a laissées. “Il est très difficile de vivre comme avant. J’avais l’habitude de m’installer sur ma terrasse le soir, pendant l’été. Je ne le fais plus. Je reste à l’intérieur, enfermée”, a confié la retraitée, traumatisée de ces minutes où elle a pensé que les malfaiteurs “allaient tuer” son compagnon. “Nous avons travaillé toute notre vie. Notre rêve était de passer notre retraite dans ce pays dont nous sommes tombés amoureux. Ces hommes ont volé notre vie en France, l’ont détruite. J’espérais finir mes jours dans cette maison… Mais ma vie a failli se terminer beaucoup plus tôt”, abonde le conjoint. À la suite de cet évènement, le couple a rapidement mis en vente sa propriété française, espérant reprendre sa vie en Grande-Bretagne.

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